Auteurs : Jean-Pierre Hadida & Alicia Sebrien.
Musique : Jean-Pierre Hadida.
Mise en scène : Pierre-Yves Duchesne.
Assistante mise en scène : Claire Jomard.
Chorégraphies : Johan Nus.
Création lumière, scénographie : Sébastien Lanoue.
Avec : James Noah, Juliette Béhar, Manu Vince, Jean-Luc Guizonne, Faloen Tayoung, Lunik Grio, Roland Karl, Harmonie Dibongue-Levy, N’dy Thomas, Stéphanie Schlesser, Anthony Fabien, Joel Wood, Sabrina Giordano, Audjyan, Mômô Bellance, Nour Caillaud, Mickael Gadea, Thomas Bimai, Konan Jean Kouassi, Haykel Skouri, Kebin Jubert.
Résumé : Johannesburg années 50.
Le jeune Nelson Mandela ouvre le premier cabinet d’avocats noirs d’Afrique du Sud pour venir en aide aux victimes de l’apartheid. Il devient le leader politique de l’opposition. Le massacre de Sharpeville radicalise sa position, il est recherché, arrêté puis condamné à la prison à vie au Fort de Robben Island.
Vingt ans plus tard.
Les habitants de Soweto se soulèvent. Sam, un jeune militant noir se fait arrêter. En prison, il fréquente celui que l’on surnomme « Madiba », Nelson Mandela, qui devient son modèle. Sa fiancée, Sandy, le fait libérer grâce aux relations du chef de la police, Peter Van Leden, l’afrikaner blanc chez qui elle travaille. Will, le jeune frère noir de Sandy, tombe amoureux d’Helena Van Leden, la fille de Peter. Cet amour va grandir, mais le contexte politique leur rend la vie impossible, et ils se séparent. Will milite pour la libération de Mandela et le boycott économique de l’Afrique du Sud. Après 27 ans de prison, Mandela est enfin libre. Helena revient d’un séjour à Londres où elle militait contre l’apartheid. Alors qu’il venait de la retrouver, Will se fait assassiner par des extrémistes blancs. Grâce au principe d’« un homme, une voix », Mandela est élu président de la nouvelle République d’Afrique du Sud. Vient l’heure du pardon et de la réconciliation : Peter Van Leden se rapproche de sa fille et regrette son attitude raciste. Tous ensemble ils prônent la « nation arc-en-ciel », symbole de la nouvelleAfrique du Sud de Madiba.
Notre avis (écrit en 2016) : Madiba, le Musical se voulait, d’après son affiche, un hommage à Nelson Mandela. Choix légitime, tant l’homme a marqué l’Histoire. Par sa personnalité, par son parcours, et surtout par sa vie et ce combat inlassable et victorieux contre l’apartheid. Si Madiba ‑son nom de clan tribal- est devenu un mythe, inscrit pour toujours au panthéon des grands hommes, cet « hommage » musical ne restera, de son côté, surement pas dans les annales. On peut même se demander ce qui a pris aux créateurs du spectacle pour passer, à ce point là, totalement à côté de cette figure majeure, noyant la vie d’un héros dans un conte à l’eau de rose. Car d’hommage, il est finalement bien peu question dans cette production inédite. Le mythe Mandela ‑qui apparait de temps en temps de façon totalement elliptique, sert surtout de prétexte à une histoire d’amour entre un jeune noir et une jeune blanche. En plein apartheid, leur amour semble évidemment impossible et les deux héros n’ont plus qu’à se lamenter. Rien d’original, loin de là. Et le reste de l’intrigue manque lui aussi en tous points de finesse : l’horrible colonel blanc n’est autre que le père de l’héroïne, Mandela se voit présenté ‑lors de ses rares apparitions- comme un homme capable de résoudre tous les problèmes et le peuple noir ne rêve qu’à un avenir meilleur, qui finira bien par arriver. L’amour ‑et le scénario- faisant des miracles, le colonel va finalement retourner sa veste, les deux amants se tomber dans les bras et Mandela, quasiment absent du deuxième acte, se voir libéré, sans que l’on sache précisément ni comment, ni pourquoi…
Ce parti-pris franchement caricatural et ce pathos déconcertant en viennent à décrédibiliser les drames vécus par la population noire durant des décennies. Il se retrouve hélas, dans un livret tout aussi déroutant : sur une scène, la plupart du temps vide de tout décor, s’enchainent des tableaux anecdotiques, où des dialogues d’une platitude consternante ‑déclenchant même de nombreux rires gênés dans la salle- alternent avec des chansons qui ne resteront pas dans les mémoires-hormis quelques chœurs rythmés réussis.
A croire que les créateurs ont souhaité réunir dans des minis-séquences, tous les lieux communs de cette période, enfonçant toutes les portes-ouvertes, déroulant une succession de slogans : « le monde va changer », « bientôt les choses vont changer », « le monde est avec nous », et résumant à grands traits et de façon désordonnée l’absurdité et la souffrance de l’apartheid… On cherche en vain l’ombre d’une réflexion, la moindre explication sur le cheminement de Mandela, ou la profondeur de son engagement. Le résultat finit presque par mettre mal à l’aise et l’on ne retient finalement que les chorégraphies dynamiques, scènes d’ensemble et danses africaines, et la présence salvatrice de Jean-Luc Guizonne (Le Roi Lion, Gospel sur la Colline) et de Manu Vince (le jeune amoureux). Ce dernier, déjà repéré dans Gospel sur la Colline, s’affirme une nouvelle fois comme bon chanteur et comédien, donnant à son personnage une justesse et un naturel à saluer.
Mais en termes d’hommage, Mandela, qui refusa notamment d’être libéré pour demeurer fidèle à ses convictions, méritait vraiment mieux.