Si vous suivez de près (ou même de loin !) la communauté de Broadway sur les réseaux sociaux, vous avez sûrement vu passer quelques-unes de ces centaines de vidéos d’artistes explosant d’énergie sur la chorégraphie haletante et bondissante du morceau « Legally Blond Remix ».
@meganbowen__ @munymagic HERES MY LEGALLY BLONDE AUDITION!! Who would you cast me as? ?#legallyblonde #themuny #legallyblondethemusical #broadway #broadwaydancer
À l’origine, ces images sont uniquement destinées aux directeurs de casting de The Muny, un festival d’été qui a lieu à Saint-Louis, dans le Missouri, depuis plus d’un siècle – avec ses 11 000 places en amphithéâtre, il s’agit du plus grand festival à programmer uniquement un répertoire de musicals dans le style de Broadway. Se filmant dans des studios de danse new-yorkais, dans leur petit appartement ou même en plein air, ces danseurs énergiques enchaînent promptement les mêmes mouvements chorégraphiés par William Carlos Angulo, ponctués de poings en l’air et de sauts en tous genres.
Aux États-Unis, les auditions étant quasiment toutes devenues virtuelles en raison de la pandémie, les artistes doivent en effet désormais enregistrer des selftapes pour postuler.
@jjniemann this one was so fun… and absolutely killed me ? DC: @munymagic #dance #dancer #dancing #audition #legallyblonde #broadway #actor #musical #theatrekid
Cette chorégraphie a toutefois eu un effet inattendu, passant d’un dance call plutôt classique à un buzz national initié par des ambassadeurs de la communauté broadwaysienne, comme JJ Niemann, Megan Bowen et d’autres qui ont publié leur selftape sur les réseaux sociaux. Cette séquence est devenue de ce fait une vraie tendance sur la plateforme Tik Tok – un phénomène viral qui a aussi suscité de nombreuses conversations.
Au centre de celles-ci : la polémique sur le fait de rendre publiques des vidéos par principe strictement destinées à l’équipe créative du spectacle. S’en sont suivis de nombreux débats sur le fait que ces vidéos révèlent le contenu du spectacle en avant-première sans que les candidats n’en détiennent la propriété intellectuelle, ou sans que les créateurs ne soient mentionnés ni que des droits ne leur soient versés.
Dans le cas de The Muny, l’organisation avait bien précisé qu’il était possible de partager la séquence sur les réseaux sociaux, mais c’était sans s’attendre à un tel engouement de la part de la communauté et au-delà ! L’enchaînement est devenu un véritable challenge que de nombreux utilisateurs de ces plateformes s’amusent à relever, sans même postuler à l’audition.
@fintothewoods Just to clarify we are NOT dancers…? #legallyblonde @munymagic #themuny #fyp @official_orfeh #fintothewoods #audition #broadway #theatrekid #musicals #musicaltheatre #westend
@melcabey Honestly she nailed this
Michael Baxter, adjoint artistique de The Muny, s’enthousiasme des heureuses conséquences de ces castings virtuels : « Nous cherchons actuellement à distribuer 94 des rôles encore disponibles cette saison. En ajoutant les candidatures vidéo reçues cette année, le nombre de postulants adultes est de 2 700. C’est le plus grand taux de participation de notre histoire ! »
Angulo, le chorégraphe, explique avoir pensé avant tout aux artistes en créant cette chorégraphie, afin qu’ils s’amusent en filmant leur candidature – tâche souvent ressentie comme très lourde, stressante et chronophage. Il affirme être honoré et fier d’avoir inspiré ces nombreux artistes et de les avoir rendus satisfaits de leur travail au point de partager le résultat sur Internet – surtout en ces temps de crise incertains. Concernant le débat qui s’en est suivi, il ajoute que ces questions sont importantes, tout comme les conversations qu’elles font naître.
JJ Niemann, la star de Tik Tok et swing (doublure pour les ensembles) dans The Book of Mormon à Broadway, s’est exprimé dans une story Instagram à la suite de la polémique que le phénomène a engendrée. Il explique que, lorsque la compagnie autorise le partage, il est plus que légitime de le faire. Les artistes n’ayant plus d’endroit où se retrouver les uns avec les autres, puisque les auditions n’ont plus lieu dans les studios, il est intéressant de pouvoir voir le travail de chacun sur Internet. De plus, apprendre la chorégraphie, la travailler, l’incarner, la filmer, représentent un travail énorme, non rémunéré, et dont ils ne sont pas sûrs de voir les retombées. Il incite donc à s’en servir comme contenu pour leur compte, puisque, désormais, il est primordial pour les artistes d’être visibles sur les réseaux sociaux. Puisque la crise les a immobilisés et empêchés de jouer sur scène, devant un public, il affirme que de pouvoir travailler sur une séquence chorégraphique, la peaufiner afin d’en être fier et la partager sur les réseaux sociaux est plutôt salutaire. Il finit par expliquer que le plus gros des avantages bénéficie finalement au spectacle qui est sous le feu des projecteurs sur toutes les plateformes depuis l’ouverture des auditions.
Finalement, ces partages viraux permettent à tout un chacun d’endosser la fonction de casting director et de composer sa distribution parfaite. Il vous suffit de chercher #munyaudition sur n’importe quelle plateforme et de faire défiler les centaines de vidéos partagées sur le Net. Amusez-vous, c’est un puits sans fond ! Angulo assure en tout cas sur Broadway World que les chorégraphies seront explosives et que le cast sera sûrement formidable au vu de la richesse des propositions qu’ils ont pu recevoir.