Le Bar de l’Oriental

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Théâtre Montparnasse – 31, rue de la Gaité, 75014 Paris.
À partir du 7 février 2024. Mercredi, jeudi, vendredi et samedi à 19h, dimanche à 18h. Relâche le dimanche 17 mars.
Pour toute information supplémentaire, cliquez ici.

Lang­son, Nord Tonkin, début octo­bre 1950.

Dans le huis clos étouf­fant d’une vieille demeure colo­niale, cinq per­son­nages en quête d’eux-mêmes se retrou­vent soudain pro­jetés dans le tour­bil­lon de l’Histoire, au tour­nant de cette guerre d’Indochine qui s’annonce bien­tôt perdue.
Le passé ressur­git soudain, réveil­lant les ten­sions enfouies et les ques­tions demeurées sans répons­es. Que s’est-il donc passé cinq ans plus tôt, à Saï­gon, au Bar de l’Oriental ? Une promesse non tenue, un amour refusé par fidél­ité à un autre amour, à une cause supérieure, à un enracin­e­ment corps et âme dans ce pays si attachant et énig­ma­tique… L’engagement poli­tique, l’art ou l’amour opèrent ici comme autant d’idéaux, par­fois illu­soires, sou­vent con­tra­dic­toires, et pour lesquels cer­tains iront jusqu’à sac­ri­fi­er leur vie.

Notre avis : Jean-Marie Rouart, romanci­er, essay­iste et chroniqueur siège à l’A­cadémie française depuis 1997. De nom­breux prix et dis­tinc­tions lui ont été attribués pour l’ensem­ble de son œuvre.
Nous ne le con­nais­sions cepen­dant que très peu comme écrivain de théâtre ; il nous présente aujour­d’hui une pièce ayant en toile de fond un sujet brûlant, à savoir la guerre d’Indochine.

Ce ter­ri­ble et sanglant épisode nous plonge à un tour­nant décisif du con­flit (durant l’au­tomne 1950), où tout s’an­nonce comme une défaite de la France face à un enne­mi prêt à tout pour gag­n­er son indépen­dance. Nous nous trou­vons dès le lever de rideau au sein d’une vieille demeure colo­niale, où les cinq per­son­nages de l’in­trigue vont tour à tour s’aimer, se déchir­er, se détester et se trahir jusqu’au dénoue­ment – qui ne pou­vait être que trag­ique. Ils nous appa­rais­sent d’emblée tous très antipathiques : un com­mis­saire de police ex-col­labo, un colonel peu scrupuleux, une aven­turière à l’âme d’es­pi­onne mar­iée à un offici­er lâche et opi­omane, qui de sur­croît la trompe avec sa jeune sœur aus­si friv­o­le qu’écervelée. Bref, une belle galerie d’individus vrai­ment peu fréquentables !

La scéno­gra­phie d’Emmanuel Charles souligne avec réal­isme l’at­mo­sphère colo­niale, emplie de moi­teur et de tor­peur trop­i­cales, qui règne dans ces con­trées asi­a­tiques. Ces décors con­tribuent sub­tile­ment à restituer l’étouffement vécu par nos pro­tag­o­nistes. Les belles lumières signées Olivi­er Oudiou accentuent cette réus­site visuelle, que nous avons appréciée.

Le pro­pos de la pièce s’efforce de mêler à la fois la poli­tique, les tour­ments et les frus­tra­tions des per­son­nages – de façon par­fois mal­adroite. Cet exer­ci­ce risqué n’at­teint hélas pas son but, d’autant moins que la mise en scène de Géraud Bénech sem­ble trop sage, ne resti­tu­ant pas assez la vio­lence des sit­u­a­tions proposées.
Les comé­di­ens n’apparaissent pas réelle­ment à l’aise dans leurs emplois, qu’ils ne parvi­en­nent donc pas à ren­dre com­plète­ment crédibles.
Dom­mage, car l’in­ten­tion de l’au­teur – louable – visait à s’inscrire dans l’esprit d’un Ten­nessee Williams à la française… Mal­heureuse­ment, naïveté et sincérité ne font ici pas bon ménage.

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