Swept Away

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Longacre Theatre – 220 W 48th Street, New York.
Première le 19 novembre 2024. Dernière le 29 décembre 2024.
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On ne peut pas dire que Swept Away soit une comédie musi­cale au sens pro­pre du terme et, de fait, cette pièce qui vient de faire ses débuts à New York est décrite comme un « réc­it mis en musique ». C’est même un réc­it plutôt sérieux, voire dra­ma­tique, qui vaut pour son cli­mat véridique mis en valeur par le décor réal­iste de Rachel Hauk d’un navire du XIXe siè­cle, aux éclairages de Kevin Adams et au fond sonore de John Shiv­ers qui illus­trent notam­ment un orage au milieu d’un océan.

L’histoire se passe en effet sur ce navire qui vient de quit­ter New Bed­ford, dans le Mass­a­chu­setts, avec à son bord un équipage d’une quin­zaine de marins, par­mi lesquels se trou­vent Lit­tle Broth­er, un jeune fer­mi­er venu pour sat­is­faire son rêve de voir du pays, Big Broth­er, son frère, le Cap­i­taine et Mate, son quarti­er-maître. Quand Big Broth­er est mon­té à bord du navire, c’était avant tout pour con­va­in­cre son cadet de revenir à la ferme famil­iale, mais comme leur entre­tien a pris plus de temps que prévu, il s’est retrou­vé coincé à bord, le navire ayant quit­té son port d’attache pour pren­dre la mer.

La troupe de Swept Away ©Juli­eta Cervantes

Entourés qu’ils sont par l’équipage, des hommes à l’aspect rude et peu avenant, les deux frères sont oblig­és de faire bonne fig­ure et d’essayer de se mêler à l’ensemble plutôt que de faire bande à part. D’ailleurs, le Cap­i­taine et Mate leur font bien sen­tir que c’est là la seule façon de se com­porter à bord. Un oura­gan va met­tre fin à cette sit­u­a­tion. Le navire chavire et l’équipage dis­paraît dans la tour­mente. Seuls Big Broth­er, Lit­tle Broth­er, le Cap­i­taine et Mate parvi­en­nent à s’en sor­tir grâce à une embar­ca­tion de sec­ours dans laque­lle ils ont pris place avant que le navire ne coule. Ils vont rester ain­si plus de vingt jours, per­dus au milieu de l’océan, sans ressources autre que l’eau de pluie qui tombe de temps en temps, et peu à peu mourant de faim.

John Gal­lagher Jr. dans Swept Away ©Juli­eta Cervantes

Mate, qui n’a aucun scrupule et exprime des envies de can­ni­bal­isme pour se main­tenir en vie, sug­gère de tuer Lit­tle Broth­er, qui sem­ble déjà au terme de sa vie. Big Broth­er s’y oppose et se sac­ri­fie. Finale­ment, les trois sur­vivants seront sauvés. Après leur mort, les frères et le Cap­i­taine vien­dront, sous la forme de fan­tômes vengeurs, tour­menter Mate, mourant de la tuber­cu­lose, et lui deman­der de racon­ter com­ment leur his­toire a pris fin.

Il faut dire que la pièce garde sa valeur théâ­trale, non pas à cause de son sujet qui pour­rait sem­bler mon­strueux, mais parce que son déroule­ment est agré­men­té par les chan­sons com­posées par les Avett Broth­ers. En 2004, le groupe folk rock avait à l’o­rig­ine enreg­istré un disque inspiré de l’histoire vraie du naufrage en 1884 d’un navire anglais, La Mignonette, qui avait coulé près du cap de Bonne-Espérance. Ce sont ces mêmes chan­sons qui ont été inté­grées à l’action, de façon sub­tile et cohérente, afin de don­ner à celle-ci la solid­ité dont elle avait besoin.

Adri­an Blake, Enscoe Stark-Sands, John Gal­lagher Jr., Wayne Duvall dans Swept Away ©Juli­eta Cervantes

Il en résulte des moments de choix, notam­ment dans la pre­mière par­tie, avec l’ensemble des acteurs inter­pré­tant ces chan­sons avec dynamisme et exé­cu­tant des dans­es solide­ment définies dans la choré­gra­phie folk­lorique de David New­man. La mise en scène de Michael May­er donne à la pro­duc­tion elle-même l’allant dont elle a besoin pour paraître véridique, surtout dans les moments les plus dra­ma­tiques quand l’ouragan frappe le navire et le fait vio­lem­ment tanguer de bâbord à tribord.

Stark Sands,John Gal­lagher Jr., Wayne Duvall, Adri­an Blake-Enscoe dans Swept Away ©Juli­eta Cervantes

La dis­tri­b­u­tion est à tout point de vue remar­quable. Stark Sands (Big Broth­er) déjà vu dans & Juli­et et Kinky Boots, con­firme ses tal­ents d’interprète nuancé. Adri­an Blake Enscoe (Lit­tle Broth­er), dans ses débuts à Broad­way, témoigne de beau­coup de flu­id­ité dans son jeu. Wayne Duvall (Cap­tain) con­va­inc dans un rôle qui demande qu’il soit sur le point de lancer les amar­res pour pren­dre sa retraite. Et, surtout, John Gal­lagher Jr. (Mate), excelle sous les traits d’un per­son­nage ambiva­lent, tan­tôt avenant, tan­tôt sans scrupule.

Il est bien évi­dent que Swept Away n’est pas le genre de spec­ta­cle à la sor­tie duquel on peut se sen­tir plein de bonnes et joyeuses réac­tions. Mais c’est un spec­ta­cle qui séduit par sa solid­ité d’expression, son excel­lente fac­ture, et par la façon dont les chan­sons, qui ser­vent le déroule­ment de l’action tout en l’illustrant, ajoutent au sen­ti­ment que c’est une œuvre qui mérite d’être vue pour son orig­i­nal­ité et sa perfection.

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