L’argument sur lequel repose la pièce est une interview télévisée de Michael Jackson réalisée à titre documentaire, à laquelle le chanteur a accepté de se livrer. C’est en fait une reconstitution de sa vie : ses débuts en 1966 à la tête du groupe The Jackson Five, avec ses frères Jackie, Tito, Jermaine, et Marlon, puis sa carrière en solo à partir de 1971 sous l’égide de Quincy Jones avec son premier album, puis l’inégalable Thriller, et enfin ses heures de gloire couronnées en 1993 par le Grammy Living Legend Award décerné par la Recording Academy.
Si cette vie et cette carrière sont présentées avec un semblant de justesse et de réalisme, c’est avec discrétion que le livret fait allusion au fait que Jackson était connu pour faire usage de drogues et pour avoir des traits de caractère assez surprenants – tout autre événement « gênant » étant purement et simplement passé sous silence pour éviter la controverse. À cet égard, MJ: The Musical ne s’éloigne guère des directives générales appliquées à la construction de « jukebox musicals » comme The Cher Show, Summer: The Donna Summer Musical ou même le gros succès actuel, Tina: The Tina Turner Musical.
Ce qui fait de l’effet, évidemment, ce sont les moments musicaux, réglés par le chorégraphe et metteur en scène Christopher Wheeldon dans une forme éblouissante. Avec une partition musicale habilement cousue par David Holcenberg et Jason Michael Webb à la tête de l’orchestre, également en pleine forme, ces moments musicaux, bâtis autour d’énormes succès tels que « Beat It », « High and Higher », « Man In the Mirrror » et « Thriller », sont le clou de la soirée.
Dans le rôle de Michael Jackson, Myles Frost offre beaucoup de similitudes avec son modèle, que ce soit sur scène ou dans le privé. Il fait preuve de beaucoup de véracité dans l’interprétation sur le plan vocal aussi bien que dans la façon de faire les pas de danse tellement originaux par lesquels Jackson avait également connu la gloire. Même en se rappelant que ce n’est qu’un rôle et que du théâtre, on se laisse facilement prendre au jeu. Dans les rôles secondaires, Quentin Earl Darrington joue avec sincérité le directeur de scène des concerts de Jackson ainsi que le père des fils Jackson placés sous sa coupe et ses façons abusives, mais le récit, très focalisé sur la star, ne lui donne pas l’occasion de montrer ses possibilités. Le même problème nuit à la prestation de Whitney Bashor dans le rôle de Rachel, la réalisatrice du documentaire télévisé, qui semble avoir fort peu d’occasions de se manifester autrement que superficiellement.
En dépit de ces défauts, le spectacle est particulièrement attrayant, honnête dans sa présentation et agrémenté par une rare collection d’airs connus, dont certains utilisés de façon différente de la version originale pour mieux faire avancer l’action. Il semble avoir de bonnes chances de rester à l’affiche pour une période prolongée…