Un poulet aux pruneaux, un couteau de cuisine, des îles flottantes, un revolver… et Barbara ! Des vies rêvées pour échapper aux cauchemars du quotidien. Et des chansons pour chanter la vie ou tenter au moins de la ré-enchanter !
Une pièce drôle et grinçante qui se joue de nos désastres intimes.
Notre avis : Quelque dix-sept années après Catherine Deneuve, Pierre Notte porte son regard acéré sur Barbara, ou tout du moins une jeune femme qui, cette fois-ci, « est Barbara ». Pauline Chagne, qui l’interprète, signe avec lui le texte de cette pièce. Tous les ingrédients sont de nouveau en place, à commencer par une famille foncièrement dysfonctionnelle. Jugez plutôt : la mère qui se saigne aux quatre veines et pérore à qui mieux mieux, une fille qui passe son temps à se scarifier, un fils qui est parti à Bordeaux – ville honnie par sa génitrice – fanatique de revolver et une troisième enfant qui, elle, se prend pour l’incarnation de Barbara. Le jeu de massacre peut donc débuter, il se déroulera principalement dans la cuisine, où trône l’inévitable table en Formica.
Piochant dans les éléments biographiques de la chanteuse, comme des interviews ou des extraits de l’extraordinaire documentaire de Gérard Vergez – qui a servi d’inspiration au film Barbara de Mathieu Amalric et dont on peut voir de larges extraits dans le documentaire Barbara en liberté de Sandrine Dumarais –, les auteurs laissent libre cours à leur fantaisie. Ils s’inspirent de ce documentaire jusqu’à en reproduire les vêtements que porte Pauline Chagne, qui « est » dont Barbara non sans panache et interprète, avec finesse, plusieurs titres, accompagnée au piano par Clément Walker-Viry. Le choix des chansons, qui débute par « L’Aigle noir » (dont il sera question plus tard dans le spectacle lors d’un dîner mémorable), ne pointe pas uniquement les standards, mais s’en va fureter dans des contrées plus subtiles. L’évocation de la Longue Dame brune n’est jamais gratuit et sert un récit torturé, que l’humour sauve souvent d’un pathos très affirmé. Pour les amateurs, il est toujours touchant d’entendre de nouveau parler de cette chanteuse ; les néophytes découvriront, au hasard des évocations, une femme bien éloignée du personnage sombre, déprimé, qui lui a trop souvent collé à la peau. Un spectacle attachant et futé.