J’avais rêvé… Auto-interview !

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J'avais rêvé... Une amitié musicale
Éditions du Rocher. 172 pages – 19,90€.
Également disponible sur le site de la Fnac.

Je m’accorde quelques min­utes de schiz­o­phrénie afin de faire cette auto-inter­view autour de la sor­tie du livre J’avais rêvé… que j’ai co-écrit avec Alain Bou­blil et Claude-Michel Schönberg.

Quelle est la genèse de ce livre ?
Stéphane Letel­li­er-Ram­pon, copro­duc­teur de cette nou­velle ver­sion des Mis­érables, m’a con­tac­té pour me pro­pos­er de co-rédi­ger cet ouvrage. Aucun livre n’existe en France sur le spec­ta­cle et encore moins sur le par­cours absol­u­ment incroy­able de ses deux créa­teurs. Par le biais de Bruno Nougayrède, les édi­tions du Rocher m’ont accordé leur con­fi­ance, moi qui ai l’habitude d’écrire, mais sans expéri­ence dans le domaine pure­ment lit­téraire, et voilà : le livre est désor­mais terminé.

Com­ment le tra­vail s’est-il organisé ?
Le délai pour écrire ce livre a été très court, il n’était donc pas ques­tion de se laiss­er aller à des rêver­ies ou des expéri­men­ta­tions. Dans un pre­mier temps, j’ai rédigé un chapi­trage qui me sem­blait en cohérence avec le but de ce livre. Une fois qu’il a été accep­té par l’ensemble des parte­naires, j’ai mené des inter­views pour nour­rir les divers chapitres avec, d’un côté, Alain Bou­blil, qui se trou­vait à l’époque aux États-Unis, et de l’autre, Claude-Michel Schön­berg, qui réside à Lon­dres. Ensuite j’ai retran­scrit ces douze heures d’enregistrement et com­mencé à rédi­ger. J’envoyais mes écrits chapitre par chapitre à Alain et Claude-Michel, puis incor­po­rais leurs remar­ques, cor­rigeais cer­tains points. Par la suite, nous nous avons appliqué la méth­ode qu’Alain pra­tique en per­ma­nence : la réécri­t­ure. Prof­i­tant de son séjour parisien, j’ai tra­vail­lé à ses côtés. Je regrette un peu de ne pas avoir eu plus de temps car, en reprenant les textes, de nou­veaux sou­venirs reve­naient à sa mémoire et j’adorais ces moments où l’œil d’Alain s’éclairait, provo­quant un sourire mali­cieux. Avec Claude-Michel, nous avions des ren­dez-vous ponctuels en visio : il don­nait son point de vue, rec­ti­fi­ait de son côté. Je tiens égale­ment à saluer mes amis qui m’ont soutenus et relus avec effi­cac­ité, au pre­mier rang desquels Gilles Taillefer.

Claude-Michel Schön­berg et Alain Bou­blil ©DR

À quel pub­lic s’adresse ce livre ?
Cette réflex­ion, menée en amont, m’a con­duit à con­clure que J’avais rêvé… intéresserait oblig­a­toire­ment les fans des Mis­érables. Il va sans dire qu’une par­tie du con­tenu du livre est con­nue par ces admi­ra­teurs. Par con­séquent, j’ai ten­té d’intégrer de nou­veaux élé­ments, y com­pris d’un point de vue icono­graphique puisque Alain et Claude-Michel m’ont ouvert leurs archives per­son­nelles. Même s’ils ne col­lec­tion­nent pas les pho­tos, ils en pos­sè­dent cer­taines qui étaient par­faites. Ils m’ont d’ailleurs fait l’amitié de m’autoriser à pub­li­er pour cet arti­cle ces trois clichés, non retenus pour le livre, mais que j’aime beau­coup. Par la suite, Agnès Vidalie, l’éditrice, a fait un gros tra­vail de recherche, aidée en cela par Sue Coombes, l’as­sis­tante d’Alain et une femme absol­u­ment déli­cieuse. Le livre se des­tine égale­ment au pub­lic qui va décou­vrir le spec­ta­cle et qui aura sans aucun doute le désir d’en savoir plus sur ses auteurs.

Alain Bou­blil et Claude-Michel Schön­berg en pleine dis­cus­sion lors de l’élab­o­ra­tion de Mar­tin Guerre ©DR

