Un homme sur scène épaulé par divers membres de sa famille, ses camarades de classes, son psy, ses ex, ses futur(e)s, des collègues, des élèves, offre le fruit de sa réflexion. Le condensé d’une existence en sept tableaux et à peu près le double d’anecdotes fondatrices, convoquées pour interroger le vertige d’un genre et tout ce qu’il implique d’impératifs. L’auteur s’est un peu emballé avec cette grosse phrase, la suite sera plus simple. Promis.
De l’enfance à l’âge adulte, de l’oppression à l’émancipation, de la virilité abusive à une masculinité singulière, Le Premier Sexe est un parcours. Et un partage.
Notre avis : Précisons tout d’abord que le spectacle n’est pas musical, même si des extraits de chansons trouvent parfaitement leurs places. Et maintenant attention : déluge de superlatifs en vue… En effet, assister à ce seul en scène, c’est vivre un moment exceptionnel en compagnie d’un acteur/auteur parmi, sans nul doute, les plus doués de sa génération. Avant même de se trouver physiquement sur cette petite scène, très proche du public, sa voix explique avec un second degré irrésistible les consignes à respecter. Par la suite, Mickaël Délis évoque des moments de son enfance, entre une mère portée sur les antidépresseurs et qui encourage son rejeton à en utiliser, et son psy qui tente de démêler les divers tracas liés à l’orientation sexuelle, à la sacro-sainte virilité. Les personnages défilent, les propos se télescopent, se répondent. Le spectateur, entre deux rires complices avec le comédien, reconstitue le puzzle de la vie de cet homme qui parle avec tant de justesse, d’à‑propos, le tout avec un humour auquel il serait bien vain de résister.
En fin connaisseur des us et coutumes des règles théâtrales, jusqu’à la participation du public un temps requise, Mickaël Délis s’en amuse, les détourne et, plus les minutes s’égrènent, plus il noue un lien privilégié avec une salle attentive et en empathie plus que captive. Et dans les dernières minutes du spectacle, une émotion indescriptible risque de vous étreindre : l’accueillir procure un bouleversement qui conduit à des applaudissements plus que nourris et l’envie de rester encore avec ce comédien rare, celle aussi de lui montrer notre reconnaissance pour cette heure extraordinaire. Et la joie ressentie d’apprendre que Le Premier Sexe s’inscrit dans une trilogie. Le deuxième opus, La Fête du slip ou le Pipo de la puissance, a déjà été créé contrairement au troisième. Le tout à découvrir bientôt au Théâtre de la Reine Blanche. Autant dire que rendez-vous est pris et, avant cela, sans nul doute, retourner se réchauffer auprès des mots et de la prestation de cet artiste généreux et inspirant.