Comment êtes-vous arrivée au Châtelet Musical Club (CMC) ?
Le concepteur, Jean-Philippe Delavault, et la direction du Châtelet me connaissaient car j’ai participé à de nombreuses productions du Théâtre du Châtelet [Kiss Me, Kate, Les Parapluies de Cherbourg, Into the Woods, 42nd Street – N.D.L.R.]. Je pense qu’ils se sont dit « on va faire un essai avec elle, voir ce qu’elle donne en… » je dis toujours « Judy Garland moins le quart » parce que le rêve de Jean-Philippe est de faire un hommage au Judy Garland Show, mais je n’oserais jamais me comparer à Judy Garland ! (rires)
C’est beaucoup de travail, mais c’est une vraie chance de pouvoir animer cet événement qui ressemble à Jean-Philippe, qui me ressemble et qui ressemble surtout à tous nos invités !
Parlez nous de ce travail en duo avec Jean-Philippe Delavault.
Jean-Philippe est conseiller artistique au Châtelet, concepteur du projet et metteur en scène de ces cabarets. Il s’occupe de réunir et de coordonner tous les corps de métier, car nous sommes dans le grand foyer du théâtre, qui est un espace luxueux, mais il faut le transformer en salle de spectacle [beaucoup de travail pour la régie, la sonorisation, la lumière… – N.D.L.R.].
Ensuite nous discutons tous les deux de nos envies de casting, des artistes que l’on souhaite inviter et de comment mélanger les genres. Tous les mois, il y a des invités qui n’ont rien à voir les uns avec les autres : ce n’est pas rare que l’on ait une Cassiopée Mayance qui chante aux côtés d’une chanteuse lyrique et, entre cela, Vincent Heden.
Quelles sont les missions du Châtelet Musical Club (CMC) ?
Le but de ce CMC, au-delà d’être un Judy Garland Show, c’était vraiment de faire une heure de spectacle très qualitatif, mais surtout que tout cela se fasse dans une ambiance relaxe et que l’on dédramatise le côté un peu technique de la comédie musicale.
On joue pour des gens, il faut que cela reste joyeux et qu’il y ait un échange avec le public et c’est pour ça qu’au CMC, on veut qu’il y ait de l’interaction, on souhaite inclure le public dans ce que l’on est en train de faire sur scène.
Ensuite, nous parlons plus en termes d’ambitions. La première est que toutes les formes de comédie musicale se retrouvent au CMC : la contemporaine, la classique, la nouvelle, la française. Car il y a de la comédie musicale française, il ne faudrait pas l’oublier ! Les opérettes en font partie par exemple et il y a des trésors dans l’opérette. Le but est que tout cela cohabite avec des comédies musicales de Stephen Sondheim, de Stephen Schwartz, de Cole Porter ou même les opéras de Leonard Bernstein. Il y a une volonté d’être un laboratoire qui aborde tout et qui donne la chance à tous les styles sans préférer l’un à l’autre.
Il y a aussi l’idée que les artistes lyriques peuvent cohabiter et rencontrer les artistes de comédie musicale et enfin que les anciens côtoient les jeunes ! Les élèves du cours Florent, de l’ECM, du conservatoire de Saint-Maur-des-Fossés : c’est l’avenir de ce métier.
Bref, on cherche, on mélange, on mixe.
Comment repérez-vous les talents de la nouvelle génération ?
Alors moi, d’une part, j’enseigne dans plusieurs écoles, et Jean-Philippe va voir de nombreux spectacles. Et après, cela se fait selon des libertés des uns et des autres, car les écoles de comédie musicale ont des emplois du temps très chargés, et même si on reprend des choses qu’ils ont déjà faites, cela implique à nouveau une mobilisation, des nouvelles répétitions, etc. En somme, on cherche et on va voir des spectacles.
Est-ce que ces rendez-vous arrivent à toucher un public plus large que les professionnels du milieu ?
C’est la magie de ce genre d’événements. Dès le départ on n’avait pas beaucoup de gens du métier qui venaient ; c’était d’abord le public fidèle au Châtelet. Ensuite, c’est le bouche-à-oreille ; les gens qui viennent repartent toujours en me disant : « Ah mais c’est super chouette, c’est génial ! » Cela leur permet de découvrir la comédie musicale pour un prix qui est tout de même abordable. Et je touche du bois car les deux séances que l’on fait – qui ne sont pas des grosses jauges, soyons humbles – sont remplies.
Donc c’est bien la preuve que les gens aiment la comédie musicale et ont envie d’en écouter, de l’explorer et d’être surpris. On me dit souvent : « Le public français ne va voir que les comédies musicales qui sont tirées de films. » Eh bien la preuve que non ! On est beaucoup plus riche dans notre histoire de comédie musicale que ce que l’on tend à croire. Cela fait longtemps que le public français et les productions franco-américaines existent et c’est cela que l’on veut montrer au CMC.
Est-ce que ce rôle de maîtresse de cérémonie vous plaît ?
Et comment ! Alors moi je m’éclate ! Je travaille aussi beaucoup car il faut écrire les textes, faire un peu l’historique sans être trop « conférencière comédie musicale ». Mais j’essaie d’apporter un peu de pédagogie, un peu d’humour, de chanter et surtout d’être là pour se faire rencontrer des artistes qui ne se côtoieront peut être jamais sur scène. Et il y a ce côté d’improvisation qui est très différent de lorsque l’on joue pour une comédie musicale. J’aime les deux, mais là c’est génial de pouvoir s’amuser avec le public : je prépare des choses, mais le public rebondit toujours. Écoutez, c’est un très beau rôle !
Les CMC seront-ils renouvelés en 2023 ?
On l’espère ! Il y a beaucoup de choses qui se mettent en place du fait du changement de direction, mais j’espère que cela sera reconduit. Il va falloir que l’on commence à travailler très vite sur la prochaine saison. Notre nouveau directeur a dit – je crois que c’était dans Libération – qu’il voulait faire du Châtelet un endroit « populaire, transgressif et joyeux » et alors là je me suis dit que ça collait parfaitement avec le CMC.
Et vous, vos actualités ?
On fait un projet avec le CMC qui est génial car c’est la première fois que le Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris (CNSMDP) va participer avec plusieurs chanteuses lyriques au CMC. Ça s’appelle Classically Trained! Les filles vont toutes chanter de la comédie musicale et même pas dans le style lyrique ! On va de Funny Girl à Hairspray, donc c’est un travail génial. Surtout quand on pense que des artistes comme Kelli O’Hara ou Audra McDonald viennent du lyrique et sont maintenant des stars de Broadway. Donc c’est travailler avec des instruments qui sont extraordinaires et cela m’éclate beaucoup.
Après je pars pour Toulon reprendre le rôle de Ruth dans Wonderful Town. C’est avec une équipe formidable et je dois avouer que faire de la comédie musicale dans une maison d’opéra, c’est génial. Il y a les moyens, un savoir-faire qui s’adapte très bien a la comédie musicale et ces chœurs de 40 personnes sur scène, ce sont des choses inespérées dans le privé [À l’Opéra de Toulon, elle a également été à l’affiche de South Pacific en 2022. – N.D.L.R.].
Les prochains concerts du Châtelet Musical Club auront lieu les 4 mars, 15 avril et 13 mai.