Il était une fois Michel Legrand

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Sortie du documentaire : le 4 décembre 2024. Durée : 1h56.
Pour voir le teaser, cliquez ici.

Une plongée dans la car­rière et l’in­tim­ité de Michel Legrand, célèbre musi­cien de jazz et com­pos­i­teur hors normes, qui a mar­qué l’his­toire du cinéma.
Grâce à des archives et témoignages inédits, le film revient sur l’in­croy­able richesse d’une vie dédiée à la musique et le par­cours d’un homme qui, jusqu’au bout, aura magis­trale­ment servi son art.

Notre avis : Avec son titre qui évoque un con­te de fées, le doc­u­men­taire mon­tre, pen­dant presque deux heures, divers­es facettes du com­pos­i­teur et chef d’orchestre, dont les œuvres sont depuis longtemps gravées dans la mémoire col­lec­tive. Dif­fi­cile de le croire lorsqu’il répond à Jacques Chan­cel que la postérité « il s’en tam­ponne », tant l’homme a une très haute idée de lui-même ; il est bien plus intéres­sant de l’observer dans les moments de tra­vail. Afin de ne pas vers­er dans l’hagiographie – écueil qui n’est toute­fois pas totale­ment évité –, l’auteur mon­tre quelques petites colères du mae­stro, notam­ment en Hon­grie face à un orchestre qu’il juge dés­in­volte. Or cette représen­ta­tion, dont il sera à juste titre fier, restera un très bon sou­venir pour lui. La parole de Claude Lelouch se joint à celles de musi­ciens qui l’ont côtoyé : les envies de le moles­ter face à ses sautes d’humeur et aux humil­i­a­tions n’ont pas été rares. Toute­fois, ils soulig­nent en cœur que le mon­stre sacré savait par­faite­ment se faire pardonner.

La forme du doc­u­men­taire laisse un peu per­plexe, le réal­isa­teur sem­blant hésiter entre plusieurs axes. Le plus intéres­sant, qui n’est pas suivi de part en part, reste la rela­tion qu’il a entretenue durant plusieurs années avec Michel Legrand, allant même jusqu’à pré­par­er avec lui le mon­tage des images de films qui servi­ront de sup­port à son ultime con­cert à la Phil­har­monie de Paris en 2018. Sont abor­dées l’enfance – que le com­pos­i­teur réécrira à l’envi – avec un père lâche et absent, et rapi­de­ment son ascen­sion dans le monde de la musique – Nadia Boulanger refusa de lui délivr­er son diplôme de manière à ce qu’il reste le plus longtemps pos­si­ble avec elle. La rébel­lion égale­ment, puisque la décou­verte du jazz lui inspi­ra de faire enrager sa men­tor en inter­pré­tant des airs inspirés de ce mou­ve­ment musi­cal, loin des pré­ceptes clas­siques. Son envolée ensuite, son tra­vail haras­sant avec les chanteurs dont il signe nom­bre d’arrangements, puis la con­sécra­tion, tant en France qu’aux États-Unis. Est évo­quée égale­ment, alors qu’il est en pleine gloire, la grave dépres­sion dont il s’est fort heureuse­ment remis. L’u­til­i­sa­tion du « split screen » (plusieurs images se parta­gent l’écran) donne sou­vent du rythme au montage.

Des images d’archives retra­cent, tout au long de sa vie, pas­sions et facéties. Ne fait-il pas installer une salle de mon­tage 35 mm dans sa cham­bre pour être au plus près du film et de la com­po­si­tion ? Pour « rat­trap­er son enfance », n’ag­it-il pas comme un gamin tur­bu­lent, en pilotant des avions et en ne ren­dant sa copie qu’au dernier moment ? Ne s’implique-t-il pas, comme jamais, dans la com­po­si­tion de Yentl, décrite par la fille de Jacques Canet­ti comme sa plus belle par­ti­tion ? Sa force de vie provoque le respect et les ultimes images du con­cert à la Phil­har­monie, lorsqu’il sort de scène soutenu par son pianiste et par son chef d’orchestre, boule­versent (même s’il était inutile d’en faire un ralen­ti). Le film se com­pose, donc, d’éléments pris sur le vif mais aus­si de bouts de témoignages d’innombrables inter­venants, le principe retenu ici étant de présen­ter une phrase de l’un, une phrase de l’autre, sans laiss­er à une parole plus longue le temps de s’épanouir. Par ailleurs, souhaitons que divers prob­lèmes tech­niques liés à l’image et au son soient réso­lus lorsque le film sor­ti­ra : mae­stro Legrand n’aurait sans doute pas appré­cié ce laiss­er-aller. Le fan de Legrand n’apprendra pas for­cé­ment grand-chose sur le musi­cien – sa col­lab­o­ra­tion avec Jacques Demy, par exem­ple, ayant déjà été large­ment doc­u­men­tée – mais il sera touché de voir cet homme bondis­sant, com­plexe, revivre, grâce à cette évo­ca­tion respectueuse et presque amoureuse, sur un écran de cinéma.

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