D’après la serié télévisée de Jean-Michel Ribes. Adaptation de Jean-Marie Gourio & Jean-Michel Ribes ; mise en scène de ce dernier. Musique : Germinal Tenas. Chorégraphie : Stéphane Jarny. Décors : Patrick Dutertre
Avec Salim Bagayoko, Joséphine de Meaux, Salomé Dienis-Meulien,Mikaël Halimi, Magali Lange, Jocelyn Laurent, Philippe Magnan, Karina Marimon, Gwendal Marimoutou, Coline Omasson, Thibaut Orsoni, Simon Parmentier, Christian Pereira, Alexie Ribes, Rodolphe Sand, Emmanuelle Seguin, Anne-Elodie Sorlin, Alexandra Trovato, Eric Verdin, Philippe Vieux, Ben Akl, Armelle Gerbault.
La série culte Palace, adaptée par Jean-Michel Ribes et Jean-Marie Gourio arrive au Théâtre de Paris.
« Ni souvenirs, ni nostalgie, simplement l’envie de laisser s’échapper sur scène la folie, le rire et l’émotion de ce Palace qui ne m’a jamais quitté, tout comme ceux avec qui je l’ai inventé. » (Jean-Michel Ribes)
Une véritable percée de non-sens à l’audace joyeuse !
Notre avis : Lorsque le spectateur pénètre dans le théâtre, un hall de palace avec sa porte à battants, son bureau central et le grand escalier attendent de prendre vie. L’amateur de la série se retrouve en terrain connu. Et pour cause, le même décorateur s’est occupé de la version télévisuelle et théâtrale. Ne manque que le sigle « Palace ». La pièce s’ouvre avec une cliente qui pénètre dans le hall exsangue, comme si le palace devait se réveiller après quelques décennies de sommeil, puis, rapidement, éclate la chanson du générique, familière également. Gwendal Marimoutou, en groom efficace, interprétera d’ailleurs durant toute la représentation les jingles qui introduisaient chacune des séquences du programme télévisé. Car chaque épisode de Palace était scindé en rubriques : le labo, les brèves de comptoir, le professeur Rollin, Lady Palace, Alfred le groom, etc., avec pour point commun une écriture collective ciselée, mettant en avant un humour absurde, très british. En seulement six épisodes, grâce à l’efficacité de l’équipe créatrice, mais aussi aux investissements colossaux du producteur Christian Fechner, avec l’appui de Pierre Lescure de Canal +, la série a atteint un statut envié, celui de « culte » qui ne semble, pour une fois, pas galvaudé. Valérie Lemercier, qui remplaça au pied levé Dominique Lavanant, ou François Morel ont ainsi véritablement été révélés au grand public, le casting étant par ailleurs constitué de talents solides, tels Claude Piéplu, Jacqueline Maillan, Jean Yanne, Philippe Khorsand ou Eva Darlan, pour ne citer qu’eux, rejoints par des invités qui venaient partager cette tranche d’humour iconoclaste et souvent salutaire.
Bien entendu, la transposition scénique ne permet pas tout ce faste : les moyens sont différents. Jean-Michel Ribes et son complice Jean-Marie Gourio ont choisi parmi les nombreux sketches de la série ceux qui composent le spectacle, interprétés par une troupe nouvelle, en prenant soin de conserver divers personnages emblématiques comme Lady Palace (Joséphine de Meaux y apporte son grain de folie) ou le couple Thalie et Gentil John (interprétés avec non moins de fougue par Anne-Elodie Sorlin et Rodolphe Sand) qui, en deux apparitions remarquées, donnent des indications claires et précises pour que chaque pauvre puisse avoir la sensation de vivre dans un palace. Bien entendu, le public guette l’incontournable « Appelez moi le directeur » suivi de l’indispensable « Je l’aurai un jour », repris dans la publicité pour la Maaf, qui assura une vitalité certaine à Palace. Sur scène, ce n’est plus un homme, mais une cliente espagnole (Karina Marimon) qui reprend ce rôle avec drôlerie, même si le mordant semble avoir un peu disparu. Le spectacle est-il constitué uniquement d’anciens sketches ? La réponse est négative. Un travail de réécriture a souvent été effectué pour ces derniers et quelques autres sont inédits. D’ailleurs notons que Jean-Michel Ribes se fait une infidélité : lui qui ne voulait pas que la série fasse référence à des événements précis de l’actualité afin de lui assurer une plus grande longévité, ici il sera question des migrants lors d’une discussion post thalasso, et aussi du droit de la femme. Bien entendu, ça grince puisque le propos se veut irrévérencieux. De migrants il sera de nouveau question dans un sketch un peu long qui montre la prise d’otage des participants à un bal masqué du palace par un trio bien décidé à transformer l’établissement en guinguette moules-frites si des migrants ne sont pas accueillis dans un palace niçois. Afin de se redonner des couleurs et du tonus, les clients du palace s’en réfèrent à Pétain, comme à un modèle… Si parfois le spectacle verse un rien dans la vulgarité, le propos général tonifie l’assistance et le public rit de bon cœur aux facéties de la troupe qui, sur scène, se démène pour faire revivre des sketches souvent très drôles et impertinents. Et n’oublions pas les techniciens qui ne chôment pas en coulisse, au vu des nombreux changements de costumes et de décors, que le metteur en scène a la bonne idée de venir faire saluer (ce qui était d’ailleurs le cas dans la série, l’équipe technique descendant le grand escalier durant le générique de fin). Reste à savoir si cet humour de l’absurde, pour séduisant qu’il soit, convaincra le jeune public. Le défi est là, il fallait le relever.