La La Land

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1948

« Tri­om­phe absolu », « chef‑d’œuvre », « film de l’année »… Il est dif­fi­cile de décou­vrir La La Land sans a pri­ori après des cri­tiques aus­si dithyra­m­biques, un bouche-à-oreille si ent­hou­si­aste et une pro­mo­tion qui a déjà décryp­té la moin­dre référence du nou­v­el opus de Damien Chazelle (Whiplash). Entre les Gold­en Globes obtenus et avant le déluge d’Oscars atten­du, com­ment se forg­er une opin­ion affranchie de l’adhésion col­lec­tive qua­si unanime ? Sans doute en se lais­sant porter et en évi­tant de trop l’intellectualiser. L’ouverture et l’épilogue jus­ti­fieraient à eux seuls le déplace­ment tant ils asso­cient maîtrise tech­nique, poésie et vir­tu­osité. Entre les deux, l’histoire d’amour peut paraître sim­pliste, mais ce serait oubli­er qu’on y par­le aus­si de la con­fi­ance en soi, de la con­di­tion d’artiste et de la dif­fi­cile con­cil­i­a­tion entre rêve et réal­ité. On y par­le aus­si d’art, et tout par­ti­c­ulière­ment du sep­tième. En effet, tout le monde l’a relevé, La La Land four­mille de références et d’hommages en tous gen­res, mais aus­si à tous domaines. On y sent con­stam­ment l’inspiration de Demy, Min­nel­li ou Donen dans les séquences musi­cales, mais aus­si d’Ed­ward Hop­per pour l’ambiance et la pho­togra­phie, ou Michel Legrand dans la musique, pour n’en citer que quelques-uns. Loin d’être pon­tif­i­ant, Chazelle con­voque ses clins d’œil avec admi­ra­tion, respect et une bonne dose d’humilité ; il n’est donc pas indis­pens­able de pos­séder toute la cul­ture d’un cinéphile aver­ti pour appréci­er le film. En out­re, en reprenant les codes clas­siques sans nos­tal­gie, il réus­sit le pari de réalis­er une œuvre d’une moder­nité indé­ni­able, notam­ment grâce au cou­ple Emma Stone-Ryan Gosling, par­fait jusque dans (ou grâce à) ses imper­fec­tions. Il ne les trans­forme pas en Cyd Charisse ou Fred Astaire mais leur en insuf­fle juste l’esprit, en n’oubliant jamais d’instiller de l’humour dans son traite­ment. La réus­site du film provient sans doute juste­ment de l’harmonie entre la réal­i­sa­tion ciselée, les références assumées aux chefs‑d’œuvre et le recul pris vis-à-vis de ces derniers. Enfin, on ne peut évidem­ment pas évo­quer La La Land sans par­ler de la musique, cen­trale dans le fond et dans la forme. Justin Hur­witz signe une bande orig­i­nale assez épous­tou­flante qui oscille elle aus­si entre l’âge d’or du musi­cal et les sons actuels. Les mélodies entê­tantes ryth­ment le pro­pos avec per­ti­nence et enchantent la romance. Peu de bémols donc pour un film que d’aucuns con­sid­èrent d’ores et déjà comme un phénomène.