Philippe Meyer, ma radio : histoire amoureuse

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Le Lucernaire — 53, rue Notre-Dame-des-Champs — 75006 Paris.
Du 26 janvier au 26 avril 2020, le dimanche à 19h.

Un spec­ta­cle écrit et inter­prété par Philippe Meyer.
Mis en scène par Benoit Carréa.
À l’accordéon : Jean-Claude Laudat.

Cer­tains épousent leur pro­fesseur de théâtre. Lui s’est mis à la colle avec celle qui fut sa baby-sit­ter : la radio. Enfant, elle lui tenait com­pag­nie dans une mai­son vide d’amour. Dans le gros poste Tele­funken Deutsche Qual­ität, comme dans la voix de Charles Trenet, il voy­ait briller la mer, des abbés à bicy­clette, des sol­dats bardés de fer, le 14 Juil­let en fête… Le monde n’arrivait jusqu’à lui qu’en emprun­tant des tim­bres de voix. Il les a encore à l’oreille. Pen­sion­naire, le poste à galène, caché sous les draps, lui offrit quan­tités de lignes de fuite et d’issues de sec­ours, payables de quelques dimanch­es de colle. Étu­di­ant, la radio le présen­ta à la chan­son : il ne la quit­ta plus. Elle devint pour lui une famille, un refuge, une force, une échap­pa­toire, un bien enfin com­mun. À 30 ans, au sor­tir d’une ado­les­cence qui n’avait que trop traîné, la radio et lui offi­cial­isèrent leur liai­son. Ensem­ble, ils nav­iguèrent d’ondes en ondes, nouant au pas­sage avec des incon­nus des deux sex­es et des trois âges, des ami­tiés à la vie à la mort qu’aucune ren­con­tre n’abîma jamais. Aujourd’hui, il s’interroge à haute voix : « Si je n’avais pas fait ce méti­er, aurait-il fal­lu que je travaille ? »

Notre avis : Dans une con­fes­sion pudique et dro­la­tique, émail­lée de ses chan­sons favorites inter­prétées par l’ancien pro­duc­teur radio et accom­pa­g­né à l’accordéon par Jean-Claude Lau­dat, Philippe Mey­er évoque son par­cours, qui l’a mené des bancs d’étude au Cana­da, où sa ren­con­tre avec Gilles Vigneault, lui qui nour­ris­sait déjà une pas­sion pour la chan­son, s’est révélée cru­ciale. Notons qu’il par­lait en des ter­mes ana­logues de cette ren­con­tre lors de sa dernière, et émou­vante, émis­sion sur France Inter : « La prochaine fois, je vous le chanterai. » Car de radio, comme le titre du spec­ta­cle l’indique, il en sera beau­coup ques­tion. Celle qui per­met de s’échapper d’une enfance terne, de décou­vrir la chan­son, les pub­lic­ités, les feuil­letons… Puis celle dont il fera par­tie et avec quel tal­ent, que ce soit sur France Cul­ture ou France Inter. Se rep­longer dans les sou­venirs de cet homme, c’est revivre toute une époque où la radio de ser­vice pub­lic avait d’autres ambi­tions que celles d’aujourd’hui. Avec mal­ice et éru­di­tion, Philippe Mey­er entraîne son pub­lic, que l’on devine con­sti­tué de nom­breux anciens fidèles audi­teurs, pen­dant un peu plus d’une heure, sur des chemins de tra­verse, se gar­dant de raviv­er des con­flits encore trop douloureux, mais égratig­nant avec gour­man­dise des vedettes comme Jacques Chan­cel, assuré­ment l’un des moments les plus hila­rants du spec­ta­cle. Et les Frères Jacques fig­urent en bonne place dans le pan­théon per­son­nel du comé­di­en, qui leur rend un hom­mage vibrant. Dans une mise en espace mod­este, sans temps mort mais en prenant son temps, ce con­teur à la voix suave séduit en douceur l’assistance, ravie.

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