Laurent Valière, la 42e rue prend ses quartiers d’été

1
1994

Sa nouvelle série d'émissions estivales a pris place sur les ondes le 5 juillet. L'incontournable producteur de l'émission de France Musique dédiée aux comédies musicales nous confie ses réflexions sur la situation actuelle et ses envies pour la rentrée.

Quel bilan tirez-vous de la saison qui vient de s’écouler ?

Ce fut une sai­son incroy­able à plus d’un titre. Je suis recon­nais­sant à tous les invités d’avoir par­ticipé aux émis­sions : Kris­ten Ander­son-Lopez et Robert Lopez, auteurs de La Reine des neiges ; Renée Zell­weger qui a incar­né Judy Gar­land ; Dan­ny Elf­man… Des moments forts pour moi. Et cela dou­blé par de super con­certs en direct, avec par exem­ple la troupe de Fun­ny Girl, le tri­om­phe mérité de la sai­son ; la troupe de Yes présen­té à l’Athénée reçue avec celle de Une femme se déplace de David Lescot, une belle décou­verte ; la mag­nifique troupe du Vio­lon sur le toit venue chanter le 6 octo­bre avant de se pro­duire à l’Opéra nation­al du Rhin. Il faut dire que la sai­son avait bien débuté avec le con­cert organ­isé pour les 20 ans de Regard en Coulisse, en faisant la part belle aux jeunes artistes. Je n’oublie pas les épatants pro­gram­ma­teurs qui nous ont fait partager leur amour pour la comédie musi­cale, à l’instar de Lam­bert Wil­son, Stephen Mear… Je pense que l’émission a, cette sai­son encore, rem­pli son rôle : faire décou­vrir plein de choses très divers­es au plus grand nombre.

Bien enten­du, per­son­ne ne pen­sait que les cabarets autour de The Paja­ma Game avec tous les musi­ciens, The Fan­ta­sticks, puis South Pacif­ic le 1er mars, seraient les dernières émis­sions de la sai­son faites sous cette forme. Durant le con­fine­ment, nous avons con­tin­ué l’émission avec les moyens du bord. Il a fal­lu trou­ver de nou­velles idées. Je suis telle­ment touché par les nom­breux mes­sages, aus­si bien des artistes que des audi­teurs, qui nous ont dit être heureux de nous retrou­ver. J’ai imag­iné la série d’émissions autour des cla­que­ttes, his­toire de ne pas céder à la morosité. Notre répon­deur télé­phonique a égale­ment recueil­li les propo­si­tions des audi­teurs, par exem­ple autour des titres de Stephen Sond­heim à faire décou­vrir. Et cerise sur le gâteau : une émis­sion regroupant un triple con­cert virtuel entre Lon­dres avec Manon Taris et Antoine Mérand – qui a donc sus­pendu sa par­tic­i­pa­tion au Fan­tôme de l’Opéra pour cause de pandémie –, Mia­mi avec Alyssa Landry et Thier­ry Boulanger, et Paris avec Isabelle Georges et Fred­erik Steen­brink. Il était impor­tant pour moi, certes de diver­tir l’auditeur, mais aus­si de l’informer de la réal­ité de la sit­u­a­tion. C’est pourquoi j’ai don­né la parole aux artistes, aux per­son­nes qui tra­vail­lent pour le spec­ta­cle vivant. Ain­si Dominique Trot­tein, le directeur musi­cal de Mogador, où se pré­pare Le Roi Lion, a expliqué com­ment Ghost s’est achevé bru­tale­ment : il venait jouer du piano dans un théâtre désert, les loges pas encore vidées tant les déci­sions de tout arrêter ont été abruptes. De même pour Hervé Devold­er qui a réfléchi durant le con­fine­ment à sa prochaine mise en scène de comédie musi­cale en inté­grant les gestes barrières.

Que vous a appris cette période ?

Une chose toute sim­ple : par l’espoir que ses chan­sons provo­quent sou­vent, la comédie musi­cale pos­sède ce pou­voir d’enchanter les gens. Ce n’est pas pour rien que le genre a été très pop­u­laire en Amérique durant la dépres­sion de 1929. Sans établir de com­para­i­son, je pense que la comédie musi­cale a un véri­ta­ble rôle à jouer. La radio, en ce sens, a un pou­voir presque mag­ique et c’est pour ça que j’en fais ! Nous sommes une voix et nous avons essayé de l’utiliser pour don­ner de l’espoir, être joyeux et, dans le même temps, pour ren­dre compte de ce qui se passait.

Comment vous est venue l’idée de cette émission estivale ?

