L’énorme succès remporté par Into the Woods au City Center en mars dernier a permis à cette comédie musicale de Stephen Sondheim d’être transférée le 10 juillet au Théâtre Saint James à Broadway, d’abord pour un engagement limité à huit semaines – renouvelé à plusieurs reprises – qui s’est prolongé et qui va prendre fin le 8 janvier 2023 au terme de 209 représentations.
Mais déjà les préparatifs sont en place pour assurer que le nom de Sondheim soit à nouveau à l’affiche à Broadway la saison prochaine, avec cette fois une nouvelle production de Merrily We Roll Along, l’un de ses échecs les plus cinglants – seulement seize représentations après sa première le 16 novembre 1981. Il faut reconnaître que son sujet — l’amitié qui lie deux garçons et une fille, et se dégrade au fil des ans, racontée en compte à rebours – avait de quoi surprendre. Le livret de George Furth, emprunté à une pièce écrite en 1934 par George S. Kaufman et Moss Hart, mettait en scène Franklin Shepard, un compositeur de comédies musicales qui, au cours des ans, prend ses distances avec ses amis et devient un producteur de films ; Charley Kringas, un écrivain, scénariste et auteur des paroles ; et Mary Flynn, une journaliste et critique de théâtre… tous les trois s’étant lié d’amitié à l’orée de leurs carrières respectives. Mais l’histoire qui part du présent pour progresser par étapes vers leurs passés et révéler ce qui a détruit leurs liens d’amitié, devait dérouter les spectateurs peu habitués à remonter le temps.
Pour sa part, Sondheim s’était pris au jeu et, si ses airs dans le premier acte avaient la consistance d’une partition normale, à mesure que l’action rétrogradait, les chansons devenaient plus sobres, surtout la chanson-titre reprise plusieurs fois mais dans un style de plus en plus dénudé. De sa partition, plusieurs morceaux de choix devaient quand même émerger, et notamment des airs tels que « Old Friends », « Good Thing Going » et surtout « Not a Day Goes By », l’un des plus émouvants qu’il ait créé – on l’entend pour la première fois dans le premier acte lors d’une dispute entre Shepard et sa femme Beth qui mène à leur divorce, puis dans une version plus traditionnelle dans le second acte quand ils se marient.
La pièce qui n’avait jamais été reprise à Broadway depuis a cependant connu entre-temps des révisions et des interprétations multiples, dont notamment une version à la Menier Chocolate Factory à Londres en 2012, qui devait ensuite poursuivre une carrière étincelante au Théâtre Harold Pinter dans le West End et remporter l’Olivier Award pour la meilleure reprise d’une comédie musicale. Elle a depuis été montée en 2017 au Théâtre Huntington à Boston dans une première américaine qui avait déjà fait parler d’elle, avant d’être présentée depuis la semaine dernière Off-Broadway par la New York Theatre Workshop
Dans une mise en scène remarquable de Maria Friedman, cette reprise re-conçue, réécrite et révisée dispose également d’un atout majeur en Daniel Radcliffe (alias Harry Potter) sur l’affiche dans le rôle de Charley, aux côtés de Jonathan Groff et Lindsay Mendez dans ceux de Franklin Shepard et Mary Flynn, respectivement. On peut déjà attribuer le succès de cette reprise Off-Broadway à la présence de cet acteur si bien connu des foules.
La date d’ouverture n’a pas encore été annoncée, ni le théâtre où elle aura lieu, mais l’équipe de production a laissé entendre que ce serait à l’automne dans le cadre de la saison 2023–2024.