Norma, c’était la reine du clan des orphelins. Elle nous a sauvé la vie et elle nous a tout appris : à lire, à écrire, et même à voler. Alors on prenait aux riches (tout le monde) pour donner aux pauvres (nous). Et puis on est devenus des adultes, et elle une vieille dame.
Ce soir, tous les orphelins sont réunis pour célébrer son enterrement, et tout ce qu’elle nous lègue, c’est des dettes.
Mais elle a pensé à tout : un de ses amis milliardaires est sur le point d’arriver. Elle nous a laissé exactement quinze minutes pour organiser sa plus grande arnaque…
Notre avis : Après Close, que nous avions déjà adoré, Big Drama frappe à nouveau très fort avec sa dernière création : une pièce musicale grinçante, une sorte de comédie noire, toujours sur le principe du spectacle immersif. D’emblée, le spectateur est invité à la cérémonie d’enterrement de Norma, qui se révèle aussitôt être un grand coup monté auquel il est engagé à prendre part. Très vite pris à partie par certains personnages, il devient complice et plonge dans une atmosphère de Cluedo géant.
La découverte du lieu est vraiment magique. Après un passage dans une cour extérieure transformée en cimetière, le public est emporté par la scénographie, les décors et accessoires qui sont poussés jusqu’aux plus petits détails et jouent même avec nos sens. Nous ne vous en dirons pas plus pour préserver le secret et la surprise.
Une fois le spectacle commencé, l’immersion a lieu naturellement grâce à une balance sonore impeccable entre comédiens microtés et chœurs non sonorisés, configuration très appréciable dans un contexte où le public est en mouvement.
La musique s’intègre parfaitement aux scènes parlées. Les bandes-sons et les différents morceaux sont d’ailleurs de qualité – mention spéciale au comédien , qui a composé la musique du spectacle et qui l’accompagne à l’occasion au piano.
L’histoire de Norma, riche, révèle peu à peu le passé des personnages, auxquels il est facile de s’attacher. La tension est palpable, les enjeux de l’intrigue sont clairs et les artistes relèvent le défi haut la main – notamment le parcours du personnage joué par Victor Bourigault ce soir-là (en alternance avec
), dont la rupture était particulièrement sincère, juste et émouvante. Ainsi l’intrigue nous embarque-t-elle sans hésitation, et nous voici plongés dans des décors qui demanderaient des jours entiers d’observation. On se laisse guider sans jamais s’apercevoir des ficelles ni de la dimension technique qu’un tel spectacle implique.Généralement, un dispositif immersif demande au spectateur de trouver sa place au sein de l’intrigue qui se déroule autour de lui, de savoir quand il est acceptable d’interagir ou quand il doit uniquement rester témoin. Afin de ne pas trop réfléchir à tout cela, notre meilleur conseil est de se laisser aller et de faire confiance aux comédiens, ou plutôt même aux personnages, qui vous guideront. La mise en scène, soigneusement élaborée, accompagne le public de sorte qu’il ne se sente pas abandonné. Certains regretteront peut être un manque de liberté et trop peu d’occasions d’interagir avec les personnages en comparaison avec Close ou ce que promet l’appellation théâtre immersif en général. Certes, on repart sans avoir pu découvrir tous les espaces, ce qui peut en frustrer quelques-uns, mais cela reste un parti pris intéressant qui invite à revivre l’expérience sous un autre angle.
À tous les curieux et ceux qui souhaitent sortir des sentiers battus pour une soirée, vous pouvez faire confiance à la troupe d’orphelins de Big Drama pour enterrer la routine et vous plonger au cœur de leur histoire.