« Bien que cette adaptation de la nouvelle de Fitzgerald soit en quelque sorte une lettre d'amour à ma patrie cornouaillaise, ce n'est pas vraiment la maison à laquelle je fais référence. Je ne parle pas de chez-moi au sens de briques et de mortier, d'une maison, d'un village ou même d'un pays, mais de chez-moi au sens d'un endroit où nous nous sentons appartenir. Un endroit où nous pouvons être nous-mêmes. Un endroit où nous pouvons trouver un sanctuaire. Un endroit où nous pouvons aimer et être aimés. C'est l'histoire d'un homme qui naît à la fin de sa vie, plutôt qu'au début. Mais, pour moi, c'est plus simplement l'histoire de quelqu'un qui cherche sa place dans le monde, qui cherche un endroit où appartenir. Sous la magie et le conte de fées, c'est l'histoire de quelqu'un qui est différent. Quelqu'un qui croit que ces différences l'empêcheront d'atteindre ce qu'il veut dans la vie. La vie de Benjamin Button est unique, mais sa quête d'un endroit où se sentir chez soi est universelle. Ce qui m'est apparu clairement, c'est que ce quelque part se trouve rarement dans un lieu, mais plutôt chez d'autres personnes, ou peut-être chez une autre personne. »
Note de Jethro Compton (adaptateur et metteur en scène)
Notre avis : On connaît le film de 2008 avec Brad Pitt et, lorsque The Southwark Playhouse (Off West End) annonce en 2019 une adaptation par Jethro Compton en comédie musicale, nous étions curieux de découvrir ce spectacle. Après une courte exploitation, il était repris en 2023 et, en raison d’un énorme succès (meilleure production musicale aux Off West End Award en 2024), il se joue maintenant dans le West End.
Comment ce qui est à l’origine une nouvelle de F. Scott Fitzgerald parue en 1922 et racontant la vie de Benjamin Button né à l’âge de 70 ans a-t-il pu être transposé sur scène en comédie musicale ? Disons-le de suite : le pari est plus que réussi !
L’adaptation de Jethro Copton est d’une étonnante fluidité et on est happé par cette mystérieuse histoire. On oublie très rapidement le film pour se plonger dans cette magnifique aventure. F. Scott Fitzgerald situait la nouvelle dans l’Amérique du milieu du XIXe siècle, Jethro Copton la transpose dans une ville du bord de mer en Cornouailles en 1918.
Le splendide décor à plusieurs niveaux, signé par le metteur en scène, sera tour à tour la maison de Benjamin Button, port de pêche, un bar, une plage… grâce aux somptueux éclairages de Zoe Spurr.
Mais ce qui fait (aussi) la force de ce spectacle, c’est une troupe exceptionnelle. John Dagleish est un Benjamin Button attachant qui passera avec maestria d’un petit vieux de 70 ans à un adolescent à la fin de l’histoire et, pour cela, pas de maquillage ou de changement de costume : tout est dans la gestuelle et le travail du comédien. Face à lui, Clare Foster incarne superbement la seule femme qu’il aimera. Leur duos sont d’une force éblouissante.
Il faudrait également citer tous les autres interprètes car, dans cette production, pas d’orchestre dans la fosse : tous les comédien.ne.s jouent d’un ou plusieurs instruments, chantent, dansent… de façon époustouflante ! Ils et elles sont tour à tour narrateur.trice.s et jouent tous les rôles de cette histoire fantastique. Toute la troupe a une énergie folle et communicative.
Les musiques aux accents irlandais de Darren Clark, alternant ballades et numéros dansants, constituent une partition très agréable et qui accompagnent très justement les différents événements de la vie de Benjamin Button.
Vous l’aurez compris : The Curious Case of Benjamin Button, à juste titre sous-titré an unordinary musical est un spectacle d’une belle originalité (loin des grosses machines londoniennes) à voir en ce moment à Londres.
