The Outsiders

0
1617

Bernard B. Jacobs Theatre – 242 West 45th Street, New York.
Première le 11 avril 2024.
Renseignements sur le site officiel du spectacle.

Inspirée du roman éponyme de S.E. Hin­ton pub­lié en 1967 et de son adap­ta­tion au ciné­ma réal­isée par Fran­cis Ford Cop­po­la en 1983, la nou­velle comédie musi­cale The Out­siders est une révélation.

Elle met en scène deux groupes de jeunes, les Greasers, lais­sés pour compte, et les Socs, d’un niveau social plus élevé, qui se dis­putent non pas le même ter­ri­toire mais leur posi­tion dans la société.

La troupe ©Matthew Miller

Revue et adap­tée par Adam Rapp et Justin Levine – ce dernier égale­ment auteur des chan­sons avec Jonathan Clay et Zach Chance du groupe tex­an Jamestown Revival –, la pièce évoque irré­sistible­ment West Side Sto­ry, le spec­ta­cle créé en 1957 par Leonard Bern­stein et Stephen Sond­heim et mis en scène par Jerome Rob­bins. Comme c’était déjà le cas dans cette œuvre iconique, elle oppose deux gangs, mais ici, l’un est issu des milieux ouvri­ers tan­dis que l’autre affiche sa supéri­or­ité dans le domaine social et intel­lectuel. Il n’empêche : la rival­ité qui les oppose per­met à l’action de pren­dre toute la mesure du con­flit qui existe entre ceux qui ont accès à une édu­ca­tion solide, une posi­tion de choix dans la société et un avenir garan­ti, et ceux pour qui le futur est aus­si terne que leur pro­pre exis­tence, les out­siders du titre.

The Out­siders ©Matthew Miller

Pony­boy (Brody Grant), un jeune ado­les­cent qui rêve de devenir un héros comme l’acteur Paul New­man, dont il admire les films, vit avec ses deux frères un peu plus âgés, Dar­rel (Brent Com­er) et Sodapop (Jason Schmidt), depuis que leurs par­ents sont morts dans un acci­dent. Il appar­tient à un groupe d’autres ado­les­cents comme lui, sans grand espoir de réus­sir dans la vie, qui, en rai­son de leurs cheveux mal peignés, ont été bap­tisés les « Greasers » par un autre groupe, les « Socs », qui se tar­guent de leur posi­tion dans la société bien au-dessus de celle des mal­heureux qui traî­nent dans les rues, et dont le chef de file est Bob, arro­gant et sûr de son avenir.

The Out­siders ©Matthew Miller

Quand, au cours d’une ren­con­tre inopinée, Pony­boy et son meilleur copain, John­ny, font la con­nais­sance de Cher­ry (Emma Pittman), la petite amie de Bob, il n’en faut pas plus à ce dernier pour vouloir remet­tre son rival à sa place, mais John­ny prend la défense de Pony­boy et tue Bob. Avec l’aide d’un autre copain, Two-Bit (Daryl Tofa), Pony­boy va se cacher dans une église désaf­fec­tée pour échap­per aux Socs, qui veu­lent venger Bob, et à la police qui le recherche. John­ny les rejoint mais alors qu’ils s’apprêtent à ren­tr­er chez eux, un incendie se déclenche dans l’église et men­ace un groupe d’enfants venus la vis­iter. Pony­boy et John­ny les sauvent, mais une poutre endom­magée tombe sur John­ny ; griève­ment blessé, il meurt à l’hôpital.

Déprimé par tout ce qui s’est passé et se sen­tant grande­ment respon­s­able, Pony­boy est encour­agé par ses frères à repren­dre le dessus et à sur­mon­ter cette épreuve. Ils sont sec­ondés par Cher­ry qui est opposée à la rival­ité entre les deux gangs et à l’attitude de Bob à l’égard de Pony­boy, à qui elle vient dire adieu.

Ent­hou­si­as­mant dans son traite­ment et son expres­sion, le spec­ta­cle se révèle prenant et pas­sion­nant, en dépit de cer­tains moments moins con­va­in­cants à refléter les sen­ti­ments des per­son­nages. Mais il faut recon­naître que les acteurs, dont cer­tains font leurs pre­miers pas à Broad­way, se mon­trent tou­jours à la hau­teur de leurs tal­ents pro­fes­sion­nels, tout en don­nant l’impression d’être encore des adolescents.

The Out­siders ©Matthew Miller

En tête de liste, Brody Grant donne à Pony­boy la pro­fondeur recher­chée d’un jeune féru de con­nais­sances qui dépassent l’entendement de ses copains (il lit Autant en emporte le vent et cite des poèmes de Robert Frost) ; par­mi ceux qui l’entourent, Sky Lako­ta-Lynch se dis­tingue dans le rôle de John­ny, ain­si que Daryl Tofa sous les traits de Two-Bit. Dans le rôle de Bob, Kevin William Paul mon­tre beau­coup d’assurance et est sou­vent bien sec­ondé par Emma Pittman (Cher­ry) à ses côtés. Par­mi les autres acteurs dont les tal­ents sont égale­ment d’un niveau très pro­fes­sion­nel, Brent Com­er et Jason Schmidt don­nent aus­si le relief néces­saire aux frères de Pony­boy dans leurs cour­tes interventions.

Mais ce qui frappe le plus dans cette pro­duc­tion pleine de rebondisse­ments, c’est le réal­isme apporté aux effets scéniques créés par Jere­my Cher­nick et Lil­lis Meeh – un orage qui inonde la scène et les acteurs, un incendie qui se répand dans les con­fins de l’église en feu — ain­si que la scéno­gra­phie sobre de Amp et Tatiana Kahvegian.

The Out­siders ©Matthew Miller

Quant aux chan­sons com­posées par Jonathan Clay et Zach Chance du groupe Jamestown Revival et Justin Levine, elles accrochent les oreilles et don­nent au spec­ta­cle une solid­ité musi­cale et théâ­trale qui lui sied. La choré­gra­phie des frères Kup­per­man, Rick et Jeff, qui s’inspire du tra­vail du légendaire Jerome Rob­bins tout en s’éloignant des visions fréquentes à Broad­way, est sou­vent stupé­fi­ante avec ses mou­ve­ments et inven­tions sou­vent emprun­tés aux vidéos de rock, le tout sous le con­trôle du met­teur en scène Danya Taymor.

Tous ces élé­ments font de The Out­siders un spec­ta­cle qui tient bien la route et est très bien agencé du début jusqu’au rideau final.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici