Notre avis : Après Six, la comédie musicale pop rock qui prenait pour sujet les mésaventures des six femmes d’Henry VIII aux mains de leur époux sans scrupules, la seconde œuvre originale à faire ses débuts à Broadway dans le cadre de la saison 2021–2022, Diana, vient de lever le rideau et nous ramène au cœur de la famille royale d’Angleterre dans les temps modernes. La pièce avait été annoncée l’année dernière mais, comme tous les théâtres de Broadway avaient été obligés de fermer en raison de l’épidémie de Covid-19, elle n’avait pu être présentée sur scène – sinon pour une captation destinée à Netflix. Il semblerait que cette longue pause n’a rien fait pour l’améliorer, si tant est que ses créateurs auraient songé à la peaufiner.
Diana, c’est bien sûr la princesse de Galles, épouse du prince Charles, dont la tragique existence a déjà fait l’objet de plusieurs pièces et films, dont le film Spencer, sorti il y a seulement quelques semaines. Joe DiPietro et David Bryan, bien connus pour leur premier effort présenté à Broadway en 2010, Memphis, se sont donc emparés de cette histoire pour en faire une œuvre musicale. DiPietro, auteur du livret, a créé des vignettes autour des événements les plus marquants de la vie de Diana Frances Foster, née en 1961 au sein d’une famille noble britannique, sa rencontre avec Charles, héritier au trône, leur mariage malencontreux en 1981 (le prince, qui n’avait rien de charmant, s’étant empressé de poursuivre ses amours extra-maritales, notamment avec une compagne de longue date, Camilla Parker Bowles), la naissance de leurs enfants, William et Harry, et leur divorce en 1996 quand il s’est avéré que leurs différences étaient irréconciliables.
Ces vignettes, comme les pièces d’un puzzle assemblées pour créer une image cohérente, sont une interprétation par DiPietro qui cadre ou non avec la réalité des faits, les embellit et essaie de leur donner un sens, mais la narration manque d’intérêt et de cohésion. D’autres se sont attachés au même sujet sans grand succès d’ailleurs. Les chansons, la plupart écrites sur seulement quelques notes et sans grand attrait mélodique, avec des rythmes rapides accentués par des effets de percussion, viennent se greffer sur ce récit de façon bizarre, mais n’accrochent pas l’oreille. Les paroles, souvent des répliques parlées et répétitives entre les principaux personnages, restent du même niveau que la musique et sont relativement peu mémorables
La distribution n’agrémente pas le déroulement de l’action. Si Jeanna de Waal, sous les traits de Diana, est radieuse et dispose d’une voix qui porte et pourrait enchanter dans d’autres circonstances, Roe Hartrampf, qui fait ses débuts à Broadway, est plutôt figé dans le rôle de Charles, et Erin Davie donne à Camilla une allure un peu trop familière en comparaison de sa rivale qui cadre mal avec l’impression qu’on a du sujet en question. Même Judy Kaye, actrice reconnue et acclamée sur les scènes de Broadway pour ses fréquentes prestations, donne de la reine Elizabeth une interprétation qui n’a rien de royal. Il est vrai que le texte qu’elle doit dire ne lui donne peut-être pas la chance de se manifester autrement.
De plus, ni la mise en scène balourde de Christopher Ashley ni la chorégraphie peu imaginative de Kelly Devine ne parviennent à relever le niveau théâtral de cette œuvre manquée. On aurait aimé sortir de cette représentation en fredonnant peut-être une phrase musicale ou en évoquant un moment pittoresque de l’action, mais il n’en reste que le souvenir d’une histoire mal contée et la question de savoir combien de temps elle restera à l’affiche.