Il faut vraiment aimer Neil Diamond pour apprécier A Beautiful Noise, le jukebox musical élaboré autour des chansons les plus populaires du célèbre musicien pop rock. Depuis la première à Broadway en décembre dernier, le spectacle continue de jouer devant des salles combles. Comme la plupart de ces musicals qui prennent pour point de départ la carrière d’artistes connus (Cher, Donna Summer, Michael Jackson, Tina Turner… pour ne citer que les plus récents), A Beautiful Noise se penche sur la vie publique et privée du créateur de « Sweet Caroline » (sa chanson peut-être la plus connue dans le monde) et emprunte pas moins d’une trentaine de titres qui ont pour la plupart marqué les années 1970 et 1980 pour en faire un tissu musical qui s’intègre à l’action.
Dès le lever de rideau, nous sommes mis en présence d’un Diamond vieilli, affaibli par la maladie de Parkinson, assis dans un fauteuil, face à un médecin qui le soumet à un interrogatoire, bougonnant en retour et qui refuse de parler de sa carrière et de sa vie privée. Bientôt, pourtant, il va céder et raconter des épisodes de sa vie, ses premiers pas sans grand succès dans la musique – il a voulu changer son nom en Noah Kaminsky –, ses premières chansons, ses premières amours… Ces confessions sont illustrées par des fragments des airs qu’il a composés au cours de sa brillante carrière, interprétés pour la plupart par Will Swenson, vedette du spectacle et doté d’un puissante voix de baryton qui ne ressemble pourtant pas à celle de son modèle, ou, selon le cas, par d’autres acteurs dont Robyn Hurder, excellente sous les traits de Marcia Murphey, la deuxième épouse de Diamond et celle qui devait rester le plus longtemps (25 ans) sa compagne.
Ce qui fait vraiment l’intérêt de ce spectacle, c’est l’appropriation par les artistes de la distribution de ces chansons connues pour la plupart dans le monde entier, dans une mise en scène de Michael Mayer et dans une chorégraphie soignée de Steven Hoggett qui mettent en valeur l’interprétation et, en particulier, les ballets modernes conçus autour d’elles.
Comme il faut s’y attendre, nombre de ces chansons sortent droit du Top Ten et sont toujours familières, dont notamment « Solitary Man », son premier succès sorti chez Bang, un label distribué par Atlantic et connu pour ses attaches avec la Mafia, « Holly Holy », « Cracklin’ Rosie », « Song Sung Blue », interprétée par Robyn Hurder, « Cherry Cherry », « Hello Again », et bien d’autres encore, dont bien sûr l’éternelle « Sweet Caroline ». Mais il est rafraîchissant de trouver également ici et là des morceaux moins connus ou oubliés, tels que « The Boat That I Row », « I’ll Come Running » ou « A Beautiful Noise » qui devait donner son nom au spectacle.
Pour offrir un plus grand relief à certaines des chansons – la plupart interprétées par Swenson –, une dizaine de danseurs-chanteurs baptisés The Beautiful Noise participent à ces moments musicaux, dans des costumes d’Emilio Sosa et des éclairages de Kevin Adams qui donnent à l’ensemble un reflet de Las Vegas. Il faut reconnaître que cette présentation a de la classe.
Le seul point faible du spectacle, c’est le livret conçu par Anthony McCarten, connu pour son travail sur le film Bohemian Rhapsody, qui célébrait Freddie Mercury et Queen, son groupe de rock, et également l’auteur du scénario de I Wanna Dance with Somebody, le biopic sur Whitney Houston. Il semblerait que, dans le cas présent, McCarten se soit trouvé dans un domaine qui lui était moins familier, et son livret n’a pas la force théâtrale requise pour que cette analyse de la vie et de la carrière de Neil Diamond soit plus réaliste.
Cela n’empêchera pas les fans du chanteur de venir voir le spectacle, tout simplement par envie de se replonger dans une période importante de leur vie, et ils seront largement récompensés par ce qui les attend. Les amateurs de spectacles musicaux, ou même les spectateurs en quête d’un spectacle peu exigeant voire délassant, seront également séduits, même si les seuls points d’intérêt qu’ils y trouvent résident dans les moments musicaux.