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Théâtre du Rond-Point – 2 bis, avenue Franklin D. Roosevelt, 75008 Paris.
Du 11 au 27 janvier 2024. Du mardi au vendredi, 20h30 - Samedi, 19h30.
Relâche : les dimanches et lundis
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Mon­strueuses, hila­rantes et sub­ver­sives, ces deux pièces au cli­mat frig­ori­fié met­tent en scène les luttes frat­ri­cides de per­son­nages cru­els extrav­a­gants en marge de la société et de l’espèce humaine. Ici, on change de sexe à volon­té et on crève pour mieux ressus­citer dans un bal­let post-apoc­a­lyp­tique jubi­la­toire. En jouant des con­trastes entre kitsch et sub­lime, cru­auté et drô­lerie, le spec­ta­cle est aus­si une œuvre plas­tique et musi­cale qui révèle la portée poli­tique et la poésie déglin­guée de Copi. Dans une transe joyeuse et dévas­ta­trice est célébré un théâtre de la cat­a­stro­phe et de la cru­auté certes, mais un théâtre du rire et de la sur­prise avant tout. Un théâtre de la fin de l’impossible où la révo­lu­tion pour­rait enfin advenir.

Notre avis : Même si le spec­ta­cle s’ouvre dans une ver­sion que l’on croirait sor­tie de Priscil­la, Queen of the Desert de “Girls Just Wan­na Have Fun” de Cindy Lau­per et qu’il sera ponctuelle­ment ques­tion dans la nar­ra­tion d’extraits inter­prétés en direct de chan­sons de Bar­bara, de Michel Berg­er, ce spec­ta­cle qui n’a de glacial que le nom ne s’apparente pas à une comédie musicale.
La plume de Copi, auteur-dessi­na­teur trop tôt dis­paru, appa­raît plus folle et cru­elle que jamais, servie par une mise en scène pour le moins inven­tive. Deux pièces se suc­cè­dent ici : L’Homosexuel ou la Dif­fi­culté de s’exprimer et Les Qua­tre Jumelles. Deux huis clos ter­ri­fi­ants, situés dans des con­trées inhos­pi­tal­ières. Si nous imag­i­nons sans peine le scan­dale qu’elles purent provo­quer lors de leur créa­tion dans les années 70, elles n’ont rien per­du de leur pou­voir sub­ver­sif, où le rire sert d’exutoire face aux sit­u­a­tions plus atro­ces et scabreuses les unes que les autres dans lesquelles se débat­tent les personnages.

Soit une mère et sa fille, tou.tes deux transexuel.les qui béné­fi­cient toute­fois des dons de repro­duc­tion féminin – la mère sug­gérant à sa fille de “chi­er l’enfant” qu’elle porte. Ce qu’elle fera. Dans cet univers totale­ment déjan­té où règne en maîtresse incon­testée la métaphore, les rap­ports humains sont présen­tés dans toute leur fureur. Un désir de fuir de cette mai­son se heurtera en per­ma­nence à des obsta­cles tou­jours plus incon­grus, créant un cli­mat anx­iogène. Ce dernier est d’ailleurs mag­nifié par les apparences des comé­di­ennes et comé­di­ens, dont les pos­tich­es imposent l’outrance, et les cos­tumes de Chris­t­ian Lacroix. Et n’espérez pas voir dis­tincte­ment les vis­ages des comé­di­ens, dis­simulés en par­tie sous des masques cauchemardesques qui évo­quent les pein­tures de Fran­cis Bacon.

Quant au duo de jumelles, cette intrigue fait écho à la précé­dente par ce nou­veau huis clos, cette mai­son en Alas­ka d’où il est impos­si­ble de par­tir. Et quand on meurt, on ressus­cite – grâce en par­tie à la drogue qui cir­cule allè­gre­ment – et quand un mem­bre est amputé, il se régénère. Le met­teur en scène Louis Arene, égale­ment inter­prète, sem­ble s’en être don­né à cœur joie. Il indique, dans sa note d’intention, qu’il ne faut pas for­cé­ment chercher de sens à ces deux pièces regroupées. De sens, peut-être pas, mais une force assez implaca­ble s’en dégage, don­nant à ce qui ne pour­rait être qu’une hys­térie col­lec­tive bien huilée une épais­seur insoupçon­née. Et lorsque les masques tombent, les applaud­isse­ments sont nour­ris et redou­blent après la lec­ture d’un texte appelant les êtres humains à vivre en paix, con­damnant toute forme de guerre et d’oppression. Et là, le spec­ta­cle touche au cœur.

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