C’est du délire cette interview !

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Il y a quelques mois débarquait la première comédie musicale gauloise au Parc Astérix. À cette occasion, nous avons rencontré Julien Salvia et Ludovic-Alexandre Vidal pour parler de C’est du délire ! aux côtés d’Hervé Bruneau, producteur exécutif et directeur des spectacles du parc. C'est dans une ambiance très détendue que nous avons rencontré ce trio. La comédie musicale se joue au village des Gaulois depuis le mois de mars 2024 et y restera jusqu’à la fermeture saisonnière du parc en janvier 2025.

Les coulisses de la création, les castings, les contraintes, les surprises, les personnages et leurs subtilités… c’est dans la bonne humeur qu’ils ont répondu à nos questions sur le spectacle.

Com­ment est né le projet ?
Hervé : Mon rôle est de créer et d’exploiter les spec­ta­cles qui sont présen­tés au parc. Nous avons aujourd’hui cinq salles de spec­ta­cles qui pro­posent de la cas­cade, de la per­for­mance, de l’humour, du jeune pub­lic, et il nous man­quait vrai­ment un reg­istre musi­cal. Évidem­ment, quand la demande de renou­velle­ment du Théâtre Panoramix est arrivée, tout de suite je suis allé dans ce reg­istre. Et, alors que je rédi­geais l’appel d’offre pour un « sim­ple spec­ta­cle musi­cal », Del­phine Pons (direc­trice générale du parc) me demande : « Com­ment peut-on aller plus loin dans le style musi­cal ? » Je lui pro­pose de par­tir sur une vraie comédie musi­cale, dans une ver­sion puriste du genre, qui n’est pas com­mune dans les parcs d’attractions. Nous démar­chons donc qua­tre binômes d’auteurs/compositeurs en deman­dant une page de dia­logues, un syn­op­sis et une chan­son. Les garçons (Ludo et Julien) vont plus loin et nous en pro­posent deux de chaque et, pour toute l’équipe, ça a été un vrai coup cœur et une évi­dence. Toute l’année 2022, ils ont écrit le livret en dia­logue per­ma­nent avec les Édi­tions Albert René pour les ajuste­ments de texte et de vocabulaire.
Ludo : Toute cette pre­mière année d’échanges était hyper exci­tante parce que, quand tu t’attaques à un pat­ri­moine cul­turel pareil, tu as envie de mix­er tous les codes de la comédie musi­cale à l’anglo-saxonne comme on les aime et, en même temps, de faire exis­ter tout l’univers d’Astérix. Faire coex­is­ter les deux, c’était le gros défi pour que les gens aient l’impression d’avoir la BD sur scène. Et c’était intéres­sant de voir que tel mot ne ren­trait pas dans la gram­maire de l’univers mais un autre oui. On a donc relu l’ensemble des albums d’Astérix.
Julien : La com­mande ini­tiale du parc était d’avoir un spec­ta­cle mod­erne, donc il fal­lait écrire un texte mod­erne tout en gar­dant le voca­ble d’Astérix et c’était une des gageures ; et pour moi, la sec­onde était d’écrire une his­toire avec des per­son­nages qu’on ne con­naît pas et ayant un arc nar­ratif, en trente minutes.

Juste­ment, quelles ont été vos con­traintes dans ce travail ?
Julien : La pre­mière était une con­trainte de temps.
Hervé : Au départ, on visait 25 min­utes et on a ter­miné à 29 min­utes 44 ! Un spec­ta­cle dans un parc d’attractions ne peut pas excéder un for­mat de 30 min­utes, parce que la journée des gens est un vrai con­tre-la-mon­tre : au-delà de 30 min­utes, ils regar­dent leur mon­tre et décrochent. On voulait égale­ment que ce soit famil­ial et pas jeune pub­lic, fes­tif et inter­ac­t­if, avec des musiques peps qu’on retient.
Julien : Là où je suis plutôt con­tent du pari pour ce qui est du tim­ing, c’est que les gens nous dis­ent que c’est trop court et qu’on ne voit pas le temps passer.
Ludo : Oui, et nous nous sommes dit aus­si tous les trois que, pour beau­coup de monde, ça serait leur pre­mière expéri­ence de comédie musi­cale de type théâtre musi­cal anglo-sax­on, qu’on aime tous et qu’ils n’iraient pas for­cé­ment voir à l’extérieur…
Hervé : … ou qu’ils n’auraient pas for­cé­ment les moyens d’aller voir. J’aime bien cette idée d’ouverture à la cul­ture : des jeunes se rap­pelleront peut-être, quand ils seront plus grands, que leur pre­mière comédie musi­cale, ils l’ont vue ici et qu’elle leur a mis des pail­lettes dans les yeux.
Julien : Dans le cahi­er des charges, il y avait quand même l’humour aus­si, qui est assez présent dans l’univers d’Astérix, l’irrévérence, l’impertinence…
Hervé : … c’est ce qu’i­ci nous appelons l’ADN gaulois ! Et Ludo l’a bien com­pris, il a retran­scrit l’univers de la BD, la sig­na­ture d’Uderzo et Goscinny.
Julien : L’humour, ça prend du temps dans une his­toire qu’il faut dérouler, surtout que nous voulions de grands ensem­bles aus­si, donc ça fai­sait beau­coup de choses à met­tre en vingt-cinq minutes.

