Flamme incendiant les corps et les cœurs, Don Giovanni consume les femmes dans une course avide qui le rend vivant. Dans ces conquêtes sans fin, n’est-ce pas, plus que la jouissance, la recherche effrénée de défis qui le survolte ? Pour sa mise en scène de cet opéra incontournable de Mozart, le metteur en scène Jean-Yves Ruf invite les musiciens du Concert de la Loge sur le plateau, dans une scénographie unique favorisant toutes les porosités entre instrumentistes et solistes : une version de Don Giovanni moirée et complexe où le personnage oscille entre ses pentes intérieures.
Notre avis : Dès le début de la représentation, nous savons que nous allons passer un très agréable moment.
La scénographie simple et efficace de Laure Pichat place les musiciens sur scène. Mais nous n’assistons pas pour autant à un concert car un escalier mène à une passerelle au-dessus de l’orchestre. C’est sur cette scène surélevée que commencera le drame avec la mort du Commandeur, tué par Don Giovanni. Sans fosse qui coupe la scène à la salle, nous jouissons d’une proximité avec les interprètes qui nous plonge littéralement dans l’opéra.
Julien Chauvin, qui dirige Le Concert de la Loge tout en jouant du violon, insuffle à l’orchestre une énergie communicative. Tout au long de la représentation, le lien se fera entre la scène basse, où les instrumentistes incarnent parfois les invités de la fête et où les protagonistes peuvent se cacher parmi les musiciens, et la passerelle, où se jouent certaines scènes plus intimistes. Ce dispositif allie avec bonheur théâtre et musique, et Jean-Yves Ruf l’utilise formidablement. Il a aussi la grande chance de diriger une distribution épatante. Toutes et tous, issus de la jeune génération de la scène lyrique française, sont aussi formidables vocalement que dans leur jeu.
Dans le rôle-titre, le baryton Timothée Valon sait jouer de sa voix puissante et séduire avec des modulations magnifiques. Il embarque le public dans sa descente aux enfers. Tout le reste de la distribution est au diapason, et la salle de l’Athénée s’offre comme l’écrin idéal pour cette production de Don Giovanni.
Les représentations parisiennes sonnent le début d’une tournée organisée par l’ARCAL, compagnie nationale de théâtre lyrique qui diffuse ses spectacles dans toutes la France. Depuis quarante ans, elle travaille auprès des publics éloignés des scènes lyriques en menant différentes actions territoriales dans les zones rurales et urbaines en Île-de-France.