Notre avis : Ce musical écrit par Benj Pasek, Justin Paul et Steven Levenson et créé en 2015 à Washington avant d’être transféré l’année suivante Off-Broadway puis à Broadway, a remporté six Tony Awards en 2017, dont celui de la meilleure comédie musicale. Il tient l’affiche à Broadway jusqu’en septembre 2022, révélant l’acteur Ben Platt, qui reprendra son rôle dans l’adaptation cinématographique signée Stephen Chbosky en 2021. L’ouvrage, contrairement à de nombreux pays, n’a jamais été monté en France ; nous saluons donc l’initiative du Cours Florent qui en présente une version traduite, comblant enfin ainsi l’absence de ce titre dans l’Hexagone.
L’intrigue peut se résumer comme suit. Le jeune Evan Hansen ressent des difficultés à s’insérer dans la vie. Solitaire, introverti, ses seuls contacts se résument à sa mère et à son thérapeute. Ce dernier lui confie une tâche quotidienne afin qu’il retrouve confiance en soi : s’écrire des lettres. Malheureusement, un des ses camarades de classe, Connor, lui en dérobe une avant de, quelques heures plus tard, se donner la mort. Les parents du jeune défunt découvrent ladite lettre dans la poche de leur fils et pensent qu’elle a été écrite par Connor pour Evan. Ils sont à la fois surpris et ravis d’apprendre que Connor avait un ami qui a tenté de le sauver du désespoir. De ce fait, Evan ressent une joie profonde de se sentir pour la première fois aimé et utile à quelqu’un. Il s’enfonce hélas dans une spirale de mensonges dont il aura beaucoup de peine à se sortir…
Il s’agit plus d’une pièce de théâtre avec musique qu’un musical traditionnel. C’est d’ailleurs un peu la tendance des spectacles que l’on peut voir ces dernières saisons outre-Atlantique, dans la veine de Next to Normal ou de Come Fly Away. Une grande importance est accordée à l’écriture du livret et à la profondeur du sujet, ce qui n’était pas forcément le cas d’ouvrages de comédie musicale du passé où le seul but consistait à distraire ou à faire rêver.
Trois distributions nous sont offertes au gré des dates – Evan devient parfois Evane –, ce qui permet d’apprécier pleinement la palette et le travail de fond de ces jeunes interprètes qui se trouvent fort investis dans l’aventure. De même, le rôle-titre au sein d’une même représentation est tenu par deux artistes différents. Nous avons, pour notre part, apprécié deux jeunes sensiblement opposés par leur jeu et par leur apparence physique : Mathis Mariel et Lo Derobert. Pour le spectateur, cela constitue une excitation tout autant qu’un facteur délicieusement déstabilisant. Ils sont fort bien épaulés par le reste de la distribution. Les voix sont solides, la diction impeccable, le jeu dramatique sonne juste ; la rigueur que l’on leur a enseignée se ressent pleinement. Quentin Skrabo, Pauline Merveille, Quitterie Arnaud, Duru Arslan, Maïlis Bouyssou, Mallory Sommer, sans oublier Nicolas Chailley (Connor), ainsi que les ensembles – habiles à manipuler rapidement des plateaux mobiles – nous épatent tous. Une soirée hors des sentiers battus nous a été offerte, nous en redemanderions bien d’autres.