Dans votre his­toire, pourquoi ne pas avoir représen­té Astérix et Obélix ?
Hervé : Ici au parc, les per­son­nages d’Astérix et Obélix sont oblig­a­toire­ment masqués et ne par­lent pas ; ça fait par­tie des con­traintes. Avoir des gens sur scène qui chantent et dansent tout en étant masqués, ça ne fonc­tionne pas. Et cela aurait un impact sur le mod­èle économique d’avoir des gens qui ne par­lent ni ne chantent et qui ne feraient qu’être là. Visuelle­ment aus­si, on aurait eu des gens avec de très gros vis­ages au milieu de l’ensem­ble… Nous avons donc pris le par­ti de faire une his­toire orig­i­nale, tout en évo­quant Astérix, Obélix et Panoramix, par­tis vivre une autre aven­ture. Nous avons fait valid­er auprès de la direc­tion et des édi­tions. Je pense que c’é­tait le bon pari.
Julien : Par ailleurs, s’ils avaient été non masqués – parce que je pense qu’on aurait pu le négoci­er –, les con­traintes physiques auraient été énormes. Nous avons déjà des con­traintes de taille avec Assur­ance­tourix et Ordral­fabétix qui sont présents sur scène.
Ludo : Pour ces deux per­son­nages, on imag­ine bien leurs voix : Assur­ance­tourix, c’est le barde qui chante faux ; et Ordral­fabétix, c’est le vendeur de pois­sons frais ou pas frais, donc on pense naturelle­ment à une gouaille de pois­son­nier. Imag­in­er ce que ce serait les voix d’un Astérix et d’un Obélix, trou­ver une vocal­ité qui tient la route, ça demande beau­coup plus de réflexion.
Julien : Surtout en chan­son, et puis il faudrait aus­si éla­bor­er un con­cept pour ces deux héros qui ne chantent jamais, c’est plus compliqué.
Ludo : Il faudrait, par con­séquent, un for­mat plus long.
Julien : Nous sommes par­tis sur une comédie musi­cale ; il fal­lait donc trou­ver les raisons amenant à « pourquoi les per­son­nages chantent ? ». Et pour que l’his­toire chante rapi­de­ment dès le début, nous avons imag­iné que notre héros veut devenir barde. S’il veut devenir chanteur, c’est assez logique qu’il chante. Cela aurait été plus dif­fi­cile avec Astérix et Obélix.
Hervé : D’ailleurs, je ne sais même pas si nous auri­ons le droit d’u­tilis­er autre chose que les voix offi­cielles enreg­istrées. Quand je vois toutes les ques­tions que cela soulève, je me dis que nous avons bien fait. (Rires.)
Ludo : Je pense que les gens pour­raient admet­tre qu’Astérix et Obélix se met­tent à chanter dans une comédie musi­cale, mais sur un for­mat plus long, de 90 ou 120 min­utes. Alors que là, tu mets un nou­veau héros dans l’u­nivers fam­i­li­er du vil­lage, un héros barde et on utilise comme trig­ger scé­nar­is­tique une potion mal fab­riquée qui va faire que tout le monde va se met­tre à chanter, à danser et à devenir des créa­teurs de comédie musi­cale. Très vite, tu trou­ves un code où la comédie musi­cale entre dans l’ADN d’Astérix. Mais ils pour­raient être amenés à devenir des héros de comédie musi­cale un jour dans un for­mat plus long, on ne sait jamais. C’est un mélange de con­traintes et de choix.
Julien : L’a­van­tage, c’est qu’en inven­tant des per­son­nages, on peut leur don­ner des car­ac­téris­tiques de per­son­nages de comédie musi­cale – c’est aus­si ça le fond du truc. En créant, on peut déjà leur don­ner tous les atouts de per­son­nages du genre, comme les deux pro­tag­o­nistes, Séro­to­nine et Groupidu­pi­anix, qui sont très pas­sion­nels. C’est d’ailleurs ce qui les amène à chanter, ce sont les deux seuls qui chantent sans potion. Scé­nar­is­tique­ment ça nous aide, parce que comme on dit sou­vent : les per­son­nages de comédie musi­cale ont telle­ment d’é­mo­tions que c’est pour cela qu’ils se met­tent à chanter. C’est logique avec ces deux-là quand on les présente. C’est aus­si cet aspect qui nous a guidés.

