Un chœur de vingt et une femmes s’avance sur le plateau nu. Parmi elles, des femmes ukrainiennes en exil, des femmes biélorusses qui ont fui les persécutions du régime d’Alexandre Loukachenko et des femmes polonaises qui les ont accueillies à Varsovie. Elles sont âgées de huit à soixante-dix ans. Ensemble, elles chantent et murmurent un plaidoyer contre la guerre composé de poèmes ukrainiens, de comptines, de berceuses, mais également de témoignages actuels, de déclarations politiques et de questionnements adressés à l’Europe.
Notre avis (au TNP) : Après des passages remarqués au Festival d’Avignon et au Théâtre du Rond-Point, Mothers A Song for Wartime achève son parcours en France au TNP de Villeurbanne dans le cadre du Festival international de théâtre Contre-Sens. L’artiste polonaise Marta Górnicka a réuni une vingtaine de femmes ukrainiennes, biélorusses et polonaises autour d’un plaidoyer vibrant contre la guerre.
Ces femmes s’expriment principalement sous la forme du chœur antique, principalement en chansons. De nombreux témoignages sont également retranscrits. Le dépouillement de la scène – un plateau nu – et la sincérité des interprètes non professionnelles sont au service de textes qui questionnent, bousculent et percutent le spectateur. Quel rôle devons nous tenir, individuellement et collectivement face à la guerre sur notre continent ? Que faire face à des vérités que l’on préférerait peut-être ne pas voir ou entendre ?
Les personnages se trouvent eux-mêmes dans un rapport ambigu à l’Europe, oscillant entre amour sincère, sentiment de trahison et amertume. Ces femmes sont souvent tiraillées par le fait de devoir assurer leur sécurité en laissant leurs proches dans leur pays. Face à des guerres lancées et menées par les hommes, les femmes ne sont certes pas sur le front. Elles ne sont toutefois pas préservées, étant les cibles des exactions les plus lâches et les plus sordides. Les traumatismes sont bel et bien présents, pour les victimes comme pour les témoins.
Et pourtant, ces femmes belles et fortes sont bel et bien debout. La mise en espace et la mise en mouvement des interprètes accentuent l’idée que ces femmes ne veulent plus simplement subir les événements. Il n’est qu’à voir un tableau démontrant une forme de haka qui n’a rien de fébrile ! Malgré la dureté du propos, l’espoir demeure présent. Le public qui n’osait applaudir entre les scènes explose à la fin du spectacle, réservant d’interminables minutes d’applaudissements à la troupe. Hommage mérité.