Est-ce un livre unique­ment con­sacré aux Mis­érables ?
Pas du tout. Même si la genèse de ce spec­ta­cle occupe une large place, il me sem­blait pri­mor­dial d’évoquer le passé d’Alain et de Claude-Michel. D’où vien­nent-ils ? Quel est leur par­cours ? Je vous con­seille l’anecdote de jeunesse de Claude-Michel avec Bar­bara – j’adore. Lorsque l’on con­sid­ère leurs tra­jec­toires, les points com­muns ne man­quent pas, je trou­vais amu­sant de les évo­quer. Ce tan­dem qui a offert au pub­lic tant de spec­ta­cles – Miss Saigon, Mar­tin Guerre, The Pirate Queen… – est com­posé de deux per­son­nal­ités très dif­férentes, qui se sont révélées com­plé­men­taires. Et ce fut un plaisir de les enten­dre, l’un et l’autre, évo­quer la var­iété des années 60 et 70, dont j’étais par­ti­c­ulière­ment ama­teur, puisqu’ils ont large­ment par­ticipé à son essor. Par ailleurs, à la fin du livre, lorsque le com­pos­i­teur évoque son souhait, qui ne s’est pas con­crétisé, d’adapter Quand volent les cigognes en comédie musi­cale, je me prends à penser que les fans les plus assidus ne man­queront pas de regarder ce film au tra­vers de ce prisme par­ti­c­uli­er. En con­nais­sant la musique de Claude-Michel, sa manière de com­pos­er, je me suis livré à l’ex­er­ci­ce d’es­say­er de com­pren­dre ce qui l’a séduit dans ce chef‑d’œuvre du ciné­ma russe et de devin­er quelles scènes il aurait mis­es en avant. C’est pas­sion­nant. Après la rédac­tion du livre, j’ai con­tin­ué quelques recherch­es et trou­vé une par­ti­tion con­servée à Besançon – la ville natale de Vic­tor Hugo – de la pre­mière adap­ta­tion musi­cale des Mis­érables, avec des paroles du romanci­er lui-même. Pour les curieux, vous pou­vez jouer et inter­préter « La Chan­son de Fan­tine » puisqu’elle est disponible sur le site de la bib­lio­thèque munic­i­pale de Besançon. J’ai même décou­vert que plusieurs com­pos­i­teurs l’ont mise en musique, à décou­vrir en cli­quant ici, en cli­quant là, ou encore là

Par­ti­tion Chan­son de Fan­tine ©Bib­lio­thèque munic­i­pale de Besançon, BR.B.28.11

Con­nais­sez-vous par cœur Les Mis­érables ?
Je men­ti­rais si je répondais par la pos­i­tive. J’ai vu le spec­ta­cle à Lon­dres voilà quelques années, j’ai assisté à une représen­ta­tion de la tournée au Châtelet en 2010 et j’ai vu le film. Revoir la cap­ta­tion des 25 ans à l’O2 Are­na a fait ressur­gir nom­bre de sou­venirs. En 1980, j’avais 14 ans et j’écoutais la chan­son de Gavroche, large­ment dif­fusée en radio, et j’avais emprun­té le dou­ble 33-tours à la dis­cothèque. L’histoire des Mis­érables, décou­verte par une ver­sion abrégée du roman puis au ciné­ma, me ter­ror­i­sait. La mort de Fan­tine m’était insup­port­able, j’en ai fait des cauchemars ! Je me rap­pelle avoir écouté Rose Lau­rens, la pre­mière inter­prète de Fan­tine, et avoir fon­du en larmes, sa voix m’avait boulever­sé. J’avais été séduit par la presta­tion de Mau­rice Bar­ri­er et le chant cristallin de Fabi­enne Guy­on m’avait mar­qué. Je crois égale­ment que l’aspect très religieux de l’œu­vre m’avait un peu rebuté. J’au­rais adoré que Val­jean trou­ve sur sa route un homme bon qui lui offre des chan­de­liers et soit le point de départ de sa rédemp­tion, sans pour autant qu’il fût un ecclési­as­tique. J’ignorais que Fabi­enne et moi devien­dri­ons amis des années plus tard et qu’elle me ferait l’amitié de chanter dans mon pre­mier doc­u­men­taire, The Fun­ny Face of Broad­way ! À l’époque, j’écoutais plus volon­tiers le con­te musi­cal de Philippe Cha­tel Émi­lie Jolie, qui me plongeait dans un univers fan­tas­magorique qui me con­ve­nait par­faite­ment bien. Je devais sans doute devenir un peu plus adulte pour saisir tout ce que la comédie musi­cale Les Mis­érables avait à offrir. De toute manière, je n’ai pas de con­nais­sance ency­clopédique des œuvres. J’adore me plonger dans les livres achetés à New York qui les recensent et con­ti­en­nent toutes les infor­ma­tions dont j’ai besoin.

En matière d’abréviation, doit-on utilis­er les Miz ou les Mis ?
Pronon­cer mis­érable présente plusieurs dif­fi­cultés pour un Anglo-Sax­on : le e accent aigu et le r. Par con­séquent l’abréviation « mis » est dev­enue la règle. J’ai posé la ques­tion aux prin­ci­paux intéressés, qui optent pour Les Mis, mais qui, phoné­tique­ment, se prononce Miz

En con­clu­sion ?
Je suis ravi d’avoir pu partager quelques moments avec ces deux hommes aux tem­péra­ments telle­ment dif­férents, deux grands lecteurs, curieux, débor­dants de pro­jets, qui con­tin­u­ent à tra­vailler, réfléchir et… dis­cuter ! En fait, il y a quelque chose de ver­tig­ineux à penser que Les Mis­érables sont devenus une entre­prise gigan­tesque, un mastodonte dans l’industrie du musi­cal, mais que, à chaque représen­ta­tion, tout repose sur les épaules des artistes et des tech­ni­ciens en coulisse avec la fragilité inhérente à toute représen­ta­tion. Et cette toute nou­velle pro­duc­tion, plus que promet­teuse, aura tout pour séduire les fans et un nou­veau pub­lic. Sans par­ler d’un aspect émo­tion­nel très fort pour ses deux créa­teurs et, d’une cer­taine manière, pour Cameron Mackintosh.

Claude-Michel Schön­berg et Alain Bou­blil, tou­jours en dis­cus­sion… ©DR

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