Pen­dant le con­fine­ment, j’ai réfléchi à des façons de par­ler un peu dif­férem­ment de la comédie musi­cale. Pour cette nou­velle série, je prends une œuvre emblé­ma­tique et tisse autour d’elle une réflex­ion plus générale. Ain­si, avec le thème de l’émission de dimanche dernier, autour du Magi­cien d’Oz et de l’émergence du ciné­ma qui danse et qui chante, on exam­i­nait com­ment la comédie musi­cale est restée un art très pop­u­laire en Amérique pen­dant la crise économique. Il per­met d’accéder à la légèreté, à un espoir de lende­mains meilleurs. La pre­mière émis­sion posait une ques­tion un peu provo­cante autour de Por­gy and Bess : musi­cal ou opéra ? Chaque émis­sion est un peu comme un zoom. Mais ce n’est pas une ency­clopédie : elle reste des­tinée à un pub­lic très large. Je me suis égale­ment appuyé sur mon livre 42e rue : la grande his­toire des comédies musi­cales. Je souhaite faire de cette série d’émissions quelque chose de léger, intel­li­gent et, bien enten­du, très musi­cal. Je ne suis jamais allé dans cette direc­tion, c’est stim­u­lant. Je porte égale­ment une atten­tion par­ti­c­ulière aux par­ties musi­cales en faisant des ponts. Par exem­ple, dans l’émis­sion de dimanche dernier, lorsque j’évoque la car­i­o­ca, je pars de la ver­sion des Nuls, très con­nue du grand pub­lic, pour remon­ter aux orig­ines de la chan­son, inter­prétée par Fred Astaire.

Voici la liste des prochaines émissions :
Épisode 3 : Wild About Har­ry et les racines noires de la comédie musicale
Épisode 4 : La Mélodie du bon­heur et l’âge d’or de Broadway
Épisode 5 : Chan­tons sous la pluie et le départe­ment Arthur Freed de la Metro Gold­wyn Mayer
Épisode 6 : West Side Sto­ry et qua­tre jeunes dans un jeu de quilles
Épisode 7 : Hair et la contre-culture
Épisode 8 : Les Para­pluies de Cher­bourg et la comédie musi­cale à la française

Quels sont vos désirs pour la rentrée ?

J’entame la nou­velle sai­son de 42e rue un peu dans le flou en rai­son de la crise san­i­taire. J’espère que les artistes pour­ront remon­ter sur scène le plus vite pos­si­ble afin que nous puis­sions les soutenir. Ces derniers mois, la pro­gram­ma­tion changeait chaque semaine, ce qui n’était pas aisé. Je croise les doigts pour l’avenir, mais quand je vois que Broad­way ne rou­vre pas ses théâtres offi­cielle­ment avant début jan­vi­er, que l’activité est gelée égale­ment à Londres…

En tout cas, je peux d’ores et déjà vous annon­cer qu’il y aura bien un troisième opus de « La 42e rue fait son show ». Je ne peux pas encore dévoil­er le nom de la per­son­nal­ité qui com­posera un mini-musi­cal pour cette occa­sion, mais je suis très hon­oré par cette par­tic­i­pa­tion. Quant aux cabarets, ils sont tou­jours d’actualité, mais ils sont, pour la plu­part, soumis à l’actualité. De toute manière, nous nous adapterons. Il faut dire que je béné­fi­cie du sou­tien des équipes et de la direc­tion de Radio France ; je leur en suis très recon­nais­sant. Par ailleurs, je tiens à ren­dre hom­mage à Alain Mar­cel dis­paru juste avant le con­fine­ment et à célébr­er égale­ment le 120e anniver­saire de la nais­sance de Kurt Weill. La ren­trée débutera avec la sor­tie de notre « vinyl book », un mix entre le texte et les chan­sons des plus belles comédies musi­cales. Et je peux vous dire que d’autres pro­jets de ce genre, j’en ai plein la tête !

42e rue – La grande his­toire des comédies musi­cales. Tous les dimanch­es de l’été de 19h à 20h sur France Musique.

1 COMMENTAIRE

  1. QUEL BONHEUR de décou­vrir votre émis­sion La 42ème » Rue » dédiée à la comédie musi­cale. Je tra­vaille depuis 18 mois à une créa­tion de comédie musi­cale fran­co-maro­co-algéri­enne. Un pro­jet très ambitieux que j’aimerais bien vous adress­er par email si vous voulez bien me com­mu­ni­quer votre adresse. J’ai déjà le sou­tien de quelques per­son­nal­ités du monde de l’Art et de la Cul­ture — tant en France qu’au Maroc — aux­quelles j’ai soumis le fichi­er de présen­ta­tion de mon « accouche­ment » qui con­tient toutes les étapes et le bud­get prévi­sion­nel. Le livret en est une tra­duc­tion con­tem­po­raine très ébou­rif­fante du « CANTIQUE DES CANTIQUES dit … de SALOMON » par Feu Robert MOREL dont les héri­tiers m’ont accordé un mer­veilleux « libre de droits d’au­teur » ! Soyez remer­cié de l’in­térêt que vous voudrez bien m’ac­corder. Avec mes sincères salu­ta­tions muzikamikales. Lîlâ bâ (pseu­do­nyme d’artiste) alias MM BEAUGONIN.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici