Le grand roman américain pour la première fois sur scène !
Désastre écologique, crise économique, migration, violence sociale… Les Raisins de la Colère pourraient apparaître tristement d’actualité si le livre de John Steinbeck, prix Pulitzer puis prix Nobel de littérature, n’était pas avant tout un chef d’œuvre intemporel riche d’une humanité plus que jamais fragile : l’exode de la famille Joad, abandonnant sa terre d’adoption, ne se révèlera que désillusions et exploitation économique et humaine.
Un texte fondateur. Un conte musical, tout au long de la route 66.
Notre avis (paru lors des représentations au Théâtre Michel en février 2024) : Depuis sa publication en 1939, Les Raisins de la colère, auréolé d’un prix Pulitzer, fait durablement partie du patrimoine mondial de la littérature. La force d’écriture de son auteur, John Steinbeck (prix Nobel de littérature en 1962), les thèmes universels qu’il aborde et le réalisme saisissant dans lequel il plonge le lecteur suffisent à expliquer son statut de texte fondateur. Le succès de l’adaptation, l’année suivante, en un long-métrage réalisé par John Ford avec Henry Fonda a largement contribué à diffuser l’histoire de la famille Joad. Alors que la Grande Dépression vient de débuter, la sécheresse qui s’abat sur l’Oklahoma et la modernisation de l’industrie agricole obligent Tom Joad, ses parents et ses proches, métayers sans ressources, à aller chercher du travail dans les vergers de Californie. Les difficultés qu’ils rencontrent en route et l’immense désillusion qu’ils vont connaître à leur arrivée font de ce récit un manifeste qui dénonce, entre autres, la misère sociale dans le monde rural, l’exploitation des travailleurs par les grands propriétaires, la corruption de l’autorité au détriment des moins nantis, les conditions insalubres d’accueil de migrants victimes de catastrophes climatiques… Des thèmes universels, écrivions-nous… et plus que jamais actuels !
Par la suite, Les Raisins de la colère a été notamment adapté en pièce de théâtre – Tony Award en 1990 – et en opéra (musique de Ricky Ian Gordon et livret de Michael Korie). Xavier Simonin propose ici un conte en musique en puisant intelligemment dans un récit de près de cinq cents pages les étapes et les images marquantes de ce road trip de la misère et du désenchantement. Sur scène, il endosse à la fois les habits du narrateur qui plante le décor si particulier de ces terres arides des États-Unis et de tous les personnages qui peuplent cet exode – un envoûtant tour de force. La lumière, l’optimisme qui ne fait jamais défaut chez Steinbeck, trouve ici son expression dans de formidables musiques originales signées Glenn Arzel et Claire Nivard et interprétées par trois excellents instrumentistes-chanteurs sous la direction musicale de Jean-Jacques Milteau (deux Victoires de la musique, Grand Prix du jazz de la Sacem). Dans des sonorités country ou blues à l’ancienne, voix joliment harmonisées, guitares, contrebasse, banjo, violon, harmonica et guimbarde se mêlent en chansons pour ponctuer la migration sur la mythique route 66 et aussi en musiques de scène évocatrices pour souligner la narration.
Par l’engagement sans faille de son auteur et par la fidélité de ton au monument de Steinbeck, et par la fusion réussie avec une musique captivante, ce spectacle réussit à la fois à nous embarquer dans une histoire vieille de presque cent ans et à nous interroger sur notre époque.