Boop!

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Broadhurst Theatre – 235 West 44th Street, New York.
Première le 5 avril 2025
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Il y a près d’un siècle, un personnage de dessin animé allait crever l’écran et s’imposer par sa prestance, sa façon rapide de s’exprimer et son sex-appeal. Il n’en fallait pas plus pour que les gens de l’époque soient rapidement séduits – une réaction qui, au fil des ans, ne s’est jamais démentie, même si le personnage en question n’a pas survécu aux évolutions des mœurs dans l’industrie du film. Comme s’y attendaient Max Fleischer, son créateur, et Grim Natwick, son dessinateur, Betty Boop allait rester à l’affiche. La meilleure preuve, c’est qu’elle vient de débarquer, pour la première fois, à Broadway dans une comédie musicale pleine d’allant et de gags, tout simplement intitulée Boop! (et notez le point d’exclamation !).

Afin que les spectateurs ne soient pas surpris, la vedette du spectacle, Jasmine Amy Rogers, qui fait là ses premiers pas à Broadway, a pris l’aspect du personnage, ses allures dégagées, sa façon de s’exprimer rapidement avec une voix stridente de jeune fille, et même son clin d’œil délirant qui en dit long sur qui elle est et ce qu’elle pense.

Jasmine Amy Rogers et la troupe ©Matthew Murphy & Evan Zimmerman

Comme il fallait s’y attendre, la pièce débute en noir et blanc, comme dans les films de Fleischer, avec Betty exprimant son désir de se rendre dans un monde réel, loin de Toon Town, et avec des exigences de son metteur en scène toujours désireux de lui donner la vedette dans un nouveau court-métrage. Elle est aidée en cela par Grampy, son grand-père, qui a inventé un système de "télétransport" électronique qu’elle utilise à son insu et qui la propulse dans l’exposition Comic Con à New York en 2025, un lieu plein de couleurs.

Jasmine Amy Rogers et Angelica Hale ©Matthew Murphy & Evan Zimmerman

En peu de temps, elle y fait la connaissance d’une jeune ado de 17 ans, Trisha, une fan de Betty depuis sa plus tendre enfance, qui la reconnaît – quand bien même Betty prétend être une certaine Betsy Crampwhiler – et qui la présente à sa mère d’adoption, Carol, et à son frère, Dwayne, un musicien de jazz. Quand Betty dit à ce dernier qu’elle est une chanteuse de jazz, il l’entraîne dans un club où son intervention révèle sa véritable identité aux clients aussi bien qu’à Trisha. Entre-temps, Grampy, qui s’est rendu compte que Betty a utilisé son télétransporteur, décide d’aller à sa recherche et arrive à New York, où il retrouve Valentina, avec laquelle il avait eu une liaison avant d’échouer à Toon Town. De son côté, Carol présente Betty à un politique, Raymond Demarest, qui veut devenir maire et qui l’engage pour l’aider dans sa campagne. Mais quand il essaie de la séduire, elle s’enfuit et suggère à Carol que c’est elle qui devrait devenir maire de la ville. Sur ces entrefaites, Grampy survient et dit à Betty qu’elle doit revenir à Toon Town, qui va disparaître sans elle. Une fois de retour dans son monde en noir et blanc, elle est surprise de retrouver Dwayne, qui l’a suivie grâce à un système créé par Valentina qui lui permet de passer d’une dimension spatiale à une autre. Il lui avoue qu’il l’aime, lui donne un baiser, et soudainement l’univers de Betty est à nouveau rempli de couleurs.

Anastacia McCleskey, Angelica Hale, Jasmine Amy Rogers et Erich Bergen ©Matthew Murphy & Evan Zimmerman

Si cette histoire développée par Bob Martin peut sembler un peu simplette, il faut reconnaître que le spectacle, plein de rebondissements, de moments de choix et de chansons qui frappent, reste fort entraînant pendant tout le déroulement de l’action et très divertissant. Dans le rôle de Betty, Jasmine Amy Rogers est sensationnelle, et incarne l’héroïne avec beaucoup de charme, d’allure et surtout des attitudes qui convainquent par leur justesse et leur exactitude. Sur le plan vocal, elle est également extraordinaire, et notamment dans certains morceaux comme « Ordinary Day », « Why Look Around the Corner » et « Something to Shout About », admirablement stylisés par David Foster et Susan Birkenhead, respectivement compositeur et parolière.

Jasmine Amy Rogers ©Matthew Murphy & Evan Zimmerman

Elle est très bien entourée par Ainsley Melham, un jeune Australien plein de talent ; Faith Prince, actrice renommée à Broadway avec une douzaine de spectacles à son actif ; Stephen DeRosa, autre vétéran de la scène ; et Erich Bergen, plus connu pour sa participation à l’émission de télévision « Madam Secretary » et pour son rôle dans le film de Clint Eastwood Jersey Boys, sorti en 2014. Mais la véritable révélation de cette comédie musicale, c’est Angelica Hale, jeune actrice âgée de 17 ans, dans le rôle de Trisha, qui crève la scène (et l’écran), notamment par son jeu plein de maturité, sa voix prenante et son interprétation de « Portrait of Betty », chanson qui lui donne l’occasion de démontrer ses talents extraordinaires de chanteuse.

Au centre : Jasmine Amy Rogers, Anthony Melham, Erich Bergen, Anastacia McCleskey, Angelica Hale, Phillip Huber, Faith Prince et Stephen DeRosa ©Matthew Murphy & Evan Zimmerman

Sur le plan technique, tout dans cette œuvre s’accorde pour séduire la salle : les éclairages de Philip S. Rosenberg, les projections de Finn Ross, les costumes éclatants de Gregg Barnes, les décors de David Rockwell, et surtout la mise en scène souvent hilarante et la chorégraphie pleine d’allant dues à Jerry Mitchell. Boop! est un spectacle qui tient bien la route, souvent fort amusant, et qui devrait satisfaire les spectateurs, grands et petits. C’est une pépite de plus dans une saison vibrante et déjà particulièrement riche en spectacles intéressants.

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