Com­bi­en y a‑t-il de casts ?
Ludo : Qua­tre casts de onze per­son­nes mais quar­ante-trois per­son­nes au total puisqu’une per­son­ne tient deux rôles.
Hervé : Onze artistes sur scène mais vingt et une per­son­nes au total pour faire tourn­er le show…
Ludo : … avec dix per­son­nes dans les équipes : tech­nique, habil­lage, cos­tumes, maquil­lage, etc.

Ça fait beau­coup de per­son­nes à former !
Julien : Oui, for­mer qua­tre casts, c’est lourd : quand il y a une info à faire pass­er, même si on est une petite équipe, pour la com­mu­ni­ca­tion, c’est compliqué.
Ludo : Sur un an de créa­tion, tu sais que tu ajustes au fur et à mesure des répéti­tions. Donc tu peux avoir une trou­vaille avec le cast n°3, que tu dois alors faire remon­ter aux casts n°1 et n°2, qui n’ont pas eu l’in­fo au départ… donc tu as un effet de cas­cade qui fait que le mon­tage est passionnant.
Julien : Mais c’est super, c’est exci­tant ! Il faut savoir qu’on a huit Groupidu­pi­anix et huit Séro­to­nine qui se parta­gent la journée. Donc, quand ils ne font pas ces rôles, ils jouent Assur­ance­tourix ou les san­gliers ; quant à Séro­to­nine, elle alterne avec une vil­la­geoise gauloise dans la troupe. C’est pour qu’ils puis­sent se repos­er, parce que le spec­ta­cle est quand même exigeant vocale­ment, et physique­ment aus­si d’ailleurs, et ces deux-là chantent beau­coup – on peut mon­ter jusqu’à cinq shows par jour.
Hervé : Un for­mat de qua­tre casts, c’est notre mod­èle d’ex­ploita­tion habituel : on a trois ou qua­tre équipes par spec­ta­cle. Ça per­met aux inter­mit­tents de pou­voir s’or­gan­is­er pour d’autres pro­jets à côté, parce que nous aimons bien qu’ils se nour­ris­sent d’autres choses, et surtout si une pri­vati­sa­tion vient se rajouter, il nous faut un cast disponible le soir sans pénalis­er le reste de l’ex­ploita­tion, donc nous ne pou­vons pas nous per­me­t­tre d’avoir seule­ment deux ou trois casts.
Julien : Cela nous per­met aus­si, s’il y a besoin, d’or­gan­is­er des remplacements.
Hervé : Effec­tive­ment, s’il manque un per­son­nage, le show ne peut pas avoir lieu, et c’est une sit­u­a­tion impos­si­ble pour nous.
Julien : C’est ce que nous pré­con­i­sions aus­si et, même avec qua­tre casts, il peut arriv­er qu’il y ait un prob­lème, comme par exem­ple ce week-end avec l’un des rôles, Purée­mous­se­line, et c’est l’as­sis­tante choré­graphe qui l’a repris.

Et ça s’est bien passé ?
Julien : Ça s’est très bien passé.
Hervé : Et nous n’avons pas annulé.
Julien : Elle a vrai­ment assuré. C’est quand même assez lourd quand tu n’as jamais joué le spec­ta­cle. Bien sûr, elle con­nais­sait les choré­gra­phies, mais ce n’est pas évi­dent. Et quand tu as un pépin comme ça, tu es tou­jours obligé de gér­er dans l’ur­gence… et à une heure du matin ! (Rires.)
Ludo : Ça reste du spec­ta­cle vivant.

Vous évo­quiez les répéti­tions et les trou­vailles avec les dif­férents casts. Quelles lib­ertés ont les comédien·ne ·s ? 
Julien : Alors c’est très cadré ! C’est un show qui sup­porte pas l’à-peu-près : tout est calé sur la musique ; la lumière est placée très pré­cisé­ment ; dans les choré­gra­phies et la mise en scène, ils sont sur un cadre, ils savent exacte­ment où ils doivent être et à quel numéro. Ils ont aus­si un par­cours émo­tion­nel qui est le même pour chaque per­son­nage ; je sché­ma­tise mais, par exem­ple, à tel endroit, le per­son­nage a peur, à tel autre, c’est autre chose… après, cha­cun amène sa pro­pre façon d’avoir peur…
Ludo : C’est ce que j’al­lais dire, c’est cadré sans être cadré.
Julien : Cha­cun amène sa per­son­nal­ité et heureuse­ment, c’est ça qui est intéres­sant, mais nous sommes oblig­és d’avoir ce cadre parce que c’est un spec­ta­cle qui se joue cinq fois par jour, et quand par­fois ils déca­lent les under­scores, ça met en péril les répliques d’après et les blagues ne fonc­tion­nent plus : c’est un peu de l’or­fèvrerie. Donc oui, tout le monde a un cadre pré­cis et y met du sien, ne serait-ce que par le physique. Je pense aux Séro­to­nine : elles ont cha­cune un physique très dif­férent et elles vont apporter quelque chose de très dif­férent dans leur per­son­nage et c’est intéres­sant aus­si, y com­pris dans les duos, où l’én­ergie n’est jamais la même. Si vous allez voir le spec­ta­cle plusieurs fois, vous ne ver­rez pas le même spec­ta­cle… Mais vous ver­rez quand même le même spec­ta­cle (rires) et ça, c’est impor­tant aussi.
Ludo : Le cadre est impor­tant sur trois points : le tim­ing, les place­ments et le tra­jet émo­tion­nel. La musique et la lumière sont encodées, donc tu dois les respecter, tu dois être hyper car­ré sur tes place­ments. Pour les tra­jets émo­tion­nels, les casts ont répété en équipe mais main­tenant qu’ils alter­nent et s’ils n’ont pas les mêmes infos, c’est hyper dur de se met­tre à jouer ensem­ble, donc il faut que ce soit clair. Une fois que ces tra­jets émo­tion­nels sont clairs, cha­cun va les vivre dif­férem­ment selon sa pro­pre énergie et son tra­vail de comédien-chanteur.

