Eutrot

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Comédie Nation – 77, rue de Montreuil, 75011 Paris.
Du 20 novembre au 5 décembre 2021 à 14h30. Durée 45 min. Tarifs 12€ / 10€.
Infos et réservations sur le site de la Comédie Nation – 01 48 05 52 44.

Eutrot (« Tortue » à l’en­vers) est l’his­toire d’un homme très timide, d’une femme très gen­tille et d’une petite tortue appelée Alf. Ama­teur fleuriste, M. Toupie tombe fou amoureux de sa voi­sine Mme Sylvestre, qui ne vit que pour sa tortue Alf et voudrait qu’Alf gran­disse rapi­de­ment. M. Toupie de son côté voudrait inviter sa voi­sine à pren­dre un thé mais il n’ose jamais pass­er le cap. Est-il pos­si­ble qu’Alf, la petite tortue pas­sion­née de salades et de tomates soit la clef de la porte qui s’ou­vri­rait vers le cœur de Mme Sylvestre ? M. Toupie essaierait tous les moyens, par­fois absur­des et par­fois « mag­iques » pour pou­voir aider Mme Sylvestre, les deux per­son­nages se rejoignant autour d’un pro­jet com­mun : faire grandir Alf. Mais quel projet !

Notre avis : Une petite pépite est encore au pro­gramme de la Comédie Nation le 4 et le 5 décem­bre prochain à 14h30. Courez‑y accom­pa­g­né ou non d’enfants. Si cette pièce est de prime abord pour le jeune pub­lic, les plus grands en ressor­tiront enchan­tés. L’humour et la sub­til­ité en sont la clé. L’histoire est adap­tée d’une nou­velle de Roald Dahl (Char­lie et la Choco­la­terie, Matil­da). Elle nous séduit, nous émeut et nous fait rire. Madame Sylvestre et Mon­sieur Toupie nous font entr­er dans leur univers plein de pudeur et de gêne. Ce dernier, fou amoureux de sa voi­sine, qu’il aperçoit régulière­ment de son bal­con, ne sait com­ment s’y pren­dre pour l’inviter à venir pren­dre le thé. C’est un petit rep­tile qui leur per­me­t­tra ce rap­proche­ment : Alf, la tortue. Con­cep­tu­al­isée par les tal­entueuses Mathilde Louarn et Mar­i­anne Deshayes, cette mar­i­on­nette nous atten­drit dès le début et nous donne envie de repar­tir avec chez soi. Les bal­cons des apparte­ments sont mag­nifiques. Tout se déroule d’en haut ou dans la cour de leur immeu­ble. Cette scéno­gra­phie, pen­sée ingénieuse­ment par Bastien Foresti­er Rischard, trans­porte dès l’ouverture petits et grands dans cette rési­dence lon­doni­enne. En obser­vant atten­tive­ment le décor, on y apprend que l’un est pas­sion­né par les plantes et l’autre par sa tortue. Le scéno­graphe signe aus­si les cos­tumes ; il pro­longe ain­si son inten­tion de définir les per­son­nages au-delà des mots par des looks et des couleurs qui enrichissent le spec­ta­cle. L’adaptation de la nou­velle et la mise en scène de Tol­gay Pekin (Next Thing You Know), assisté de Daivi­ka Elouard, sont intel­li­gentes, sub­tiles, drôles. Les enfants ne boudent pas leur plaisir. Ils par­ticipent et leurs par­ents rient à gorge déployée. Inter­mé­di­aire entre le clown, les mar­i­on­nettes, le théâtre musi­cal et la com­me­dia del­l’arte, cette pièce mélange beau­coup de codes avec intel­li­gence. C’est un petit joy­au qu’il fait bon voir. Les musiques d’Elif Ble­da sont à l’image de ce spec­ta­cle : douces, belles et sim­ples. On ressort facile­ment avec la chan­son de la for­mule mag­ique en tête. La lumière de Thibaut Hok est bien pen­sée ; sim­ple et effi­cace, elle ne pour­ra que pren­dre encore plus de corps dans une salle mieux équipée.


Crédit pho­to : Julien Contarin

Le cast­ing est par­fait. Emmanuelle Zago­ria (New) campe une Madame Sylvestre touchante et amu­sante. Loin d’en faire une car­i­ca­ture, elle a su don­ner vie à un per­son­nage naïf auquel on s’attache. Il n’est pas rare que Can­dide soit rapi­de­ment insup­port­able et, heureuse­ment, il n’en est rien ici. Noé Pflieger (Céles­tine et la Tour des nuages), quant à lui, nous fait décou­vrir intel­ligem­ment un Mon­sieur Toupie attachant et drôle. Jonglant entre sa timid­ité et son envie de ser­rer l’amour de sa vie dans ses bras, il nous fait entr­er dans sa tête et nous fait com­plète­ment accepter sa stratégie pour arriv­er à ses fins. La com­plic­ité des deux comé­di­ens est com­mu­nica­tive et par­ticipe aux mer­veilleux moments passés en leur compagnie.

Des tableaux restent en tête comme les bat­te­ments de cœur de Mon­sieur Toupie, la con­struc­tion de l’attrape-tortue, la for­mule mag­ique « Eutrot, eutrot, Sid­narg, sis­sorg »… et bien d’autres moments encore. Tout de Go, en sig­nant cette pre­mière créa­tion, promet un bel avenir au théâtre musi­cal. Petits et grands sont enchan­tés et il n’y a aucun doute : ce petit écrin de beauté ira loin.

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