Delphine Grandsart © DR
Delphine Grandsart, vous vous apprêtez à interpréter et à co-mettre en scène un spectacle musical sur La Goulue. Pouvez-vous nous parler de l’origine de ce projet ?
Il y a environ deux ans, un ami m’a présenté une auteure, Delphine Gustau, dont il me parlait depuis longtemps. Lorsqu’elle ma vue arriver, elle s’est dit : « cette fille, on dirait La Goulue. » C’est vrai que, comme elle, j’ai un tempérament, une gouaille. Quand on voit les tableaux de Lautrec dépeignant la Goulue, on trouve souvent qu’il y a une ressemblance avec moi. J’avais même déjà interprété, pour un téléfilm, un personnage inspiré d’elle.
Plus tard, Delphine m’a appelée et m’a dit qu’elle avait depuis longtemps un projet sur la Goulue et qu’elle avait envie de m’écrire un rôle. Très rapidement, c’est devenu musical. Matthieu Michard, le compositeur, a écrit les musiques du projet, mais il y a aussi quatre ou cinq morceaux d’époque (Aristide Bruant, Yvette Guilbert…) qui sont vraiment intégrés à la dramaturgie.
On a fait beaucoup de recherches et on s’est rendu compte qu’il n’y avait pas grand chose sur sa vie : il y avait surtout des critiques de ses spectacles. C’était une femme extrêmement subversive, une punk avant l’heure, rebelle, libre, féministe. Rapidement, on s’est dit que ce serait intéressant de partir de sa mort et de remonter à son enfance. On est dans l’intime mais jamais dans le récit. On ne voulait pas tomber dans les travers d’un spectacle didactique.
Qu’est-ce qui vous touche dans cette femme ?
C’était une femme sans concessions qui a préféré prendre le risque de tout perdre matériellement pour rester en adéquation avec ses idéaux. C’est une femme qui n’hésitait pas à dire ce qu’elle pensait, quelle que soit la personne qu’elle avait en face d’elle. Elle n’avait peur de rien et j’avoue que je suis un peu comme ça. Je n’ai peur de rien et je ne suis pas carriériste ! Ce personnage, c’est une rencontre énorme car il a de fortes résonances en moi.
Est-ce que le fait d’avoir travaillé avec une équipe américaine sur Cabaret influe désormais sur votre façon de travailler ?
Sur Cabaret, Sam Mendes nous avait demandé à tous, danseuses et musiciens compris, de faire la biographie du personnage, de sa naissance jusqu’au moment où il entre sur scène. Naturellement, j’avais toujours abordé mes rôles de cette manière. On est le résultat de son vécu et cela nourrit le personnage.
Comment abordez-vous le travail physique sur ce personnage ?
En un peu plus d’une heure, on survole toute une vie. La difficulté en tant que comédienne va être cette transformation de la vieillesse à l’enfance. Le danger est de tomber dans les caricatures des âges. Ce qui me paraît important est de toujours rester connectée à la sincérité. Mon travail va être de passer d’un âge à l’autre sans que les gens s’en rendent compte.
Après, il y a la gouaille. Je l’ai naturellement mais comme aujourd’hui, la gouaille n’existe plus tellement, il ne faut pas en rajouter. Encore une fois, il faudra rendre hommage à cette façon de parler mais sans tomber dans la caricature.
Sur Cabaret, Sam Mendes aimait cette gouaille car il trouvait que ça amenait un côté populaire. En fait, c’est ça : je veux, à travers La Goulue, rendre hommage au peuple.
Louise Weber dite La Goulue, à partir du 15 mai 2017 à l’Essaïon.