Et quand vous trou­viez quelque chose de par­ti­c­ulière­ment intéres­sant en répéti­tion, est-ce que vous l’adap­tiez à tous ?
Ludo : C’est une très bonne ques­tion parce que, dans cer­tains cas, nous l’adap­tions à tous et dans d’autres, nous nous disions « ça, ça marche bien avec ton énergie à toi, donc tu le gardes » et quand ça ne marche pas pour d’autres, ils ne le font pas.
Julien : En fait, on l’es­saie et on voit si c’est quelque chose qui va bien marcher avec tout le monde ou si c’est pro­pre à l’én­ergie de la personne.
Ludo : Et c’est là que tu vois que c’est cadré et à la fois flex­i­ble, parce que cette marge de lib­erté existe et donc on peut con­stru­ire avec les comé­di­ens en fonc­tion de ce qu’ils proposent.

Vous avez répété com­bi­en de temps ?
Hervé : On a com­mencé avec un work­shop fin août 2023.
Julien : Pen­dant dix jours.
Hervé : Avec un des qua­tre casts qui a per­mis à Julien de con­stru­ire le squelette.
Julien : Oui, ce que j’ap­pelle le « mon­stre ». En gros, c’é­tait sans cos­tume, sans décor, avec très peu d’ac­ces­soires et on a mon­té tout le show.
Ludo : Toute la mise en scène, toutes les chorés, toutes les entrées-sor­ties, etc.
Julien : On a fait tout le squelette en dix jours de montage.
Ludo : Et c’est une étape très impor­tante parce qu’elle per­met de valid­er les temps de jeu de manière naturelle. Comme après nous sommes par­tis en enreg­istrement avec l’orchestre, il fal­lait être cer­tain de tous les tim­ings par rap­port à l’under­score et de tous les temps de jeu pour qu’ils soient naturels. Toute la com­plex­ité d’un show 100 % enreg­istré, c’est d’être sûr que les temps d’en­reg­istrement cor­re­spon­dent à la vérac­ité des temps de jeu. Et même si tout cela était plutôt bien intu­ité, il y a eu deux ou trois ajuste­ments nécessaires.
Hervé : Cela a aus­si une autre fonc­tion : pour moi, cela me per­met de ras­sur­er le financeur. Il y a une présen­ta­tion qui est faite au comité de direc­tion : c’est une étape de val­i­da­tion néces­saire parce que c’est un pari de faire une comédie musi­cale pour le parc, on ne sait pas à ce moment-là si la salle va se rem­plir, si le spec­ta­cle aura une bonne note, si le reg­istre musi­cal va fonc­tion­ner. Donc, pen­dant la présen­ta­tion, ils voient que ça fonc­tionne, ils passent un bon moment, ils sont même émus, c’est chou­ette. Et pour les qua­tre casts à for­mer, on a com­mencé début févri­er, jusqu’à fin mars, et ils ont eu en moyenne tous entre quinze et dix-sept jours.

