Elvis

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Sortie au cinéma : le 22 juin 2022.
Durée : 2 heures 39 minutes.

Con­nu pour ses films grandios­es tels que Moulin Rouge ou encore Gats­by le mag­nifique, le réal­isa­teur Baz Luhrmann con­firme une nou­velle fois son goût pour le spec­ta­cle, le spec­ta­cle, et encore le spec­ta­cle… quoi qu’il en coûte. 

Pour le cinéaste, cela ne fait aucun doute : un bon spec­ta­cle s’obtient par la com­bi­nai­son de rythmes et de mou­ve­ments. Ses choix de réal­i­sa­tion sont dynamiques, intel­li­gents et, bien que le mon­tage reste agres­sif, nous arrivons à respir­er sur quelques plans joli­ment composés.

Ce n’est pas désagréable. C’est même diver­tis­sant, mais cela ne cache pas les lacunes d’écriture. Nous pou­vons con­sid­ér­er que le prob­lème majeur réside dans un scé­nario qui manque cru­elle­ment d’éléments solides pour com­pos­er une his­toire. 

Bien évidem­ment, si l’on imag­ine un film sur Elvis Pres­ley, nous pen­sons tout de suite à : 

 1/ des débuts difficiles ;

 2/ un suc­cès fulgurant ;

 3/ une descente aux enfers. 

Et c’est ce qu’on l’on voit.

Toutes les cas­es sont cochées, y com­pris la scène dans laque­lle sa com­pagne le quitte, fatiguée de vivre avec un homme accro aux médica­ments. Mais nous voyons venir ce moment de très loin, tout sem­ble trop prévisible.

Cer­tains diront : « Ce qui est intéres­sant, c’est la façon dont cela est mon­tré. » Certes, mais le plus impor­tant n’est-il pas l’an­gle adop­té pour racon­ter l’his­toire ? Si le réal­isa­teur avait prêté autant d’attention à struc­tur­er son scé­nario qu’il ne s’amuse à faire du zèle avec sa caméra, peut-être que les rebondisse­ments auraient gag­né en effi­cac­ité. 

Le plus irri­tant reste cette façon de pren­dre le pub­lic par la main pour s’assurer qu’il suit cor­recte­ment l’histoire. Le cinéaste nous a habitués – par exem­ple dans l’excellente série The Get Down (à voir sur Net­flix) – à moins infan­tilis­er le pub­lic, une habi­tude qui, n’ayons pas peur de le dire, est dev­enue une tare du ciné­ma d’aujourd’hui. 

L’humain qui se rend au ciné­ma com­prend les enjeux… humains. Tous les jours de sa vie, il est amené à jon­gler avec des émo­tions, des sen­ti­ments, des pas­sions, pourquoi donc répéter à l’en­vi – par­fois même après deux heures de film – qu’Elvis suit à tort les con­seils de son man­ag­er en dépit des nom­breuses mis­es en garde de sa femme, de sa famille et de ses amis ? Le pub­lic l’a com­pris dès le départ. Il aurait été intéres­sant d’ap­porter de la nuance dans cet élé­ment dramaturgique.

Notons que la façon dont le per­son­nage de Tom Han­ks manip­ule la famille Pres­ley – notam­ment lorsqu’il sug­gère que la fonc­tion de busi­ness man­ag­er devrait être assurée par le père, alors que ce dernier n’a aucune com­pé­tence en la matière – est un axe intéres­sant de l’histoire qui est délais­sé … et c’est bien dom­mage. Il serait certes fas­ti­dieux de mon­tr­er cor­recte­ment à l’écran com­ment, par la flat­terie et la sub­til­ité des for­mules de lan­gages qu’il utilise, le man­ag­er arrive à ses fins. Con­crète­ment, cela aurait demandé un plus gros effort de réécri­t­ure dans une indus­trie où le temps est un luxe. 

Il est quand même appré­cia­ble de not­er la qual­ité de la bande orig­i­nale, un aspect sur lequel les films de Baz Lurhmann ne déçoivent jamais. Soit un mélange respectueux de morceaux d’Elvis accom­pa­g­nés de touch­es anachroniques. Men­tion spé­ciale pour l’ajout de drill – ce style de rap provenant de Chica­go et aujourd’hui très à la mode – et par­ti­c­ulière­ment pour la par­tic­i­pa­tion de Doja Cat avec son titre « Vegas » qui sur­passe haut la main les flows et les rimes d’un Eminem sat­is­faisant, mais dont le morceau com­posé pour le générique n’a rien de transcendant.

Les deux heures et trente-neuf min­utes de film offrent mal­gré tout une jolie asso­ci­a­tion de musiques et d’images qui ne saurait être totale­ment appré­ciée qu’en salle. C’est peut-être une chose que l’on peut con­céder à ce film à grand spec­ta­cle qui jus­ti­fie le fait de s’enfermer dans une salle noire – par­fois non cli­ma­tisée – en plein mois de juillet.

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