À son origine, la pièce eut quelques difficultés à s’imposer. Création d’un parfait inconnu, Meredith Willson, qui en avait écrit le livret, la musique et les paroles des chansons, son action se situait au début du XXe siècle et faisait appel à des éléments passés et désuets. Qui plus est, le cadre de cette action était une petite ville, River City, dans l’état de l’Iowa, pour tout dire le fin fond du pays. La pièce devait pourtant devenir un énorme succès et rester à l’affiche pour 1 375 représentations, et – consécration suprême – recevoir, en 1958, le Tony Award de la meilleure comédie musicale en battant West Side Story, son seul vrai rival.
Bien connue maintenant pour ses airs à succès (« Seventy-Six Trombones », « Ya Got Trouble », « My White Knight »), c’est la deuxième fois depuis sa création, le 19 décembre 1957, que la pièce est reprise à Broadway. Si la première, en 2000, avait fait ses preuves (avec 997 représentations), la seconde était considérablement attendue.
En effet, les représentations auraient dû débuter en 2020, mais elles durent être (longuement) repoussées en raison de la pandémie de Covid-19, et c’est finalement le 10 février 2022 qu’a eu lieu la soirée de première, au Winter Garden Theatre. L’attrait essentiel de cette reprise – et l’argument principal utilisé par les producteurs pour attirer les spectateurs – était la présence dans les rôles principaux de Hugh Jackman et Sutton Foster, deux acteurs très appréciés des foules.
Bien connu dans les milieux théâtraux pour sa présence dans des productions telles que Oklahoma! et The Boy from Oz, Hugh Jackman est depuis devenu une star de l’écran, très remarqué dans des films comme Les Misérables, la série des X‑Men et surtout The Greatest Showman. Sa présence à Broadway est un atout majeur, d’autant que la pièce lui donne l’occasion de renouer avec un milieu qu’il connaît bien et une œuvre qui lui permet de jouer la comédie, de chanter des chansons connues du grand public, de danser et même de faire des claquettes. Il faut reconnaître que, dans l’ensemble, sa prestation est animée, cajoleuse et à la hauteur de la réputation qu’il a acquise. Cela dit, Robert Preston, créateur du rôle à Broadway et que l’on peut voir dans la version filmée de 1962, et dont les vocalisations sont l’un des points centraux de l’enregistrement original de la pièce, a marqué le rôle d’une telle façon qu’il est difficile d’apprécier les efforts faits par d’autres interprètes. En tant que charlatan et pseudo-voyageur de commerce, Jackman n’est malheureusement pas très convaincant, ce qui nuit un peu au plaisir que l’on a à le voir.
Dans le rôle de Marian, la libraire et professeure de musique que le professeur Harold Hill espère séduire pour l’aider dans ses machinations, Sutton Foster est une autre raison de voir la pièce. Vedette de comédies musicales comme Anything Goes, Thoroughly Modern Millie ou Shrek, elle est l’une des actrices les plus recherchées à Broadway. Elle est ici encore l’un des attraits majeurs de cette production.
Mais ce qui semble le plus réussi dans la pièce, ce sont les enfants censés représenter les jeunes citoyens de River City. Tous ces jeunes font leurs débuts à Broadway et beaucoup n’ont qu’une dizaine d’années au plus, démontrant avec aise que le talent n’attend pas le nombre des années. Même quand le rythme des ballets ralentit dans la chorégraphie plate et sans imagination due à Warren Carlyle, ils parviennent à leur donner un souffle de jeunesse et d’enthousiasme qui est très réconfortant. Somme toute, quelque soixante-cinq années après sa création, The Music Man n’a rien perdu de son charme, même si la pièce fait parfois un peu vieux jeu.
Plus d’informations sur https://musicmanonbroadway.com/
Ce show est éblouissant ! « The Music Man » 2022 est tout ce que j’aime: très classique, joyeux, coloré, enlevé, drôle ! Les costumes sont superbes, les chorégraphies variées et extrêmement dynamiques. Il y a plein d’enfants qui sont impressionnants de talent précoce. Hugh Jackman est parfait dans ce rôle de gentil escroc séduisant tout le monde dans un trou perdu de l’Iowa, il s’éclate sur scène et dynamise toute la troupe. Sutton Foster a un jeu physique épatant et fait de Marian un personnage féminin très moderne. Côté musique, la partition est brillament orchestrée par Patrick Vaccariello. Deux heures 30 de pur bonheur ! ???