Et d’un point de vue technique?
Ludo : Avant le work­shop, tu as trois semaines de technique.
Julien : Trois semaines de fia­bil­i­sa­tion tech­nique, pour l’en­chaîne­ment des décors et les timings.
Ludo : C’est ce qu’on appelle le dry tech : tu fais des filages unique­ment de tech­nique, de mou­ve­ment de décors et tout ça avec les lumières, sans comédien.
Julien : On n’avait même pas toutes les lumières encore. On a fait en plusieurs étapes, d’abord le dry tech avec la motori­sa­tion des décors et de la vitesse. Comme le show va très vite, il faut que tous les décors ail­lent vite, on n’a pas le temps de s’appe­san­tir sur les enchaînements.
Ludo : Tu pro­grammes tous les décors, tu véri­fies que c’est flu­ide, que tout se passe bien.
Julien : Bien sûr, ce sont des moments de stress. La plate­forme ne tourne pas assez vite, donc on se dit : « Non ! il faut que ça tourne plus vite, sinon le show est ter­miné avant qu’elle finisse son tour. » (Rires.) Donc on com­mence à tra­vailler là-dessus et même après, la tech­nique con­tin­ue à tra­vailler pour pou­voir amélior­er tout ça.
Ludo : Pareil pour les lumières, tu avais une semaine de pré-encodage et bien enten­du après, quand les artistes arrivent au plateau, après les deux semaines de répéti­tions, on utilise aus­si ces moments-là pour recor­riger et repré­cis­er sur scène. Mais il y a tout ce boulot en amont de pré-créa­tion pour ne pas per­dre un temps colos­sal ensuite, pour éviter que ça ne se fasse qu’au plateau.
Julien : C’est la chance d’être dans un parc d’at­trac­tions, parce qu’on a le théâtre à disposition.
Hervé : Et des salles de répétition.
Julien : Cela nous a per­mis au bout d’une semaine, avec chaque cast, de pou­voir par­tir en filage directe­ment en scène avec les décors qui bougeaient, ce qui est assez rare.
Ludo : La pre­mière semaine de répéti­tions était très intense puisque l’ob­jec­tif, c’é­tait qu’ils aient vu tout le show grosso modo en une semaine. Pour pou­voir aller très vite sur scène et après, de roder, de retra­vailler, de repré­cis­er et d’in­gur­giter énor­mé­ment d’éléments.
Hervé : Il y a des moments qui sont très émou­vants, notam­ment quand les artistes décou­vrent pour la pre­mière fois la rota­tion de tous les décors, ils sont comme des gamins au spec­ta­cle, ils cri­ent, ils sont heureux et ils applaudissent.
Ludo : Il y avait les quar­ante-qua­tre en salle et on a fait le filage tech­nique devant eux, ils applaud­is­saient le tra­vail des techniciens.
Hervé : Et ils n’ont pas sou­vent cette occa­sion, donc ça a con­tribué à créer toute la dynamique de groupe.
Julien : Nous avons une très bonne équipe sur le plateau mais aus­si une très bonne équipe tech­nique du parc, que ce soit au niveau de la tech­nique plateau, du son ou des top­pers, du make-up…
Hervé : Tout le monde a tra­vail­lé dans le même sens.
Julien : Et tout le monde était excité par le pro­jet, était con­tent d’y être aus­si je pense, et ça s’est senti.
Ludo : Pareil au niveau de la créa­tion des cos­tumes : nous avons col­laboré avec Isabelle Led­it, qui tra­vaille beau­coup au parc, et la recherche avec toutes les équipes là-bas, c’é­tait super, un vrai bon­heur de A à Z.
Julien : Et nous ne l’avons pas men­tion­né, mais le dernier avan­tage du work­shop, ça a aus­si été d’en­reg­istr­er l’al­bum en amont, comme tout était fait déjà musicalement.
Ludo : Il a pu sor­tir en même temps que le spec­ta­cle et ça, c’est super pour pro­longer l’ex­péri­ence des spec­ta­teurs quand ils sor­tent de la salle : tout de suite, ils peu­vent écouter les musiques sur les plateformes.
Hervé : Ludo par­lait d’Is­abelle… La par­tic­u­lar­ité est que nous voulions que toute la prod’ soit au max­i­mum made in Parc Astérix. La prod’ est assurée en interne par moi-même, mais aus­si par la créa­trice cos­tumes, les choré­gra­phies ; nous avons l’ingénierie-son en grande par­tie, les acces­soires sont fait en interne, tout le staff tech­nique d’habillage, de per­ruque, etc. Nous avions beau­coup de choses chez Parc Astérix et nous avons essayé de pren­dre tous nos four­nisseurs dans un ray­on de deux heures autour du parc ; c’é­tait impor­tant pour nous, que ce soit très local.

