Au cabaret, on a tous les droits.
On y chante les tilleuls verts de Rimbaud, on se déhanche sur Cole Porter, Proust est ivre de jalousie, Phèdre rappe avec passion, Barbara y côtoie Nirvana, les Spice Girls, les Beatles, le tout mêlé de compositions originales.
Mère et fille se jouent des conventions.
Un spectacle insolite, joyeux et sensible, qui fait la part belle à l’humour et l’amour.
La vie est un cabaret ! Bienvenue au cabaret !
Notre avis : Défini par ses auteurs comme une « fantaisie musicale délicieusement insolite », ce Petit Cabaret tient toutes ses promesses. Pour y accéder il vous faut gravir les innombrables marches qui débouchent au paradis du Lucernaire, salle minuscule où nombre de spectacles admirables ont été programmés. Tout d’abord, ne pas s’arrêter sur le premier tableau, qui peut laisser craindre un humour facile (la fille interprète avec talent « Fever », la mère passe, à chaque refrain, avec un panneau “Fièvre” et fait mine de se brûler) puisque les numéros suivants seront enchanteurs, provoquant tantôt un rire tendre, tantôt une émotion contenue.
D’autant que les trouvailles sont légion dans le choix des chansons, certaines originales écrites par la jeune auteure-compositrice Émilie Bouchereau, mais aussi des textes (un délice d’entendre Béatrice Agenin interpréter le poème de Rimbaud “On n’est pas sérieux quand on a dix-sept ans” ou un extrait proustien de La Recherche). Sa fille joue de la complicité avec Benjamin Corbeil à la batterie, en interprétant “Les Bêtises”, succès ancien de Sabine Paturel. Sans parler de ce qu’il est permis de considérer comme l’acmé de la représentation : cette valise contenant un décor de théâtre qui permet aux deux interprètes d’évoquer Roméo et Juliette. Un pur moment de poésie. La malice accompagne les deux femmes, sans oublier les deux musiciens. La scénographie, d’une belle élégance, habille ce spectacle plus que séduisant.
La salle était pleine lorsque nous l’avons vu et, à la fin de la représentation, lorsque des spectatrices enthousiastes chantent avec les artistes, qui les encouragent avec un sourire ravi, “La Tendresse” – titre immortalisé tant par Bourvil que par Marie Laforêt –, on se prête à penser que ce moment résume bien ce spectacle : faussement léger et généreux de cette tendresse dont nous avons tant besoin.