Que vous apporte, en tant qu’interprète, la comédie musicale ?
Une capacité d’expression assez énorme. Avec le chant, la danse et la comédie mélangés, cela ouvre des possibilités quasi infinies. J’aime bien essayer de les fondre, de faire en sorte que le public ne se rende pas compte quand la parole s’arrête et quand le chant ou la danse commence. C’est amusant d’essayer de rendre logique et normal le fait qu’un personnage se met a chanter ou danser tout d’un coup. Et puis quand on l’a pratiquée, la comédie musicale influence d’autres projets théâtraux, même s’ils n’utilisent que l’une de ces trois disciplines.
Quel est votre regard sur ce genre, comment sait-on qu’une comédie musicale est réussie ?
Wow, quelle question ! Pour la première partie, je trouve ce genre formidable mais, à vrai dire, je le trouve assez sous-exploité. Je pense que de nombreuses choses incroyables se passent dans le monde de la danse, de la musique et du théâtre aujourd’hui, mais la comédie musicale ne les exploite pas et reste beaucoup dans des codes qui lui sont propres. J’adore évidemment cette discipline, mais je pense qu’il y a tellement de choses à explorer dans le fait de raconter une histoire avec plein de disciplines mélangées, d’autant que les savoir-faire de chaque discipline sont aujourd’hui à leur apogée. Par exemple Hamilton a commencé avec l’introduction du rap – mais il y a encore tellement à explorer !
Pour la seconde partie de la question, réussir une comédie musicale relève du miracle – avec autant de disciplines et de savoir-faire réunis pour une seule pièce –, il suffit qu’un élément ne fonctionne pas pour que tout le reste s’affaisse. C’est un mélange tellement délicat pour que ça « marche » !
D’après mon expérience, pour que ça fonctionne, je pense qu’il faut que toutes les personnes impliquées soient d’accord avec l’histoire et l’esthétique de la pièce qu’ils.elles sont en train de créer (ce n’est pas toujours le cas). Qu’il n’y ait pas trop de personnes impliquées dans les décisions artistiques afin que la pièce ne soit pas tirée dans mille directions – je pense au nombreux.ses producteurs.trices à Broadway qui ont « droit » de donner leurs avis sur une création. Il faut également une histoire intéressante avec avec de bons personnages et un livret bien écrit, des chansons qui servent à faire avancer l’histoire et arrivent donc aux moments propices. Il en est de même pour la danse : qu’un rythme collectif se dégage, ponctué de moments d’émotion forte. Enfin, que les interprètes, musicien.nes, technicien.nes soient à la hauteur du projet. Donc quand ça marche, ça relève vraiment du miracle.
Quels sont vos projets ?
J’ai écrit les paroles et vais chanter la partie solo dans un projet qui me tient très à cœur : D’un rivage à l’autre, une pièce en cinq mouvements autour du climat pour une chorale de cent chanteurs.ses, composée par le pianiste et compositeur Andy Emler. En parallèle, je crée un spectacle musicale solo, Qu’y a t’il dans ton sac à main ?, qui sera joué, chanté et dansé avec un looper, un synthétiseur et des samples mélangés de textes de philosophes et sociologues. Sortie de résidence l’été dernier et bientôt sortie en vrai ! Enfin, je pourrais citer There She Is, une comédie musicale que j’ai écrite et composée à New York en 2019 autour de la question: Que se passe-t-il après « ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants » ? Elle est encore au four, mais je serai ravie de vous la présenter dès qu’elle sera prête.