La créa­tion des cos­tumes juste­ment, vous pou­vez nous en parler ?
Julien : La demande, c’é­tait, un peu comme le show, d’ar­riv­er à avoir quelque chose d’assez mod­erne tout en respec­tant la BD ; ça a été tout un com­pro­mis et plus le pro­jet avançait, plus on arrivait à aller vers quelque chose de mod­erne, et il y a eu de belles évo­lu­tions, c’est cool. Par exem­ple, pour Séro­to­nine, au début, on était sur quelque chose de plus clas­sique et, petit à petit, nous avons pu arriv­er vers ce per­son­nage un peu plus pétil­lant avec cette robe-pan­talon à volants, qui cor­re­spond bien au personnage.
Ludo : La com­bi­nai­son leg­ging-jupe à volants marche vrai­ment bien.
Hervé : Et c’é­tait une demande de Del­phine Pons d’ailleurs.
Julien : Après, pour Goupidu­pi­anix,  nous voulions que ce soit un peu un Tim­o­th­ée Chalamet.
Ludo : C’est claire­ment la référence.
Julien : Mais avec ce côté éleveur de mou­tons, puisqu’il est fils d’une éleveuse de moutons.
Ludo : Donc il a un cara­co avec de la four­rure de mou­ton, qu’on retrou­ve aus­si dans les bottes.
Julien : Et en même temps, il a un côté un peu plus sophis­tiqué que les autres, avec du bleu turquoise et ce pan­talon très affûté et proche du corps. L’idée était quand même d’avoir des cos­tumes très cin­trés, très graphiques…
Ludo : … et qui met­tent bien en valeur les dif­férents physiques des per­son­nages, leur cor­po­ral­ité, et que ça résonne bien dans les choré­gra­phies, qu’ils puis­sent danser avec. C’é­tait notam­ment toute la ques­tion pour les armures romaines de trou­ver com­ment les enfil­er et les enlever de manière très rapi­de, parce qu’il y a des change­ments de cos­tumes très rapi­des, en gar­dant cette mobil­ité et cette flu­id­ité notam­ment dans le numéro « J’veux du tonus » où tu as une choré­gra­phie en armure. Nous avons eu cette réflex­ion de met­tre des armures en cuir plutôt qu’un truc rigide et ça n’aurait pas eu ce ren­du, et ça n’au­rait pas été aus­si agréable pour les artistes avec une autre matière. Pour les frères et sœurs Char­cu­ter­ix et Puré­mous­se­line, l’in­spi­ra­tion c’é­tait deux rug­by­men, donc tu as des références avec des ban­deaux, des chaus­settes qui mon­tent et des tuniques un peu cha­sub­les. On reste dans le côté gaulois tout en le mod­ernisant et en le pim­pant par quelques touch­es actuelles.
Julien : Pour Fleurymérogix, il a cette inspi­ra­tion viking, qui fait peur, avec une grande cha­suble en cuir très pronon­cé. Tout cela a été créé en col­lab­o­ra­tion avec Isabelle qui a été top.
Ludo : Franche­ment, l’aller-retour à été super.
Hervé : Pour nous, ça a été plus facile de tranch­er et de dire ce qui marche ou pas jusqu’au dernier moment.
Ludo : Toute la créa­tion avec l’équipe cos­tumes à été « remarquablissime ».

Vous par­lez sou­vent de la phys­i­cal­ité des per­son­nages, est-ce que pour vous ça a été un critère de sélection ?
Ludo : Tu veux que je te dise ? On en par­le pas mal là mais, pour le coup, on ne regarde pas spé­ciale­ment le physique. Tu peux même voir qu’il y a des physiques très dif­férents sur les Séro­to­nine, notam­ment en ter­mes de taille ou de morphologie.
Julien : C’est plus une ques­tion d’én­ergie, de caractère.
Ludo : En revanche, pour la créa­tion des cos­tumes, la ques­tion était : « Com­ment le même patron d’un cos­tume peut raison­ner avec ces physiques dif­férents qu’on a trou­vés et faire que ça marche bien pour tous ? » Mine de rien, quand tu prends en compte toutes ces con­traintes, c’est hyper intéres­sant parce que c’est impor­tant que le cos­tume résonne bien sur tous les types de physique. Et c’est vrai que nous aimons bien dans une troupe avoir des phys­i­cal­ités dif­férentes, parce que c’est la façon de faire à l’an­g­lo-sax­onne que j’aime. J’adore quand tu as plein de physiques dif­férents sur lesquels ça résonne dif­férem­ment, sur des choré­gra­phies, tout ça, je trou­ve ça hyper beau. Finale­ment, la seule con­trainte sur le physique est pour Groupidu­pi­anix et Turlu­tu­tus parce qu’ils font aus­si Assur­ance­tourix et Ordral­fabétix et là, pour le coup, nous sommes oblig­és d’avoir une logique par rap­port à la BD.
Julien : Et Hervé, à ce moment-là, il se dit : « Oh ! il va fal­loir faire plein de cos­tumes ! » (Rires.)
Hervé : C’est vrai que moi, j’ai un rôle assez par­ti­c­uli­er, parce que j’ai à la fois la direc­tion de pro­duc­tion, où je vois l’ar­gent défil­er, mais aus­si la direc­tion artis­tique, donc j’ai envie qu’avec Julien, nous puis­sions faire le max­i­mum de choses pour sat­is­faire les besoins. Mais de temps en temps… je dis non… Ça arrive. (Rires.)
Ludo : Glob­ale­ment, il ne dit pas sou­vent non, parce qu’ils sont assez d’accord.
Julien : Il a dit non aux étoiles dans les arbres !
Hervé : Oui, voilà ! Il voulait un ciel étoilé dans les arbres, ça va coûter 15 000 euros, je lui ai dit non. (Rires.)

