De John Kander, Fred Ebb et Bob Fosse
Avec : Carien Keizer (Roxie Hart), Sofia Essaïdi (Velma Kelly), Jean-Luc Guizonne (Billy Flynn), Sandrine Seubille (Matron “Mama” Morton), Pierre Samuel (Amos Hart), V. Petersen et A. Conquet (Mary Sunshine).
Ensemble : Clément Bernard-Cabrel, Alexandre Bernot, Max Carpentier, Salomé Dirmann, José Antonio Dominguez Dominguez, Alex Freï, Emmanuelle Guélin, Fleur Jagt, Vivien Letarnec, Léo Maindron, Loïc Marchi, Mélina Mariale, Dorit Oitzinger, Marianne Orlowski, Malory Pacevicius, Alain Tournay et Rachel Valéry.
Résumé : Au cœur des années 20, à Chicago, Roxie Hart, une artiste de cabaret, tue son amant. En prison, elle est confrontée à Velma Kelly, double meurtrière mais surtout, chanteuse de jazz et idole de Roxie. Grâce à un avocat roué –Billy Flynn– les deux femmes trouveront la voie de la liberté et celle du succès.
Chicago est un show emblématique de Broadway, ses airs jazzy, ses chorégraphies spectaculaires, sa modernité et son ambiance « sulfureuse » en font un show à part, d’une folle exigence artistique.
Notre avis : Après Grease, c’est au tour d’un musical définitivement sulfureux de se produire sur les planches du théâtre Mogador : Chicago. Rangez la gomina et sortez les fedoras et les bas-résilles, Stage Entertainment propose un spectacle à contre-courant de son prédécesseur Grease, et ce dès le lever de rideau.
Il ne faut pas plus de quelques secondes pour comprendre que la danse est un personnage à part entière de Chicago, avec un ensemble éclectique mais à la technique parfaite. La chorégraphie créée par Ann Reinking à partir du style de Bob Fosse est à la fois impressionnante dans son détail, hypnotisante, bien entendu sulfureuse, et va appuyer le comique grinçant de ce Chicago carcéral des années 20.
Les personnages principaux ne sont pas en reste et Carien Keizer, rompue au rôle de Roxie qu’elle a joué en Allemagne, la retransmet avec une légèreté et un charme particulier dans sa version française, son accent ajoutant au personnage sans pour autant y perdre à la compréhension. Sofia Essaïdi, seconde tête d’affiche dans le rôle de Velma Kelly tire également son épingle du jeu avec une aisance remarquable tant vocalement que physiquement tandis que Jean-Luc Guizonne met dans sa voix toute l’autorité et la force que transpire son personnage Billy Flinn. Mention se doit d’être faite aux seconds rôles puisque ce musical ne pourrait être complet sans eux, avec une Mama Morton campée par Sandrine Seubille dont les graves résonnent délicieusement. Pierre Samuel transporte le spectateur entre rire et émotion pure, sur cette limite fragile qui rend le rôle d’Amos Hart si compliqué à jouer mais essentiel à l’essence-même de Chicago. Enfin, la journaliste Mary Sunshine, jouée par V. Petersen, impressionne par sa décontraction dans un rôle si ambigu avec des aigus clairs et précis.
Le dernier personnage à part entière n’est pas des moindres puisqu’il s’agit de l’orchestre dirigé par Dominique Trottein, visible tout au long du spectacle puisqu’il est installé sur une grande partie de la scène. Les aficionados du son chaud du jazz des années 20 seront comblés et les réactions fusent à plusieurs reprises dans le public.
Le décor et la mise en scène respecte ainsi celle du revival de 1996 à Broadway et pourrait déconcerter un public n’ayant vu que le film de Rob Marshall. Le minimalisme est ainsi de rigueur, sans artifice ni changement de costume superflus. Le Théâtre Mogador retrouve également un musical entièrement adapté en français, a contrario de Grease, et cette adaptation de Nicolas Engel fonctionne sans accroc. C’est dans cet écrin que les artistes proposent un spectacle touchant, drôle, glamour et à la danse envoûtante.