Les Perruques de Thomas (Deluxe édition)

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Théâtre du Rond-Point – 2bis, avenue Franklin-D.-Roosevelt, 75008 Paris.
Du 2 au 11 février 2023 à 18h30. Du 14 au 18 février 2023 à 20h30.
Renseignements et réservations sur le site du Théâtre du Rond-Point.

Auteur et génial explo­rateur de la comédie humaine, Thomas Poitevin déploie une nou­velle galerie de por­traits trag­iques et ten­dres, hommes et femmes sous per­ruques, en proie à la cat­a­stro­phe ordi­naire d’exister. Défi­lent dans une antholo­gie de micro-fic­tions : une agente immo­bil­ière ger­manopra­tine à la dérive, un jeune schiz­o­phrène ama­teur d’écureuils, une tech­ni­ci­enne de la cul­ture hyper­ac­tive… Le comé­di­en fait jail­lir un bal de ratés mag­nifiques, d’anti-héros et autres créa­tures dans leur panique d’être au monde. Propul­sé via Insta­gram au fir­ma­ment des stars lors du con­fine­ment, Thomas Poitevin postait chaque jour des vignettes, pastilles de trois min­utes max, sous des per­ruques dif­férentes. Seul en scène, avec la met­teuse en scène Hélène François et la com­plic­ité de Stéphane Foenk­i­nos, une irré­sistible épopée human­iste, sorte d’au­to­bi­ogra­phie explo­sive de tout le monde.

Notre avis : Con­fes­sons tout d’abord n’avoir pas vu la pre­mière ver­sion de ce spec­ta­cle. Cette édi­tion « de luxe », comme il se dit d’un CD « agré­men­té de boni », présente, selon les mots du comé­di­en sur le pro­gramme : des vari­a­tions dans les textes des per­son­nages, voire de nou­veaux insérés dans cette série de sketchs présen­tant cha­cun une per­son­nal­ité qui se des­sine grâce à une per­ruque. Thomas Poitevin, rap­pelons-le, s’est fait con­naître durant le con­fine­ment lié à la Covid en pro­posant des pastilles d’une drô­lerie idéale, per­me­t­tant à de nom­breux inter­nautes de s’évader et de réveiller ses zygo­ma­tiques grâce à des per­son­nages tels que Gen­tiane, Hélène l’agente immo­bil­ière, Mélanie, Frédéric Frédérique (pour laque­lle nous avouons un pen­chant par­ti­c­uli­er), mais aus­si Caro et Daniel Pel­leti­er Ces deux derniers se retrou­vent dans le spec­ta­cle, l’ouvrant et le refermant.

Le pas­sage d’un for­mat court filmé en gros plan, voire très gros plan avec les moyens du bord et con­cen­tré en répliques mor­dantes, à l’espace d’une scène de théâtre et d’un for­mat plus long ne pose nul prob­lème au comé­di­en. La scéno­gra­phie élé­gante, met en valeur ces per­ruques en « poil de chien », comme l’atteste la pro­prié­taire du mag­a­sin Play and Plug. Toutes por­tent un prénom, celui du per­son­nage que le comé­di­en incar­n­era… ou pas. En effet, cer­taines res­teront sage­ment sur leur présen­toir. Le pub­lic présent lors de la représen­ta­tion avait claire­ment une bonne con­nais­sance du tra­vail du comé­di­en, et l’accueil qu’il lui réser­va fut à la hau­teur des rires qui n’arrêtèrent pas de fuser. Il faut dire qu’il est dif­fi­cile de résis­ter à Caro et son aven­ture hors sol, ou à Lau­rence, plus en forme que jamais au sein de la scène con­ven­tion­née l’Étanol et tou­jours prête à mar­tyris­er sa col­lègue Marine. Le dia­logue à sens unique d’une épouse face aux ron­fle­ments noc­turnes de son mari par­ticipe des rires habile­ment dis­til­lés. Si un air inter­prété par Line Renaud (« Ma petite folie ») sert un temps de tran­si­tion, le spec­ta­cle s’articule sans musique (à quand : Les Per­ruques, le musi­cal, en explo­rant par exem­ple le riche réper­toire de Marie Mar­i­on ?). Excel­lent comé­di­en et heureux d’être sur scène, Thomas Poitevin a cette fac­ulté rare, celle de vous entraîn­er avec mal­ice dans son délire, s’amuser avec une féroc­ité tou­jours mesurée, avec finesse, des tra­vers des uns et des autres. Comme tout grand comé­di­en jouant avec le comique, il sait par­faite­ment faire naître une émo­tion, l’air de rien. Ain­si le dis­cours de mariage d’un frère – les deux mar­iés sont du sexe mas­culin – désopi­lant s’il en est, provoque-t-il une sen­sa­tion autre pour le spec­ta­teur, plus vaste qu’un grand éclat de rire. Sans par­ler du tou­jours iras­ci­ble Daniel Pel­leti­er qui, lors d’une énième con­ver­sa­tion télé­phonique avec sa fille, va provo­quer par divers rebondisse­ments une émo­tion inat­ten­due. Si Thomas joue ses per­ruques avec une maes­tria décon­trac­tée, jamais ses per­ruques ne se jouent de lui.

Et même la pub­lic­ité pour le spec­ta­cle, ici présen­té à Melun-Sénart, est jouissive :

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