Par­lons de Groupidu­pi­anix. Il y a une vraie dif­fi­culté sur ce rôle pour trou­ver le bon équili­bre entre le fait de ne pas paraître trop antipathique et de devenir attachant à la fin. Com­ment tra­vaille-t-on sur un par­cours émo­tion­nel si large en trente min­utes ? Cela a dû être un challenge.
Ludo : C’est génial qu’on par­le de ça. On doit se dire au départ « quelle tête à claque ! » et, en même temps, on a envie qu’il réalise son rêve parce qu’on le com­prend et qu’il apprenne la leçon. Il doit avoir ce dou­ble par­cours émo­tion­nel, de réalis­er son but et de se dire « ah oui là j’ai été un peu con ».
Julien : Je pense qu’il ne faut pas être tiède pour que ça fonc­tionne. Il est désagréable dans le sens où c’est un per­son­nage d’at­ti­tude, c’est quelqu’un qui est sur des pos­tures et ça doit en être drôle et tru­cu­lent, la façon dont il le fait.
Ludo : C’est ça : c’est de la pos­ture plus que de la suffisance.
Julien : C’est dif­fi­cile parce que, si c’est trop désagréable direct, là on se dit « atten­tion parce qu’on va te détester ». C’est un bon dosage du côté désagréable à trou­ver mais il faut tou­jours que ce soit un peu drôle ; quand il rem­barre Séro­to­nine, il faut que ce soit drôle. Si c’est trop dur, ça ne fait pas rire et on se dit qu’il est méchant, pau­vre Séro­to­nine. Donc il y a cette dif­fi­culté pour l’in­ter­prète de pas l’être trop…
Ludo : … ou de l’être assez, parce que il y a des gens pour qui c’est l’in­verse. Le per­son­nage doit quand même avoir quelque chose à apprendre.
Julien : Oui, parce que si tu ne l’es pas assez, en revanche alors oui, on va te trou­ver sym­pa­thique mais un peu tiède. Après, nous avons pris des gens qui sont quand même gentils.
Ludo : Oui, ce sont des gens solaires.
Julien : Non mais c’est impor­tant, parce qu’on par­lait des car­ac­tères pen­dant les cast­ings. Comme ils sont gen­tils, ils vont jouer quelqu’un de désagréable et on ne va jamais se dire qu’ils sont méchants, on va se dire que c’est dans la pos­ture que le per­son­nage a besoin d’être dif­férent et a besoin d’exister.
Ludo : Je pense que le pre­mier critère quand on voit des gens pour ce per­son­nage, c’est que ce soient des gens solaires parce que, juste­ment, on sait très bien qu’on va les emmen­er dans cette direc­tion, d’avoir des pos­tures qui les ren­dent un peu désagréables, donc, si ce ne sont pas des gens qui sont solaires naturelle­ment, ça va être plus dur de garder cette empathie avec le personnage.
Julien : Oui, et surtout le per­son­nage doit être solaire parce que c’est un rêveur et c’est ça qui doit nous touch­er, il n’a pas peur de ses rêves. Au final, ce qu’il faut retenir, c’est que même s’il paraît un peu désagréable par rap­port aux autres, c’est quelqu’un qui n’a pas peur de vouloir devenir qui il veut être en fait.

En com­mençant à tra­vailler avec les comédien·ne·s, est-ce que vous avez beau­coup réa­justé, par rap­port aux per­son­nages ou même dans l’axe narratif ?
Ludo : Non, pour le coup en écri­t­ure, ça n’a pas bougé.
Julien : De l’or­dre du mot peut-être : « for­cé­ment » est devenu « évidem­ment » par exem­ple, parce que c’est mieux rythmé.
Hervé : Nous avions validé avec les Édi­tions Albert René au mot près donc, par exem­ple, j’ai le droit de dire « allié » mais je n’ai pas le droit de dire « acolyte ». Au mot près, je ne peux pas met­tre n’im­porte quoi donc, pour moi, c’é­tait calé et ça ne bougeait pas.
Julien : Après, on ne l’a pas dit mais, le show, nous l’avons joué plein de fois avant que les inter­prètes arrivent, en salle de réunion.
Hervé : Ils fai­saient les onze rôles, c’é­tait très drôle !
Julien : Nous l’avons fait devant toute la direc­tion du Parc Astérix, plusieurs fois d’ailleurs, et devine qui fai­sait Séro­to­nine et qui fai­sait Groupidu­pi­anix ? (Rires.)
Hervé : Et qui fil­mait pour garder des dossiers ? (Rires.)
Ludo : Finale­ment, ça a été beau­coup de tra­vail de direc­tion d’ac­teur avec les comé­di­ens et de créer cette énergie de troupe. Franche­ment, c’est une des choses qui ressort beau­coup du show, en tout cas dans ce que j’ai pu voir des retours des spec­ta­teurs ou des papiers des gens sont venus : ce côté alchimie et bonne entente de la troupe et moi, ça me fait très plaisir que les gens voient ça.
Julien : C’est très impor­tant pour nous parce que si les gens s’ai­ment bien, ils s’a­musent, ils jouent au sens pre­mier du terme et ça, ça se voit au plateau.
Hervé : Surtout sur un for­mat long, on est vache­ment atten­tif au savoir être.

