D’après l’œuvre de Victor Hugo.
Musique : Richard Cocciante.
Texte : Luc Plamondon.
Mise en scène : Gilles Maheu.
Chorégraphies : Martino Müller.
Avec :
Esmeralda : Hiba Tawaji.
Quasimodo : Angelo Del Vecchio.
Frollo : Daniel Lavoie.
Gringoire : Richard Charest.
Phoebus : Martin Giroux.
Fleur de Lys : Alyzée Lalande.
Clopin : Jay.
Une bonne histoire est faite de conflits et de passion. Il n’en manque pas dans la trame de Notre Dame de Paris : le conflit entre la beauté (Esmeralda) et la laideur (Quasimodo), entre le charnel et le spirituel (Frollo, le curé de Notre-Dame), entre le chef de bande de la Cour des Miracles (Clopin) et le soldat du roi (Phoebus), entre le temps des cathédrales et les nouvelles idées qui viennent tout bousculer (Gringoire, le poète troubadour) entre les sans-papiers de l’époque et les français de sang.
Notre avis (écrit en 2016) : Peut-on encore vibrer pour la fin d’un monde « prévue pour l’an 2000 » ? Écouter « Belle » comme si c’était la première fois ? Ressentir intensément l’espoir d’une Esmeralda qui crie son désir d’aimer et de « Vivre » ? A l’heure où Notre Dame de Paris atteint sa majorité, le spectacle devenu culte et sa mise en scène originelle sont-ils toujours efficaces ?
Reconnaissons de prime abord que les défauts majeurs sont toujours présents. Le livret elliptique ayant dépouillé l’œuvre de Hugo de sa profondeur fait naître des personnages figés qui évoluent peu au fil d’un récit déséquilibré, avec un second acte bien moins dynamique que le premier. Par ailleurs, nul doute qu’une bande-son, a fortiori lorsque le volume est poussé à son maximum, n’atteindra jamais le pouvoir d’un orchestre en direct… C’est d’autant plus prégnant dans un lieu aussi austère que le Palais des Congrès de Paris. Dans cette salle où il est difficile de distinguer les visages au-delà des premiers rangs, transmettre des émotions et conquérir les spectateurs relèvent de la gageure. Et pourtant…
Dès les premières notes, le public se laisse volontiers happer par la cinquantaine de morceaux du spectacle, dont beaucoup ont acquis le statut de tubes. Aux applaudissements nourris qui saluent chaque scène succèdent dans le public une émotion palpable et un silence quasi religieux qui sied au propos. Le temps ayant désormais fait son œuvre, le public ne cherche plus à retrouver des imitations rigoureuses de Fiori, Garou ou Ségara. S’ils ont irrémédiablement laissé leur empreinte sur les personnages qu’ils ont créés, on cède moins à la tentation de réaliser les sempiternelles comparaisons. De fait, les artistes jouent leurs partitions respectives en y intégrant leur personnalité. Et le défi est relevé. Se distinguent notamment Hiba Tawaji et son Esmeralda tout en sensualité ainsi que Richard Charest, avec son charismatique Gringoire. Daniel Lavoie, seul interprète de la troupe originelle, offre quant à lui un Frollo plus glaçant que jamais. Au-delà des protagonistes, les danseurs-acrobates qui peuplent la Cour des Miracles font preuve d’une énergie et d’un talent indéniables. Les scènes de groupe sont toujours aussi impressionnantes et emportent nettement l’adhésion des spectateurs, si l’on en croit l’applaudimètre. Si l’on souhaiterait qu’une nouvelle mise en scène puisse désormais offrir une vision différente de l’oeuvre, l’ovation spontanée et unanime du public lors des saluts prouve, s’il en était besoin, que Notre Dame de Paris est désormais un classique du genre.