Le Jeu d’Anatole ou les Manèges de l’amour

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Le Lucernaire - 53, rue Notre-Dame-des-Champs, 75006 Paris.
Du 13 octobre au 28 novembre 2021 – Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 15h ou 17h.
Renseignements et réservations sur le site du Lucernaire.

À tra­vers les sou­venirs d’une Vienne intem­porelle, Ana­tole nous emmène de 1910 à 1990 dans le tour­bil­lon du jeu de l’Amour. En adap­tant Schnit­zler et en lui don­nant pour com­pagnons de voy­age les plus célèbres airs d’Of­fen­bach, Tom Jones nous donne ici à voir cinq « vic­times » de cet avan­tageux tableau de chas­se. Femmes désirées, con­quis­es ou fan­tas­mées, qu’im­porte qu’elles aient toutes le même vis­age puisqu’elles ne sont que les facettes de la femme idéale, rêvée par Anatole.

Notre avis : Au pre­mier abord, Le Jeu d’Anatole est un spec­ta­cle un peu déroutant ; con­stru­it en saynètes, on assiste plus à suc­ces­sion de tranch­es de vie qu’à une réelle his­toire. Hormis les deux pro­tag­o­nistes prin­ci­paux, qui sont tou­jours les mêmes, on a du mal à faire le lien entre les scènes. Mais petit à petit, on se laisse pren­dre au jeu (c’est le cas de le dire !) et l’on com­prend vite que tout tourne autour d’un seul et même thème : le rap­port d’un séduc­teur avec les femmes. Le per­son­nage évolue, mûrit, vieil­lit, et son his­toire qui s’étale sur tout le XXe siè­cle, au tra­vers de ses con­quêtes, n’est qu’une réflex­ion sur la séduc­tion, voire une quête de la femme idéale.

La scéno­gra­phie de Nat­acha Markoff arrive, par des élé­ments de décors évo­lu­tifs, à trans­former le plateau en quelques sec­on­des pour faire des sauts de vingt ans en vingt ans au fil du spec­ta­cle. Elle parvient à retran­scrire par­faite­ment l’atmosphère d’une époque, que ce soit l’austérité des années 30 ou le psy­chédélisme des années 70.

Gaé­tan Borg et Yann Sebile inter­prè­tent Ana­tole et Max avec une telle sincérité qu’ils ren­dent l’amitié indé­fectible des deux per­son­nages très touchante. Mais c’est surtout Mélodie Moli­naro et Guil­laume Sorel qui ont l’occasion de faire une démon­stra­tion de leur tal­ent en inter­pré­tant une grande var­iété de per­son­nages. La pre­mière endosse les rôles de toutes les femmes séduites par Ana­tole ; tan­tôt retenue, tan­tôt délurée, elle donne une réelle pro­fondeur à tous ses per­son­nages, même les plus fan­tasques. Guil­laume Sorel, lui, joue les util­ités avec dis­cré­tion et finesse, et finit en apothéose avec un octogé­naire par­ti­c­ulière­ment truculent.

Les musiques des chan­sons sont toutes puisées dans le réper­toire d’Offenbach sur lesquelles de nou­velles paroles ont été écrites. La plu­part des mélodies sont extraites de La Péri­c­hole, mais on y retrou­ve aus­si l’air du Brésilien de La Vie parisi­enne, « Le Juge­ment de Pâris » de La Belle Hélène ou encore la Bar­carolle des Con­tes d’Hoffmann… Les adap­ta­tions musi­cales col­lent aux épo­ques. Elles sont aus­si bien réussies dans le style des chan­sons réal­istes de l’entre-deux-guerres que dans le rock élec­trique façon Queen des années 70. C’est la grande orig­i­nal­ité de ce spec­ta­cle. Tout cela est fait dans le même état d’esprit qu’Elvis Pres­ley chan­tant « Tonight Is So Right for Love » sur la Bar­carolle dans le film G.I. Blues et cela fonc­tionne très bien. Les textes sont soignés et l’accompagnement au clavier de Sébastien Ménard s’intègre par­faite­ment à la mise en scène d’Hervé Lewandowski.

Vous aus­si, lais­sez-vous séduire par Anatole !

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