La sai­son dure com­bi­en de temps ?
Ludo : La pre­mière était le 30 mars.
Julien : Et la dernière sera le 6 janvier.
Ludo : C’est tous les jours non stop jusqu’à début sep­tem­bre. À par­tir de sep­tem­bre, c’est les mer­cre­dis, samedis et dimanch­es et après, pour Hal­loween et la fin d’an­née, ce ne sera que pen­dant les vacances scolaires.

Est-ce que vous êtes con­tents de ces pre­miers mois d’exploitation ?
Hervé : Je vais répon­dre en prenant des indi­ca­teurs factuels avant de don­ner mon ressen­ti. Le show est noté autour de 8,8 sur 10. Pour un parc d’at­trac­tions, un spec­ta­cle au-dessous de 8/10, il est à refaire ; entre 8 et 8,3, il a fait le job mais il est en fin de car­rière ; entre 8,3 et 8,6 c’est un bon spec­ta­cle ; au-delà de 8,6, c’est un très bon spec­ta­cle ; et au-delà de 9, c’est un spec­ta­cle star. Donc il n’est pas loin de nos spec­ta­cles stars. Une fois qu’au­ront été dépassées les quelques dif­fi­cultés tech­niques que nous avons ren­con­trées au début, il va con­tin­uer à mon­ter et se rap­procher de 9, qui était sa note la pre­mière semaine.
Julien : Nous avons per­du quelques dix­ièmes par la suite, c’est nor­mal, parce que c’est un show très tech­nique et nous avons eu quelques petites choses à revoir, il y a eu plusieurs show stops au début lors des pre­mières semaines, mais nous com­mençons à être bien rodés maintenant.
Hervé : Donc, factuelle­ment, les vis­i­teurs notent bien le spec­ta­cle, la direc­tion du Parc Astérix ain­si que la direc­tion de la Com­pag­nie des Alpes esti­ment que c’est un pari réus­si, que c’est fidèle aux attentes et, par con­séquent, ils sont très con­tents du show. Pour moi, le client est con­tent, le vis­i­teur est con­tent, donc j’es­time que c’est une réus­site. À titre per­son­nel, c’est une ques­tion dif­férente. C’est une aven­ture humaine déjà, on s’en­tend bien, c’est une très jolie ren­con­tre, et ensuite, pour moi, cela a don­né la capac­ité au Parc Astérix d’ar­riv­er à un niveau de pro­duc­tion de spec­ta­cle qui est la plus belle que j’y ai vu depuis six ans que je suis là. C’est le résul­tat de trois ans de tra­vail et moi oui, j’en suis très fier.
Ludo : Oui, c’est une fierté absolue. Pour moi, c’est exacte­ment le show tel qu’on l’avait rêvé il y a trois ans sur un bout de table et c’est rare, donc c’est génial. Je me sou­viens des pre­miers dessins de Julien au sty­lo, et le show, il est là, tel qu’on l’avait imag­iné, c’est super et je suis très fier et très heureux du cast et de toutes les équipes avec lesquelles on a bossé pour cette créa­tion, c’est ça qui est mer­veilleux quand tu es créa­teur. Julien me fai­sait la réflex­ion l’autre jour, je n’é­tais pas loin de vers­er ma petite larme. Quand tu vois cette phase d’ap­pel d’of­fres, que tu rêves de faire ce truc, parce que c’est un univers qui est hyper exci­tant, et que tu te dis que tu vas dévelop­per une comédie musi­cale dans l’u­nivers d’Astérix, tu es là, dans ton coin, et tu te dis « com­ment j’ap­pelle les héros ? » et tu as ce nom de Groupidu­pi­anix qui débar­que, tu te dis ça peut être drôle. Est-ce que ça va faire rire ou pas ? Et trois ans après, tu le vois dans le final descen­dre avec ces lumières, c’est fou. Tout ça, c’est ce qu’on a inven­té sur un petit coin de table. C’est très touchant.

Ce sera le mot de la fin. Mer­ci beau­coup à tous les trois.

La troupe de C’est du délire ! était l’in­vitée de la 42e Rue de Lau­rent Val­ière. À réé­couter ici.

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