En route pour la 42e Rue #2

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La première des Musicales de Rémy Batteault le dimanche 26 mars à 15 heures au Publicis Cinémas donne l'occasion de se pencher sur 42nd Street, film de référence à bien des égards qui fête ses 90 ans cette année. Voir l'épisode précédent.

Con­traire­ment à d’autres films de diver­tisse­ment qui cherchent à emmen­er le pub­lic loin, loin, loin de ses préoc­cu­pa­tions, 42nd Street, sor­ti en 1933, intè­gre pleine­ment le con­texte socio-économique de l’époque. On est en pleine Dépres­sion et le scé­nario, inspiré du roman éponyme de Brad­ford Ropes paru l’an­née précé­dente, met en scène un directeur de théâtre célèbre mais ruiné par le krach de 1929, et des artistes de scène eux-mêmes en sit­u­a­tion pré­caire, qui sur­vivent dans un New York déprimé et qui s’érein­tent au tra­vail. Donc, même si le pub­lic reste bouche bée d’ad­mi­ra­tion devant les incroy­ables fig­ures choré­graphiques de Bus­by Berke­ley, on est à mille lieues de l’ex­o­tisme romancé de Fly­ing Down to Rio (Car­i­o­ca) qui sor­ti­ra sur les écrans quelques mois plus tard, avec, en cou­ple vedette, Fred Astaire et Gin­ger Rogers – rap­pelons par ailleurs que cette dernière tient un sec­ond rôle savoureux dans 42nd Street.

Les stu­dios Warn­er n’ont jamais caché leur pen­chant pour les prob­lé­ma­tiques sociales et ont pris par­ti pour le démoc­rate Franklin Delano Roo­sevelt, encore gou­verneur de l’É­tat de New York pen­dant le tour­nage de 42nd Street et qui, quelques jours plus tard, en novem­bre 1932, allait être très con­fort­able­ment élu prési­dent des États-Unis pour met­tre en appli­ca­tion son pro­gramme de redresse­ment du pays, le New Deal.

Image du film 42nd Street.

C’est dans cette optique socio-réal­iste que 42nd Street a fait date en devenant la référence his­torique du back­stage musi­cal, même si The Broad­way Melody of 1929 a ini­tié le genre qua­tre ans plus tôt. Le film ne se con­tente pas de mon­tr­er au pub­lic un joli spec­ta­cle, un pro­duit fini ; il donne à voir, depuis les couliss­es, le proces­sus de pro­duc­tion, de recrute­ment des artistes : les audi­tions, la con­cur­rence, les rancœurs, les désil­lu­sions mais aus­si l’en­traide, l’é­panouisse­ment et le suc­cès. L’idée est de mon­tr­er la péni­bil­ité à la fois au tra­vail et dans un con­texte extrapro­fes­sion­nel, mais aus­si de val­oris­er l’ef­fort pour s’en sor­tir. Les dia­logues sont plus vrais que nature, l’hu­mour grinçant, l’ar­got pit­toresque, les repar­ties croustil­lantes, le ton sou­vent amer : le spec­ta­teur peut aisé­ment s’i­den­ti­fi­er aux per­son­nages. Des prob­lé­ma­tiques plus déli­cates font égale­ment par­tie du décor, comme le har­cèle­ment sex­uel et la pro­mo­tion canapé – voire la pros­ti­tu­tion ; on voit même dans la séquence finale une femme se faire poignarder par son amant…

Image du film 42nd Street.

Cet ancrage dans la réal­ité d’alors – qui ressem­ble à celle d’au­jour­d’hui ? – con­fère à 42nd Street une aura qui l’emporte sur ses imper­fec­tions et son grand âge – 90 ans cette année.

 

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