« La passion fait la force », telle était la devise d’Annie Cordy, décédée aujourd’hui à l’âge de 92 ans.
On se souviendra d’elle toujours festive, rieuse, clown, d’une énergie inépuisable, dans des tenues extravagantes… Les années 80 ont été marquées par les inusables « Tata Yoyo » et « Cho Ka Ka O ». La décennie précédente aura déliré sur « La Bonne du curé » et « Frida oum papa ». À ces titres qui ont traversé des générations, il faudrait ajouter toutes les chansons – plus de 700 ? – qui l’ont rendue populaire dès ses débuts.
C’est la Belgique qui la voit naître en 1928, mais c’est la France qui l’adopte très vite. En 1952, elle est engagée pour l’opérette La Route fleurie de Francis Lopez aux côtés de Bourvil et Georges Guétary. Le succès, en 1956, du film Le Chanteur de Mexico, avec Luis Mariano et Bourvil lui ouvre les portes de l’Amérique, mais, dirigée par son impresario de mari, elle doit refuser les projets taillés sur mesure qu’on lui offre. Suivront sur scène deux opérettes, toujours de Lopez, Tête de linotte et Visa pour l’amour, cette dernière avec Luis Mariano. En 1965, poussée par Maurice Chevalier, elle crée une revue, Annie Cordy en deux actes et 32 tableaux, à la mise en scène très élaborée qui multiplie ballets et costumes. Elle retrouve Bourvil la même année pour Ouah ! Ouah ! avant de créer Pic et Pioche avec Darry Cowl en 1967.
En 1972, au théâtre Mogador, elle endosse le rôle-titre de la version française de Hello, Dolly!, la comédie musicale de Jerry Herman, (paroles et musique) sur un livret de Michael Stewart, dans une adaptation de Jacques Collard. Succédant à Carole Channing (création à Broadway en 1964) et à Barbra Streisand (film de 1969), elle évoque, toujours avec humour et les pieds bien sur terre, sa prise de rôle dans une interview conservée par l’INA.
À ce succès s’ajouteront ceux de Nini la chance de 1976 à 1978 au Théâtre Marigny et d’Envoyez la musique de 1982 à 1984 au Théâtre de la porte Saint-Martin.
Quelques lignes ne suffisent pas pour évoquer toute la richesse et la diversité de la carrière d’Annie Cordy : galas, revues, émissions de télévision, enregistrements de chansons, pièces de théâtre, tournage pour le cinéma et la télévision – y compris dans des rôles dramatiques –, doublage pour des dessins animés, publicités…
Mais, ce qu’elle préférait, c’était le music-hall, confiait-elle en 1998, pour ses cinquante années de carrière, au micro de Martin Pénet sur France Culture. D’ailleurs, cette même année, elle sortait un album consacré à des reprises en français de Broadway, comme « C’est beau de faire un show » (There’s No Business Like Show Business) ou « La Chanson d’Evita » (Don’t Cry for Me, Argentina).
Avec elle s’éteint un monstre sacré du music-hall (le dernier ?). La tristesse nous submerge aujourd’hui, mais, comme le chantait Annie, toujours gaie : « Ça ira mieux demain. »