Son nom ne vous dira sans doute rien, et pourtant, ce documentariste, l’un des plus resplendissants représentant du « cinéma vérité », qui vient de mourir à 94 ans, a contribué largement à immortaliser des pans de l’histoire de la musique américaine. Connu pour le documentaire Dont look back sur la tournée anglaise de Bob Dylan en 1965, c’est également lui qui filma la session de 18 heures et demie d’enregistrement de Company. Document incroyable, ô combien précieux pour les amateurs de comédie musicale, allant au plus près du travail des musiciens, des artistes et de l’équipe d’enregistrement. L’un de ses moments les plus forts est sans doute le segment qui montre Elaine Stritch, incapable d’interpréter « The Lady who Lunch » comme elle le souhaitait et qui s’énerva toute rouge contre le documentariste, n’étant point montrée à son avantage. Il faut croire que la brouille s’effaça entre la diva et le réalisateur puisque ce fut lui qui filma un autre document d’envergure : Elaine Stritch at Liberty en 2004.
Craig Zadan, le producteur exécutif, raconte que l’intérêt pour ce documentaire était si fort que lors de sa première présentation en 1970 au festival du film de New York, il a fallu contenir une foule gigantesque et ouvrir une seconde salle pour le projeter. Rappelons que le film a été tourné sur pellicule, ce qui représente pour le réalisateur et l’équipe technique une prouesse supplémentaire (les bobines ont une durée limitée, la caméra fait du bruit, ce qui est gênant lors d’un enregistrement de disque…). Pour des raisons de droit le film ne put sortir en salle et ne fut distribué en vidéo qu’en 1992.
D.A Pennebaker fut le premier réalisateur de documentaire à recevoir un Oscar pour l’ensemble de sa carrière, tournée essentiellement vers le film musical intégrant à ses films, ou parfois en les filmant, des vedettes comme Duke Ellington, Elaine Stritch, John Lennon, Janis Joplin, Little Richard, David Bowie, Depeche Mode, mais aussi politique puisque l’un de ses autres documentaires célèbres, War room consacré à la campagne présidentielle de Bill Clinton en 1992.
Vous pouvez visionner un premier extrait du documentaire sur Company en cliquant ici et voir Elaine Stritch se dépêtrer avec son interprétation là, segment commenté en partie par l’intéressée, qui plus est (et c’est assez drôle). Rappelons que dans ses films, le réalisateur n’utilise jamais de voix off, laissant le spectateur s’approprier les images et le son de manière à comprendre, de manière plus intime, chaque film.