Bruxelles — Kafka, les années Felice (Critique)

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Inter­pré­ta­tion : Antho­ny Sour­deau, Léonor Bailleul, Nico­las Dori­an, Paul Géri­mon, Nicole Colchat, Sophie Jonniaux
Ecri­t­ure et mise en scène : Alex­is van Stratum
Paroles : Xavier Mouffe
Musique : Lea Petra
Choré­gra­phies : Angela Gon­za­lez Sanchez
Scéno­gra­phie : Cécile Balate
Cos­tumes : Sarah Duvert
Assis­tante à la mise en scène : Lat­i­fa Sedati
Créa­tion lumières : Isabelle Simon
Pianiste : Mar­i­ano Ferrandez
Chargée de dif­fu­sion : Carine Cordier
Un spec­ta­cle de la com­pag­nie Querelle en copro­duc­tion avec Ars Lyri­ca. Avec le sou­tien du Théâtre de la Vie

Résumé : Prague 1912, Franz Kaf­ka a 29 ans et vit tou­jours chez ses par­ents avec lesquels il main­tient une rela­tion ten­due. Il tra­vaille pour la com­pag­nie d’assurances con­tre les acci­dents du tra­vail et la nuit, il écrit.  Un jour, il fait la con­nais­sance de Felice Bauer avec qui il entre­tient une rela­tion prin­ci­pale­ment épis­to­laire pen­dant 5 ans. Attrac­tion, répul­sion, dépen­dance, indé­ci­sion, dés­espoir, angoisse face à l’engagement, sen­ti­ments de cul­pa­bil­ité et mépris de soi sont les prin­ci­pales thé­ma­tiques de leurs let­tres. Cette étrange liai­son ne serait qu’anecdotique si elle n’avait pas été à la base de l’écriture des plus grandes oeu­vres de l’écrivain : le Ver­dict, la Méta­mor­phose et surtout le Procès.
Kaf­ka, les années Felice est un spec­ta­cle musi­cal biographique inédit sur l’œuvre et la vie d’un des plus grands écrivains du XXème siè­cle. Créé en mai 2015 au Théâtre de la Vie, six acteurs et un pianiste revi­en­nent sur scène pour soutenir une propo­si­tion orig­i­nale inclu­ant théâtre, musique et danse. Ils don­nent corps à toutes les émo­tions intimes de l’auteur et au réal­isme mag­ique dans son œuvre. Alex­is van Stra­tum pour­suit avec ce spec­ta­cle son ques­tion­nement per­son­nel sur la part névrosée, irra­tionnelle et incon­sciente chez l’Homme.

Notre avis : C’est à Brux­elles que s’est joué récem­ment Kaf­ka, les années Felice, spec­ta­cle musi­cal ambitieux abor­dant la vie de l’au­teur de La Méta­mor­phose à tra­vers un prisme pré­cis, celui de sa rela­tion avec Felice Bauer. En 1912, à Prague, Kaf­ka est un jeune homme,  mal assuré, qui écrit mais tra­vaille dans une com­pag­nie d’as­sur­ances pour faire plaisir à ses par­ents, chez qui il vit tou­jours, à 29 ans. Un soir, il ren­con­tre Felice, la cou­sine de son meilleur ami Max. Dès lors, un lien unique s’in­stau­re, ten­dre, vio­lent, com­plice, orageux… Leur rela­tion sera prin­ci­pale­ment épis­to­laire mais leur cor­re­spon­dance sera loin d’être plate et monot­o­ne. Jouant sans cesse au chat et à la souris, souf­flant tan­tôt le chaud, tan­tôt le froid, Kaf­ka est un amoureux tor­turé, com­plexe, cru­el et à tra­vers l’homme, se révèlera l’au­teur, l’artiste, tout aus­si rich­es en contradictions.
Avec ce traite­ment musi­cal, Alex­is van Stra­tum (mise en scène et livret), Xavier Mouffe (paroles) et Lea Petra (musique) pro­posent un point de vue orig­i­nal, où les chan­sons per­me­t­tent par­fois d’en­tr­er dans l’in­time de cet homme, par­fois de jeter un regard sur le con­texte de l’époque. Dans une mise en scène épurée, avec une scéno­gra­phie sobre et élé­gante, le spec­ta­cle déroule plusieurs années d’une vie intense et d’une rela­tion tumultueuse incar­nées par six comé­di­ens chanteurs, accom­pa­g­nés d’un pianiste. L’at­mo­sphère — tant musi­cale que visuelle — intrigue, dis­tille un spleen lanci­nant, prélude, peut-être, à une (re)découverte de l’œuvre de cet auteur majeur.
Après La Mélodie du Bon­heur et Un vio­lon sur le toit (Ars Lyri­ca), Evi­ta (Fes­ti­val Brux­el­lons) et aujour­d’hui Kaf­ka, les années Felice (Querelle / Ars Lyri­ca), la cap­i­tale belge pour­rait peut-être bien nous sur­pren­dre dans le domaine du théâtre musical.