Eric Perez, vous partagez une longue histoire avec le Festival de Saint-Céré. Pouvez-vous nous raconter comment ça a commencé ?
Ça a commencé il y a trente ans : j’avais été engagé comme choriste sur La Belle Hélène. Avant ça, je venais du Conservatoire, je ne me sentais pas bien dans ce côté un peu guindé qui ne correspondait pas à mon tempérament, je faisais de la musique contemporaine, des choses un peu intellos… Quand je suis arrivé et que j’ai vu la façon dont on montait les opérettes, j’ai adoré, j’ai tout de suite adhéré à l’esprit de troupe, à cette façon différente d’aborder l’art lyrique. Pour moi, l’opérette, c’était poussiéreux, ringard, mais ici, ils traitaient de façon iconoclaste, loufoque, absurde, mais visuellement beau. C’était kitsch avec un humour à la Almodovar ou John Waters.
J’ai toujours été très cinéphile et en arrivant ici, j’ai vu qu’Olivier Debordes [NDLR : directeur artistique du festival et metteur en scène]avait les mêmes goûts. Ca nous a beaucoup rapprochés.
Un jour, Olivier m’a proposé d’être son assistant à la mise en scène pour sa Carmen arabo-andalouse. Je lui ai dit que ça ne m’intéressait pas mais il a fini par me convaincre. Et le premier jour de répétitions, j’ai eu comme une révélation, et c’est allé très vite. Six mois après, j’étais son assistant sur Don Giovanni et l’année d’après, j’ai mis en scène Le Tour d’écrou. Toute ma vie artistique, professionnelle, personnelle est liée à cette compagnie.
L’esprit du festival a‑t-il évolué ?
Les grandes lignes sont les mêmes mais ça a évolué dans le répertoire. Avec Olivier, on a cherché a travailler sur d’autres répertoires que l’opérette, tout en dénichant également des œuvres comme Le Lac d’argent de Kurt Weill qui n’avait jamais été donnée en France ou une revue berlinoise créée par Margo Lion et Marlene Dietrich. On monte des œuvres grand public comme Don Giovanni, La Traviata ou Les Noces de Figaro mais ce qui me plaît aussi ici, c’est qu’on fait aussi des recherches sur des œuvres inédites. Ce qui est resté, c’est l’esprit d’aventure !
Vous proposez plus de théâtre musical également.
Oui ! Moi, ça m’a permis de réaliser mon rêve d’adolescent. A la première de Cabaret à Montpellier, je me disais que j’étais en train de réaliser mon rêve, ce pour quoi j’ai voulu être comédien chanteur : jouer le Emcee. On a encore envie d’explorer d’autres pistes dans le théâtre musical, même si ce n’est pas toujours facile avec les droits !
Cette année, vous montez Les Noces de Figaro, pourquoi ce choix ?
Ce qui m’a intéressé, c’est le contexte social de l’œuvre. J’ai axé mon propos sur le passage du XVIIIe au XIXe siècle. Les mœurs étaient libres, la pudeur n’était pas très présente, et puis, progressivement, il y a une installation de l’ordre moral, de la pudeur, de l’intimité. Il y un passage du pouvoir de la noblesse à la bourgeoisie : il passe d’une classe à une autre mais laisse toujours de côté certaines personnes.
La distribution est très jeune, c’est aussi ça l’esprit de Saint-Céré, non ?
Sur La Flûte enchantée et Don Giovanni, j’avais déjà choisi de jeunes artistes et j’ai continué ici. On a l’habitude de voir des interprètes un peu mûrs dans les rôles du Comte ou de la Comtesse, mais dans la pièce, en réalité, ils sont supposés avoir 25 ans. Ça m’a plu et amusé de distribuer ces rôles jeunes à de jeunes chanteurs. Ils ont énormément de talent et une énergie considérable. On a ensuite effectué un vrai travail en amont sur le texte de Beaumarchais, sur les personnages et sur le passage du texte parlé au texte chanté. Cette forme, avec le texte de Beaumarchais et l’opéra de Mozart, a été créée par Olivier Desbordes en 1998. Ma mise en scène est différente de celle d’Olivier mais se base sur ce découpage.
Quelles sont vos envies futures ?
On a un large éventail de spectacles entre le Festival de Saint-Céré, le Festival de Figeac et la programmation d’hiver du Théâtre de L’Usine, avec toujours cette envie d’explorer toutes les pistes et de donner sa place à l’acteur et au chanteur. C’est ça aussi le dénominateur commun de nos spectacles et de nos envies.
Retrouvez Les Noces de Figaro, mis en scène par Eric Perez, en tournée :
25 novembre 2017 – Théâtre André Malraux – Rueil Malmaison
3 décembre 2017 – 16h — La Colonne – Miramas
26 janvier 2018 – 20h45 — Théâtre André Malraux – Gagny
28 janvier 2018 — 20h30 — Théâtre Municipal — Muret
3 février 2018 – 20h30 — Les Bords de Scènes – Juvisy
10 février 2018 – 20h — Les Théâtres de Maisons Alfort – Maisons Alfort
15 février 2018 – La Grande Scène – Le Chesnay
13, 14 et 16 décembre 2018 – Opéra — Massy