Dolores

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Théâtre Actuel La Bruyère – 5, rue La Bruyère, 75009 Paris.
À partir du 29 août 2025.
Renseignements et réservations sur le site du théâtre.

Sylvin et Maria Rubinstein, frère et sœur jumeaux, rencontrent un succès international dans les cabarets des années 30 avec un numéro de flamenco phénoménal. Ensemble, ils forment le couple vedette d’Imperio et Dolores. Mais leur ascension va vite être brisée par la montée du nazisme.

Découvrez comment un homme qui ne rêvait que de danser sa vie avec sa sœur va devenir un résistant à l’oppression en accomplissant une vengeance aussi impitoyable que spectaculaire. D’après une histoire vraie.

Notre avis : Le journaliste Kuno Kruse a, presque par hasard, rencontré Sylvin Rubinstein, alors un vieux monsieur très secret. En établissant la confiance, il est parvenu à lui faire évoquer sa vie, doutant un temps de la véracité de ses propos tant ils paraissaient extravagants mais, après recoupement, il s’est aperçu que le vieux danseur ne disait que la vérité… Un documentaire en a été tiré, de nombreux articles et même un livre de Marie Charrel. Il faut dire que l’histoire tragique de Sylvin possède un romanesque à nul autre pareil, renforcé par la discrétion de ce monsieur, qui se révèle tueur de SS, travesti en femme. Mais attention, ce résumé se doit d’être explicité. C’est justement ce que font avec talents les auteurs Yann Guillon et Stéphane Laporte dans cette adaptation théâtrale.

Le spectacle s’amorce avec les confessions d’un vieux monsieur à un barman qui, de plus en plus intrigué et saisi par ses propos, l’écoute de plus en plus attentivement, à l’instar du public. Sylvin évoque alors ses jeunes années ; le comédien a désormais 16 ans, et nous découvrons Maria, sa jumelle (même s’il est l’aîné puisqu’il est né dix minutes plus tôt). Le principe du spectacle est posé : Sylvin s’adresse à la salle et ses propos s’illustrent par diverses scènes jouées par la troupe. L’amour du flamenco, le duo qu’il forme, à l’instar de Fred et Adele Astaire, si ce n’est que les jumeaux, connus sous le nom de « Imporio y Dolores » brillent dans les cabarets grâce à leur numéro de flamenco. Tout pourrait aller pour le mieux, mais la Seconde Guerre mondiale couve et bientôt éclate, provoquant les drames. La mise en scène soignée et habile de Virginie Lemoine permet de voyager à travers les lieux et les années de manière très claire. Le récit suit la chronologie, ce qui facilite sa compréhension. La belle idée du spectacle consiste à substituer, pour les parties dansées, les acteurs à des danseurs, accompagnés par deux musiciens. Ces moments chorégraphiés, durant lesquels s’expriment des émotions très fortes, accentuent indéniablement l’empathie ressentie par tout un chacun pour les personnages. Des projections discrètes, complétées par une bande-son tout aussi discrète mais non moins efficace, permettent une immersion encore plus grande dans cette histoire incroyable.

Si Olivier Sitruk se taille la part du lion en tant que narrateur et personnage central, toute la distribution défend avec passion sa partition. Notons les très belles performances de Sharon Sultan – qui ne se contente pas d’envoûter le public par un flamenco puissant et très sensuel, mais incarne aussi de nombreux rôles – et François Feroleto, que l’on découvre comme serveur mais qui, lui aussi, endossera avec brio plusieurs personnages d’importance, dont « Papa Kurt ». Entièrement dédiée à son personnage principal – cet artiste qui ne demandait rien d’autre que de pouvoir se produire avec sa jumelle et qui, ivre de douleur, est devenu un assassin – la pièce bouscule, provoque des interrogations et procure, hélas, un triste écho avec la période trouble que nous traversons. Avec toutefois quelques lueurs d’espoir : même quand tout semble perdu, on peut rencontrer des personnes amies et bienveillantes et, plus encore : l’art permet de surmonter bien des choses, y compris les plus terribles.

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