Fucking happy end

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Sous les feux de la rampe d’un étrange cabaret, un cortège de per­son­nages, évadés de l’u­nivers des con­tes, va vous dévoil­er sa vision loufoque et déjan­tée de Peau d’âne !
Fuck­ing hap­py end est une tra­gi-comédie qui pul­vérise les idées reçues sur le cou­ple, la famille, la quête du bon­heur et tous les autres clichés dans lesquels la société veut vous claquemurer.

Notre avis :
Si nous sommes aus­si récep­tifs et attachés aux con­tes dits pour enfants, n’est-ce pas parce que, non seule­ment ils nous font rêver d’un mer­veilleux inac­ces­si­ble, mais que, aus­si, ils entre­ti­en­nent effi­cace­ment nos peurs ?
Pour nous éclair­er sur la ques­tion, Fuck­ing hap­py end s’approprie la trame de Peau d’âne et son insup­port­able odeur d’inceste, en la truf­fant de délires tous azimuts. On pense à la Psy­ch­analyse des con­tes de fées de Bruno Bet­tel­heim pour la relec­ture adulte et à Into the Woods de Stephen Sond­heim pour la col­li­sion entre per­son­nages issus d’histoires dif­férentes. Et l’on est sur­pris par la per­ti­nence du regard que porte l’auteure sur des con­cepts du quo­ti­di­en : l’enfance, la famille, le cou­ple ou le deuil. Les hommes, qu’ils soient rois ou princes char­mants, peu­vent-ils être autre chose que des machines à désir, des gros cochons ou des pau­vres gars ? Et les femmes n’ont-elles pas d’autre choix que d’être des mères por­teuses, des épous­es hys­tériques, des enfants frag­iles ou des objets sexuels ?
S’ensuit un défilé déjan­té de créa­tures hautes en couleurs : une Blanche-Neige nymphomane, un Petit chap­er­on rouge caillera, des zom­bies façon Ring, des officiers alle­mands, une mar­raine trav­elote, un prince désœu­vré genre bik­er los­er, etc. De cette revue loufoque, dont cer­tains moments ont pu sem­bler, le soir de la pre­mière, moins aboutis ou moins ryth­més, se dégage l’extraordinaire énergie d’interprètes poly­mor­phes, avec leurs lots d’audace, de gri­maces, d’accents, de pos­tures et de ren­tre-dedans – femmes en tête : Sarah Fuentes, mégère tout ter­rain mais jamais apprivoisée, et Maud Imbert, vis­age poupin en tutu immac­ulé ou regard glaçant en Faucheuse venue d’outre-Manche. Portés par cette fougue comique qui détourne les codes et se joue des clichés, la fic­tion rejoint la réal­ité lors de fréquentes adress­es au pub­lic et le texte se fait l’écho de notre époque dont les hor­reurs et les souf­frances n’ont rien à envi­er à celles des pays imaginaires.
Sur une scène où sont présents peu d’éléments de décors, mais intel­ligem­ment util­isés, et où par­ticipe pleine­ment à la nar­ra­tion une musique orig­i­nale et fig­u­ra­tive, on remar­quera l’élégance de cos­tumes soignés, inven­tifs, évo­ca­teurs et étonnants.
Un spec­ta­cle sur­volté, qui lie le con­te à la réal­ité et provoque l’hilarité en nous rap­pelant nos angoiss­es ; un diver­tisse­ment résol­u­ment inclass­able, porté par des inter­prètes débor­dant d’une énergie con­tagieuse qui fait vol­er en éclats tout ce qu’on a tou­jours voulu nous faire croire sur les con­tes de fées et de princes charmants.

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